Hive ou une nouvelle approche du stockage et du calcul dans le Cloud

La start-up Hive développe avec Inria un Cloud souverain, qui souhaite rivaliser avec les clouds providers des géants américains. Son atout : elle stocke exclusivement sur des ordinateurs qui existent déjà…

David Gurlé est un ingénieur français, connu comme l’un des pionniers des communications sur IP. Avant Hive, il a fondé la licorne Symphony Communication Service.

David Gurlé est un ingénieur français, connu comme l’un des pionniers des communications sur IP. Avant Hive, il a fondé la licorne Symphony Communication Service.

En à peine un an d’existence, tout est allé très vite pour la start-up Hive, basée en Suisse. Une première levée de fonds de 7 millions d’euros a été réalisée en juin 2022. Une autre de 20 millions d’euros est en préparation pour la fin d’année, cette fois pour permettre un déploiement marketing et commercial rapide dans huit pays.

Entretemps, un partenariat a été mis en place avec Inria pour développer une offre inédite de cloud souverain de taille globale, en utilisant la technologie peer-to-peer. Inria intensifie ainsi ses travaux autour des clouds décentralisés et Hive bénéficie de l’expertise poussée de la recherche publique française, avaient indiqué alors les deux partenaires… Surtout, l’entreprise annonce qu’elle utilise le chiffrement de bout en bout, « avec les clés de chiffrement qui sont stockées par l’utilisateur et un placement géographique des données en fonction du désir/législation des utilisateurs ».

HiveHive propose en effet un cloud distribué, décentralisé et privé, qui combine les ressources inutilisées des ordinateurs dans le monde, explique de concert David Gurlé, président-fondateur de l’entreprise (et ancien bras droit de Bill Gates) et Antoine Clerget, son directeur général. Et de rappeler que 4 milliards d’ordinateurs sont connectés chaque jour à internet, avec toutes leurs ressources dans le cloud (50 millions de serveurs tournent partout dans le monde)… « Il faut donc revenir à l’esprit originel de la décentralisation d’internet qu’est le peer-to-peer, explique-t-il. Soit un système non vulnérable, naturellement plus performant, plus résilient, plus économe en énergie avec des principes de protection des données qui sont propres à notre culture européenne, qui a une puissance de calcul illimité. »

Son produit permet un stockage sécurisé de ses données et, en un an, a déjà dévoilé plusieurs versions, à chaque fois, dotées d’ajouts de fonctionnalités supplémentaires. « HiveNet, cloud communautaire, permet aux gens de fournir une partie de leur capacité à notre cloud communautaire, avec une première application (HiveDisc), qui permet aux usagers de stocker leurs fichiers », précisent-ils.

Dans sa dernière mise à jour, l’entreprise annonce notamment une version MacOS, avec la capacité de relance automatique, comme l’intégration complète dans l’Explorateur Windows ou la possibilité de renommer, déplacer ou télécharger des dossiers et des fichiers de façon bien plus fiable et rapide…

 

Dès cet été, une première offre « grand public » sera commercialisée, puis suivra en 2024 celle pour les professionnels (PME et grands groupes) et l’ajout d’hiveCompute, l’exécution des programmes… Soit un stockage et partage sécurisé des données sans limites, du calcul et des programmes sur Kubernetes. L’entreprise continue aussi de déposer des brevets : « Nous en avons quatre en cours à ce jour. »

En matière de tarification, chaque utilisateur pouvant partager une partie de ses ressources informatiques (disque dur, CPU, GPU), ce sera gratuit s’il consomme moins qu’il ne partage. A l’inverse, s’il en consomme davantage, il paiera la somme moyenne déterminée par le marché de l’offre et la demande. Le Cloud d’Hive sera donc accessible à chacun avec deux modes de paiement, soit en fournissant de l’espace de stockage, soit en souscrivant à une offre dont le montant commencera à partir de 99 centimes par mois pour 50 GO. La version professionnelle suivra fin 2023-début 2024.

« Hive construit la communauté qui vient des utilisateurs et du matériel, d’où le fait que l’on commence avec une offre de stockage dans le cloud pour le grand public. » Hive met surtout en avant l’aspect économique, écologique et durable d’une telle offre. Comme tout système peer to peer, son efficacité dépend du nombre d’utilisateurs… (modèle pertinent à partir de 100 000 utilisateurs). « C’est plus sûr ! précise l’expert. Un fichier déposé est éclaté en 100 morceaux (auxquels on ajoute 50 morceaux), disséminés sur les ordinateurs des gens de la communauté, donc on ne peut pas l’attaquer ».

Aujourd’hui, l’entreprise compte près d’une quarantaine de collaborateurs et compte près de 1 000 utilisateurs en test dans 50 pays (10 000 attendus fin 2023)… Si David Gurlé admet engager un combat de David contre Goliath (vis-à-vis des Gafam), il reste confiant dans l’attrait d’une telle offre souveraine pour les internautes. « ‘L’ambition de Hive est de rendre internet et le cloud aux internautes. C’est un projet sociétal : on revient aux sources ! Le monde d’aujourd’hui est à la recherche d’alternatives », conclut-il, insistant sur le fait que Hive ne veut pas les données « néfastes » : « On classe les données, mais elles seront filtrées par les moteurs standards de surveillance… »