MAIF : L’assureur milite pour les communs numériques

 

Si elle maîtrise déjà le cœur de son système d’information, la Maif a initié plusieurs initiatives pour aller plus loin. Elle publie déjà des composants opensource, adhère au Tosit et à Assurtech.

 

Les motivations de la Maif pour l’open source, et sur le sujet de la souveraineté numérique, ne sont pas anciennes. Pour Guillaume Rincé, son Chief Technical Officer : « la protection des données, en particulier des données clients de nos sociétaires, est une préoccupation très forte, et ce depuis des années. Nous avons d’ailleurs formalisé une charte numérique dans ce sens depuis plus de dix ans. » Une charte dénommée « Pour un monde numérique, résolument humain et éthique » qui a précédé la mise en place du RGPD. Conséquence, sur le terrain, les data centers de la Maif sont en France, et « nous les opérons nous-mêmes », précise le CTO. Cette volonté de maîtriser son système d’information concerne également le volet logiciel. « Pour tout ce qui touche à notre cœur d’activité, comme la gestion des sinistres, la gestion des contrats…, nous développons nos outils en interne. Une démarche qui est également valable pour les portails web », détaille Guillaume Rincé. Implication de cette démarche, la mutuelle n’hésite pas à embaucher des ressources. « Depuis quelques mois, nous avons recruté des centaines de collaborateurs. Un moyen essentiel pour garder la maîtrise de son SI, souligne Guillaume Rincé. Au final, nous sommes en maîtrise de tous nos logiciels importants. » Pour les fonctions transverses, RH, bureautique, comptabilité …, la mutuelle a plus classiquement choisi de recourir à des outils du marché. Microsoft fournit la bureautique, « avec des licences E1 et E3 », précise Guillaume Rincé, Broadcom est présent dans le SI… « Nous n’avons pas vocation à redévelopper ces outils », justifie le CTO. Ce recours reste contrôlé. Côté cloud, son utilisation est d’abord évalué en fonction de la criticité des données et limité à certains types de traitements.

 

Une politique achat volontariste

 

Ces choix stratégiques se retrouvent dans la politique achat. « Nous ne travaillons pas ou peu avec des acteurs dont nous ne partageons pas certaines valeurs, notamment sur les aspects sociétaux et environnementaux », appuie le CTO. Mais même avec ces préoccupations éthiques, la mutuelle subit comme les autres entreprises les pratiques commerciales de certains éditeurs et « voit arriver un nombre croissant de demandes tarifaires déraisonnables », concède le CTO. « Nous avons fait évoluer nos politiques achats, appuie Guillaume Rincé. Outre, une meilleure connaissance des fournisseurs, nous exigeons aujourd’hui un engagement dans la durée avec des contrats passés pour une durée de cinq ans, voire plus. Un moyen efficace réduire les risques de dérapages financiers ».

 

Investir dans l’open source

 

Parallèlement, la mutuelle s’est impliquée dans l’opensource. Une démarche déjà ancienne, la mutuelle avait développé un outil chargé d’analyser les mails entrants, de les classer, de les hiérarchiser et de les envoyer au bon service. Le code source de cet outil baptisé Melusine* avait ensuite été publié en open source sur Github. Depuis, la Maif a adhéré au Tosit. « L’idée n’est pas de tout faire ou refaire en opensource, mais de partager des initiatives, explique Guillaume Rincé.

Exemple, le chatbot développé par la SNCF est assez complet et peut être utilisé par d’autres entreprises. » Dans cette logique, les projets en cours ou émergents au sein du Tosit portent sur l’utilisation de l’IA, sur l’administration des infrastructures….A la question de savoir si partager les mêmes briques logicielles avec d’autres assureurs ne pose pas question en terme de concurrence, Guillaume Rincé répond spontanément : « Les facteurs de compétitivité, les leviers pour se démarquer de nos compétiteurs, ne sont pas dans l’utilisation de ce type d’outils. En d’autres termes, que d’autres assureurs utilisent Melusine pour trier les emails n’est pas un problème. Ce n’est pas sur ce type de point que l’on peut se différencier. » Dans cet esprit, la Maif promeut le partage de ces composants de base et contribue aux développements opensource.

 

Une French Assurtech pour partager l’innovation

 

Outre le Tosit, la Maif a adhéré depuis sa création en 2018 à French Assurtech. Cet accélérateur basé à Niort regroupe outre la Communauté d’Agglomération du Niortais les 8 acteurs majeurs du monde du mutualisme, de l’assurance, de l’assistance (Groupe IMA, MAAF, MACIF, MAIF, Groupama Centre-Atlantique, Mutuelle de Poitiers Assurances, CNP Assurances et Groupe P&V). L’objectif est de mettre des ressources en commun pour identifier les outils numériques prometteurs dans le contexte de l’assurance. Outre l’accueil de start-up, l’accélérateur organise un salon annuel de l’innovation numérique, de l’insurtech et du risque.

 

*https://maif.github.io/