[Exclusif] Bruno Le Maire : « Il n’y a pas de souveraineté politique au 21e siècle sans souveraineté numérique »

La souveraineté numérique, devoir régalien, est au cœur de la feuille de route gouvernementale. Depuis la montée en puissance des cyber-attaques, et de notre dépendance vis-à-vis des fournisseurs de « cloud » étrangers, la sécurisation de nos données est plus que jamais d’actualité. Si les déclarations relatives à la mise en œuvre d’une politique générale de souveraineté numérique se font entendre, qu’en est-il des actes concrets ? En quoi consiste-t-elle pour le gouvernement et quelles sont les priorités en 2023 ? Nous avons interrogé Bruno Le Maire, ministre de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique.

Alliancy. Tout d’abord, pouvez-vous nous indiquer en quoi consiste la souveraineté numérique de votre point de vue ?

2. Bruno Lemaire - ministère de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique

Bruno Le Maire – ministère de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique

Bruno Le Maire. Nous vivons aujourd’hui une révolution numérique où s’exerce la concurrence entre les acteurs privés mais également la compétition entre les États. Dans ce contexte, la « souveraineté numérique » consiste pour la France et pour l’Europe à conserver le contrôle de leur destin en affirmant leurs intérêts et leur leadership : qui maitrisera les technologies clefs ? Qui imposera ses normes ? Qui saura se protéger ? Je suis convaincu qu’il n’y a pas de souveraineté politique au 21e siècle sans souveraineté numérique. C’est un moment décisif. 

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Alliancy. Quelles sont les leviers utilisés pour protéger nos actifs numériques vitaux ?

Bruno Le Maire. Nous utilisons ces trois principaux leviers : l’innovation, la régulation, et la sécurisation. L’innovation, c’est notre capacité à soutenir et à financer l’émergence de champions technologiques, grâce par exemple à France 2030 (Un plan d’investissement de 54 milliards d’euros, NDLR) et à Scale Up Europe (Recommandations pour attirer les talents de la Tech, NDLR). La régulation, c’est notre volonté de définir et imposer nos propres règles à tous les acteurs du marché, comme nous l’avons fait avec le Digital Markets Act et le Digital Services Act (voir encadré). Et enfin, la sécurisation -qui est clef à l’heure de la guerre en Ukraine- et qui concerne notre engagement à accompagner les administrations, les collectivités territoriales et les entreprises face aux cyberattaques. Nous comptons pour cela nous appuyer sur nos leaders mondiaux, nos 150 pépites spécialisées dans la cybersécurité.

Alliancy. Quelles sont vos priorités pour 2023 ?

1.Bruno Lemaire - ministère de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numériqueBruno Le Maire. Nous avons fixé avec Jean-Noël Barrot, Ministre délégué chargé de la transition numérique, une feuille de route ambitieuse afin de renforcer ces leviers évoqués. À l’échelle française, nous consolidons notre filière « numérique souverain » avec la 5G et les objets connectés, le cloud, l’intelligence artificielle, le quantique et désormais les technologies immersives. Nous y consacrerons au total près de 4 milliards d’euros sur cinq ans. À l’échelle européenne, nous soutenons le programme législatif de la Commission, qui porte sur l’économie et les usages à l’ère numérique, avec un accent mis sur la protection de nos données les plus sensibles. Nous défendons le besoin d’une certification européenne de cloud, capable de faire face aux législations non-européennes.

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Le calendrier d’application du Digital Market Act…

calendrier d’application du Digital Market Act

 

 

 

 

 

 

 

… et du Digital Services Act

Digital Services Act

 

 

 

 

 

 

Texte officiel (Digital Services Act)