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Bertrand Delcambre, monsieur numérique du bâtiment

Fort de 35 années au Centre scientifique et technique du bâtiment, dont une vingtaine à s’intéresser particulièrement à l’apport des outils numériques, Bertrand Delcambre souhaite faire émerger de nouvelles pratiques. Son vecteur : le Plan de transition numérique du bâtiment qu’il préside.

Bertrand Delcambre, président du Plan de transition numérique du bâtiment

Plus vite. Moins cher. Mieux. C’est ce que rend possible le numérique dans le domaine de la construction et de la rénovation de logements. Bertrand Delcambre en a la conviction. Ce polytechnicien, diplômé de l’école des Pontset-Chaussées est, depuis le 2 janvier dernier, président du Plan de transition numérique du bâtiment (PTNB), l’une des trois briques du plan de relance de la construction lancé par le gouvernement. 

Le rôle de cet « ambassadeur du numérique » est vaste : orchestrer un comité de pilotage, rassemblant quatre ministères et quatorze organisations professionnelles, allant des architectes aux assureurs en passant par les bureaux d’études, les ingénieurs ou, encore, les industriels de la construction et, bien sûr, la Capeb (l’organisation professionnelle des artisans du bâtiment) et la Fédération française du bâtiment (FFB). Avec une mission : faire émerger les actions prioritaires afin que les acteurs du bâtiment prennent réellement possession des outils numériques. Le rapport qu’il a remis en décembre 2014 à la ministre du Logement Sylvia Pinel a, d’ores et déjà, brossé un état des lieux de l’utilisation du numérique dans ce secteur et d’émettre une série de propositions. 

Doté d’un budget de 20 millions d’euros, le PTNB doit permettre d’aller plus loin. Et surtout, de mettre en place des mesures concrètes. « La toute première priorité concerne l’organisation d’une communication la plus large possible, la plus percutante, pour donner envie à tous les acteurs de prendre en main le numérique », expose Bertrand Delcambre. Le premier semestre 2015 verra la mise en ligne d’un portail dans lequel de nombreux projets seront passés à la loupe et démontreront les bénéfices de la maquette numérique pour chacun des acteurs. « Nous allons nous appuyer sur des retours d’expériences, explique le président du PTNB. Nous allons rassembler tous les arguments pour convaincre que le numérique est accessible, et peut produire des résultats significatifs en diminuant les coûts, notamment. Et nous allons y mettre tout ce qui peut rassurer la maîtrise d’ouvrage publique. »

Au-delà d’une maquette numérique, c’est le building information modeling – connue sous l’acronyme BIM – que souhaite promouvoir l’ancien président du Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB). « Le BIM est un ensemble de processus de création et de gestion des données d’un projet », explique-t-il. Cette méthode repose sur le principe d’une utilisation partagée entre tous les acteurs d’un projet, d’une même base de données structurée : la maquette numérique. « Le BIM autorise le travail collaboratif des différents intervenants sur le projet qui peuvent, chacun en parallèle, l’enrichir et le compléter en ajoutant à la maquette numérique le résultat de leur travail spécifique », complète le polytechnicien. Des guides pour aider à intégrer les principes du recours au BIM dans les cahiers des charges des appels à projets, seront également produits dans le cadre de ce plan. « Beaucoup de désordres dans les constructions sont liés à l’interface entre les différents corps d’état, par manque de partage de l’information, souligne-t-il. Tout l’enjeu de ce travail collaboratif est de diminuer la sinistralité qui représente chaque année 10 % du chiffre d’affaires du secteur. »

Un nouveau dispositif de formation 

Mais comment passer d’une réalité où le numérique dans le bâtiment est affaire d’initiés à une situation où la majorité des acteurs maîtrisent ces outils… Et ce, d’ici à 2017, selon l’objectif que se fixe le PTNB. « La communication est un élément clé, mais ce n’est pas tout, répond Bertrand Delcambre. Nous allons lancer un groupe de travail sur la formation. » Première étape : établir un état des lieux plus précis que celui du rapport de 2014. Et identifier les initiatives déjà prises dans des sphères indépendantes les unes des autres mais toutes relatives au secteur de la construction. « Ces acteurs sont censés travailler ensemble, il est donc important de mettre en place un dispositif de formation qui tient compte de cette dimension collective », tient à préciser le Monsieur Numérique du bâtiment. Le PTNB envisage « d’utiliser le numérique pour faire le numérique », selon l’expression de Bertrand Delcambre. Une formule, de type Mooc (Massive open online course), sera expérimentée. « Nous verrons si cela accélère la montée en compétences des centaines de milliers de personnes, essentiellement dans des TPE ou des PME, qui sont parfois réticentes à se déplacer par manque de temps en particulier », ajoute-t-il.

Une veille active sur tous les outils

Le PTNB ne prévoit pas de subventionner l’équipement informatique des acteurs. « Par contre, des pistes seront étudiées pour l’accompagnement des TPE/PME telles que les platesformes de mutualisation de ressources dont le déploiement  sera encouragé », assure-t-il.

Au-delà de l’équipement informatique et de la maquette collaborative, le monde du numérique est pléthorique. Et évolue vite ! « Nous allons mettre en place une veille active sur tous les outils qui apparaissent qui pourrait être utile sur chantier », insiste le président. Objets connectés, imprimante 3D, drones équipés de scanner laser, équipement infrarouge… Que ce soit pour la rénovation ou la construction, tous ces outils sont-ils exploitables par les acteurs du bâtiment ? « Il va falloir faire le tri, mais aussi orienter les choses pour qu’elles conviennent aux besoins du secteur », souligne Bertrand Delcambre. Il imagine, par exemple, que l’imprimante 3D puisse servir à fabriquer directement sur chantier, un  élément de construction ou un raccord de plomberie manquant. « On pourrait ainsi être dépanné rapidement sans interrompre le chantier », pense-t-il. 

La liste des actions à mener est longue pour rattraper le Royaume-Uni notamment, qui a fixé à 2016 l’obligation d’utiliser la maquette numérique et le BIM dans les projets publics. Mais, fort de son expérience au CSTB, où il avait créé l’équipe de recherche sur le numérique dès le milieu des années 1980, Bertrand Delcambre n’est pas effrayé.

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