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Google investit 5 milliards d’euros en Belgique : un moteur d’innovation… et un défi de souveraineté

 

Google va investir 5 milliards d’euros à Saint-Ghislain, en Wallonie, pour étendre ses centres de données et infrastructures d’IA. Un projet colossal salué par le gouvernement belge, mais qui relance le débat européen sur la dépendance technologique face aux géants américains.

 

Cinq milliards, 300 emplois et une promesse : accélérer la transformation numérique de l’Europe. Le géant américain Google a annoncé l’un des plus gros investissements technologiques de l’histoire belge, destiné à étendre son campus de data centers à Saint-Ghislain, en Wallonie. L’objectif : soutenir la croissance de l’intelligence artificielle et du cloud sur le continent. Pour Bart De Wever, Premier ministre belge, cette implémentation marque un tournant pour l’économie numérique du pays. “Ce projet consolide notre rôle dans le futur digital de l’Europe. Il crée des emplois qualifiés et renforce notre transition énergétique”, souligne-t-il. L’ensemble des installations sera alimenté en énergie sans carbone, conformément aux objectifs européens à l’horizon 2030.

 

Entre innovation et dépendance stratégique

 

L’annonce suscite un enthousiasme certain à Bruxelles comme à Namur, mais elle réveille aussi un vieux dilemme : comment concilier attractivité économique et indépendance technologique ? En accueillant l’un des piliers de l’infrastructure cloud mondiale, la Belgique s’impose comme un hub numérique majeur… au prix d’une dépendance accrue à un acteur non européen. “Cet investissement renforce notre souveraineté numérique et s’inscrit dans notre stratégie digitale”, a déclaré le vice-président du gouvernement wallon, Pierre-Yves Jeholet.

Malgré l’optimisme gouvernemental, cette lecture suscite des réserves chez les défenseurs du cloud européen. Le partenariat renforcé entre Google et Proximus, qui développe une offre dite souveraine adossée au géant américain, illustre toute l’ambiguïté du concept. Où s’arrête une offre dite souveraine lorsque les données critiques transitent par une infrastructure sous juridiction américaine ?

 

La souveraineté, ligne de fracture du cloud européen

 

Depuis la polémique suscitée par l’accord entre Microsoft et l’École polytechnique en France, suspendu sous la pression du CNLL, le débat sur la souveraineté numérique ne cesse de s’intensifier. Les États européens veulent à la fois attirer les géants du numérique et préserver le contrôle de leurs données.

Le cas belge s’inscrit dans ce grand écart : le pays se félicite d’un investissement vert et créateur d’emplois, tout en revendiquant un leadership “souverain” adossé à Google. Le ministre de la Défense, Theo Francken, le reconnaît lui-même : “Renforcer nos capacités numériques passe par un dialogue ouvert avec les géants de la tech, mais cela exige aussi des garanties strictes pour notre sécurité nationale.”

Une mise en garde qui résonne alors que les lois extraterritoriales américaines, comme le Cloud Act, continuent de peser sur la confiance dans les solutions US. Derrière l’investissement record, l’enjeu est clair : l’Europe veut garder la maîtrise de ses infrastructures critiques, sans se couper des innovations mondiales. La Wallonie, qui accueillait déjà le premier data center de Google en 2009, devient ainsi un laboratoire de ce fragile équilibre entre croissance et indépendance.

 

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