Eric Schuler (France Froid Devt) : « La chaine du froid, des enjeux de formation, techniques et socio économiques. »

La température est un paramètre déterminant à chaque étape de la vie d’un produit : production, conditionnement, stockage, transport, distribution… A la croisée de considérations humaines, sociétales, environnementales, économiques et technologiques, la maîtrise de la chaîne du froid est un enjeu majeur dans notre société de consommation. Rencontre avec Eric Schuler, dirigeant de France Froid Développement.

Eric Schuler, dirigeant de France Froid Développement.

Eric Schuler, dirigeant de France Froid Développement.

Bonjour M. Schuler. Pouvez-vous nous présenter la société France Froid Développement ? 

La France est le leader mondial dans les domaines d’activité du froid, que ce soit dans la recherche, la métrologie, l’ingénierie des matériaux et leurs mises en œuvre. Le nom de France Froid Développement pour « France » parce que nous représentons la France, « Froid » parce que nous appuyons et armons les entreprises liées à la chaîne du froid dans l’ensemble des domaines et « Développement » parce que nous exportons notre savoir-faire et notre maîtrise à l’international comme en Colombie actuellement.

Quels sont les principaux enjeux de la chaîne du froid ? 

Tout commence par la formation. Dans les pays occidentaux, les problématiques de pertes de marchandises sont liées à l’humain et non plus à la technique. Qu’elle soit liée à la science, à la maîtrise technique de la chaîne du froid, à la formation, à l’exploitation du matériel ou à l’accompagnement des clients, l’expertise est essentielle. Aujourd’hui, il n’existe pas encore de cursus scientifique dédié à la chaîne du froid, c’est un domaine d’exploitation de savoirs multiples, principalement détenus par des ingénieurs et des pharmaciens.

Le second enjeu est technique. L’ingénierie des matériaux constitue le principal pilier technologique de la filière comme le polyuréthane et le polyester qui interviennent par exemple dans la fabrication des panneaux qui serviront à la construction des carrosseries. Dans l’optique des engagements de la COP21, nous développons à l’échelle industrielle les dernières innovations technologiques certifiées, dont les ratios économiques sont déjà maîtrisés. D’autres pistes sont aussi étudiées et développées comme l’utilisation de l’azote en produit réfrigérant, l’abandon du moteur thermique pour les groupes frigorifiques remplacé par une pompe hydraulique, utilisation de fluides moins polluants comme le bio-méthane…

Mais les enjeux sont aussi socio-économiques. Pour vous donner une idée, il nous faudra nourrir 9 milliards d’individus en 2050 (projection de la population mondiale par l’ONU et l’OMS). Si une révolution ne s’opère pas dans l’exploitation agraire et dans le transport des denrées périssables, nous ne pourrons faire face à cette situation et nourrir convenablement cette population qui perturbera à terme la stabilité mondiale et où nous ne parlerons plus de matière première ni de développement durable comme enjeux géopolitiques, mais de se nourrir. D’autre part, pour un secteur encore fragile comme celui des biotechnologies pharmaceutiques, le risque sanitaire et financier est considérable. Avec un coût unitaire par dose de 5000 euros, nous devons être en mesure de garantir le transport et le stockage des doses dans le plus grand respect de la chaîne du froid.

Comment apportez-vous cette garantie à vos clients ?

Par une bonne traçabilité de l’ensemble des éléments. Nous travaillons actuellement sur la mise en œuvre de la chaîne du froid en Colombie. Leurs pertes de denrées périssables oscillent entre 30 et 40%, ce qui est un frein majeur pour le développement du pays et sa politique de santé publique. On dénombre chaque année 325 000 intoxications alimentaires graves liées à des problèmes de produits avariés, et près de 5000 décès imputés aux intoxications (données 2014 du CDC).

Élément garant du bon respect de la chaîne du froid, la traçabilité est régulièrement testée et vérifiée par des organismes tels que le CEMAFROID ou la DGCCRF. Il ne sert à rien de déployer des moyens techniques, physiques ou mécaniques si vous ne pouvez pas vous assurer qu’ils sont correctement exploités. Par ailleurs, la traçabilité numérique présente le grand avantage de pouvoir croiser les informations de la vie entière d’un produit donné, de sa production à sa distribution finale, en passant par son transport et son stockage. Pour notre client, cela certifie que sa marchandise est transportée dans les meilleures conditions sanitaires, tout en évitant les pertes et en garantissant le respect des standards de consommation imposés.

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