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Vidéosurveillance des salariés au sein de l’entreprise : guide de survie pour les employeurs

Aurélie Klein, Avocat à la Cour Cabinet Coblence & Associés

A l’ère du tout numérique et face à un besoin croissant de sécurité, la mise en oeuvre de dispositifs de vidéosurveillance au sein des entreprises devient une nécessité.

Or, une telle décision n’est sans conséquence sur la vie privée du salarié, et l’équilibre entre libertés et sécurité doit être impérativement recherché. Si cet équilibre est par nature dynamique, il n’en demeure pas moins encadré et oblige l’employeur à observer un certain nombre d’obligations légales.

L’installation de dispositifs de vidéosurveillance à destination des salariés constitue un traitement de données à caractère personnel au sens de la Loi du 6 janvier 1978 modifiée relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés. A ce titre, tout dispositif devra faire l’objet de formalités déclaratives auprès de la CNIL et ce, pour chaque site ou établissement équipé. L’employeur devra, en outre, veiller à faire un usage maitrisé, proportionné et nécessaire de ces outils (ii) et satisfaire à une obligation d’information renforcée (ii) afin d’éviter l’application de sanctions (iii).

  1. Sur l’obligation de veiller à l’adéquation, à la pertinence et au caractère non excessif (proportionnalité) des données collectées

Afin d’assurer l’équilibre entre sécurité et libertés, l’employeur devra, au moment de l’installation du dispositif, veiller à respecter le droit à la vie privée de ses salariés.

Ainsi, les caméras de vidéosurveillance ne devront permettre de collecter que les données strictement nécessaires à la poursuite des finalités qui auront été définies et ne pas être orientées de manière à filmer:

Car si la surveillance de zones sensibles peut être, dans certains cas, justifiée par des impératifs de sécurité, « le placement sous surveillance permanente de salariés, attentatoire à leur vie privée, ne peut être toléré que dans des circonstances exceptionnelles tenant, par exemple, à la nature de la tâche à accomplir au sens de l’article L1121-1 du Code du travail ».

Ainsi, la CNIL  a récemment considéré ainsi que la surveillance constante et générale, s’ajoutant à d’autres mesures de sécurité (porte blindée, code d’accès, badges, alarmes sur détection de mouvement, identifiants et mots de passes, etc) est disproportionnée au regard de la finalité de prévention des atteintes aux personnes et aux biens.

Enfin, le principe de proportionnalité s’applique également à la durée de conservation des images. La conservation de ces dernières ne doit pas excéder un mois. Si une procédure est engagée à l’appui des images litigieuses, ces dernières doivent être extraites du dispositif (après consignation de cette opération dans un cahier spécifique) et conservées pour la durée de la procédure.

  1. Sur l’obligation d’information

L’article 32 du 6 janvier 1978 impose au responsable de traitement de fournir à la personne auprès de laquelle sont recueillies des données à caractère personnel la concernant des informations, par écrit, sur l’identité du responsable de traitement, la finalité de ce traitement, les destinataires, leur droit d’accès, de rectification, et le cas échéant, d’opposition aux données les concernant.

Ainsi, l’ensemble des personnes concernées par le dispositif de vidéosurveillance (salariés et visiteurs de l’établissement) devront être informés au moyen d’un panneau, affiché de manière visible, dans les locaux placés sous surveillance:

En complément de cette information par voie d’affichage et sur le fondement de l’article L1222-4 du Code du travail, les salariés devront également faire l’objet d’une information spécifique de la mise oeuvre de ce traitement ainsi que de leurs droits et des conditions d’exercice de ces derniers.

Cette information à destination des salariés peut être faite par tout moyen (avenant au contrat de travail, note de service, etc).

Enfin, conformément aux articles L.2323-13 et L.2323-32 du Code du travail, l’employeur devra également informer et consulter les instances représentatives du personnel préalablement à la mise en place d’un tel dispositif.

  1. Sur les sanctions

Si la CNIL peut prononcer des sanctions financières pouvant aller jusqu’à 150.000 euros, c’est surtout la publication de l’éventuelle sanction qui peut être fortement préjudiciable pour l’entreprise et son image.

De tels manquements aux règles précédemment énoncées peuvent également faire l’objet de poursuites pénales. L’article 226-1 du code pénal sanctionne l’enregistrement de l’image d’une personne à son insu dans un lieu privé. Une entreprise peut alors se voir interdire d’exercer l’activité 

dans le cadre de laquelle l’infraction a été commise. Une peine d’un an d’emprisonnement peut également être prononcée tandis que l’amende peut s’élever à 225.000 euros. 

En cas de collecte déloyale ou illicite (art 226-16 du code pénal), l’employeur s’expose à une peine de cinq ans d’emprisonnement et de 300.000 euros d’amende. La sanction est la même en cas de conservation trop longue des données collectées (art 226-20), de détournement de la finalité du dispositif (art 226-21), ou d’absence de déclaration à l’autorité compétente (art 226-16). 

Enfin, s’agissant du travail, les procédures de sanctions disciplinaires ou de licenciement fondées sur des dispositifs de vidéosurveillance illégaux ou dont la mise en place n’a pas respecté les procédures d’information préalable requises seront en principe invalidées. De même que sur le terrain civil, « un salarié pourrait demander des dommages et intérêts pour les préjudices subis du fait de sa surveillance ».

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