Obsolescence programmée des compétences IT, acculturation à l’IA, nouvelles modalités pédagogiques, importance des soft skills, apports de l’IA aux parcours de formation… Stéphane Lapierre – principal solution architect, EMEA pre-sales chez Pluralsight – fait le point sur tous les sujets chauds du moment.
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Dans le contexte économique et géopolitique actuel, notez-vous un ralentissement des embauches dans l’IT ?
Les projets liés à l’IA générative et à l’IA agentique sont, bien sûr, jugés prioritaires. Les chantiers d’automatisation touchent particulièrement le service client et le support. Les sociétés qui avaient déployé des bots « traditionnels » préfèrent repartir de zéro, et se doter de nouveaux outils, plus pérennes, et offrant un meilleur retour sur investissement.
Comment les entreprises font-elles face au tsunami que représente l’IA ?
La révolution technologique de l’IA crée un sentiment d’urgence. Les départements des RH et de développement de l’e-learning mettent en place des programmes de formation accélérée. Comme il y a quelques années, lors de l’adoption du cloud, il s’agit de former immédiatement aux nouveaux outils, même si la stratégie IA, en interne, n’est pas encore organisée, structurée et industrialisée.
Face aux enjeux de compétitivité liés à l’IA, les équipes doivent rapidement monter en compétences. Toutefois, à la différence du cloud, l’IA générative a une portée globale. Une entreprise doit former l’ensemble de ses collaborateurs, et pas seulement l’IT.
La transformation numérique conduit à une obsolescence accélérée des compétences des équipes IT. Pour lutter contre ce phénomène, comment peut-on combler le fossé entre les compétences existantes et celles à venir ?
Pour relever ce défi du skill gap, il convient, tout d’abord, de cartographier les compétences d’une organisation. Ce chantier peut s’avérer complexe, un même rôle pouvant comprendre différents niveaux de compétences.
De nouveaux outils permettent d’automatiser ce travail, puis de mesurer l’écart entre les compétences actuelles et celles requises à l’avenir. Cette cartographie n’est pas figée et évolue constamment, certaines compétences devenant rapidement obsolètes. L’accent est mis sur les rôles stratégiques liés à la data et à l’IA.
Quels sont les apports de l’IA à ces enjeux de formation ?
L’IA est partout, et la plateforme de Pluralsight l’intègre nativement à tous ses processus. Elle intervient dans la définition d’un rôle, le travail de matching pour mesurer le skill gap, puis dans la constitution d’un parcours de formation adapté, qui comblera l’écart constaté.
L’IA permet, par ailleurs, de créer des parcours de formation plus personnalisés et interactifs. Chaque apprenant ne part pas avec les mêmes prérequis ni les mêmes attentes. Tout comme il interpelle un formateur lors d’un cours en salle en levant le doigt, il peut demander à un assistant virtuel d’apporter des précisions sur un point ou de revoir la définition d’un concept. Cette interactivité met fin aux critiques sur l’absence de support des formations en ligne.
Quelle est la stratégie de formation suivie par les entreprises ?
Des entreprises « traditionnelles » planifient toujours, chaque année, leur stratégie de formation. Le collaborateur doit choisir sa formation dans un catalogue qui, dès sa publication, est déjà en partie obsolète.
D’autres organisations, plus matures, font le pari de l’autonomisation du collaborateur. La formation fait partie de ses objectifs et, sur la base d’un quota d’heures de formation, il accède à une bibliothèque de contenus régulièrement mis à jour. Le développement de communautés d’experts permet d’encadrer cette pratique grâce à un partage d’informations et de retours d’expériences entre pairs.
Il s’agit, par ailleurs, d’acculturer au numérique l’ensemble d’une organisation et d’uniformiser le niveau de connaissance. Les métiers doivent, par exemple, comprendre les apports et les limites de l’IA agentique pour être pleinement partie prenante dans l’automatisation de leurs processus.
Quelles sont les modalités pédagogiques privilégiées ? Quel ratio observez-vous entre la formation présentielle et la formation distancielle ?
L’évolution rapide des technologies joue en faveur des formations en ligne, qui sont devenues, en quelque sorte, la norme. Elles permettent de proposer une grande diversité de contenus, à un coût moindre. À la différence de la formation en salle, qui a des contraintes physiques et de planification, le virtuel permet de former davantage d’individus, et ce, à plusieurs sujets simultanément.
Si la notion de classe virtuelle est désormais bien répandue, la tendance au rapid learning correspond aux nouvelles habitudes de consommation, en offrant des contenus plus compacts. Les nouvelles générations n’ont pas toujours le même niveau d’attention que leurs aînés.
Avec son concept de labos, Pluralsight développe, par ailleurs, des expériences immersives qui permettent d’ancrer des connaissances théoriques par la pratique. Elles permettent de tester une nouvelle fonctionnalité dans un environnement sécurisé (sandbox), ce qui réduit le time to market.
Contrairement à une idée reçue, les soft skills peuvent être aussi enseignées en classe virtuelle, ou en formation en ligne. De plus en plus de programmes associent d’ailleurs compétences techniques et compétences comportementales. Pour travailler avec les directions métiers, les équipes IT doivent savoir communiquer et collaborer, faire preuve d’adaptabilité.
