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[Chronique juridique] Contenus haineux et loi Avia : le camouflé du Conseil constitutionnel

[Chronique d’Eric Barbry]  L’objectif  de la loi Avia était louable : Mieux lutter contre la prolifération de contenus « haineux » sur internet, à savoir principalement l’apologie à la commission de certains crimes, la provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence raciale ou religieuse, ou à raison du sexe, de l’orientation sexuelle ou du handicap, la provocation directe à des actes de terrorisme ou d’apologie de ces actes,  la contestation d’un crime contre l’humanité, la négation, la minoration ou la banalisation d’un crime de génocide ou d’un crime contre l’humanité, le harcèlement sexuel, la transmission d’images pédophiles ou la diffusion d’un message à caractère pornographique susceptible d’être vu ou perçu par un mineur.

Mais les moyens pour y parvenir sont totalement à côté de la plaque…
Résultat, une décision de censure du Conseil constitutionnel comme on en voit rarement puisque sur les 9 articles phares de la loi, 7 sont considérés comme contraires à la Constitution et particulièrement à l’article 11 de la déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789 qui fixe les règles relatives à la liberté d’expression, rien de moins !

Ces moyens étaient au nombre de 3 : créer des obligations pour les « plateformes », accroître les pouvoirs de l’autorité administrative et positionner le CSA (Conseil supérieur de l’audiovisuel) comme l’autorité de contrôle d’internet.

Ces trois moyens ont été écartés par le Conseil constitutionnel.

Sur la création de nouvelles obligations pour les « plateformes » l’ambition était claire : Créer de toute pièce des obligations pour certaines de ces plateformes en ajoutant un article 6.2 à la loi pour la confiance dans l’économie numérique (LCEN).

Pour simplifier, les plateformes étaient tenues de réagir à n’importe quelle notification d’un contenu contrevenant « manifestement » aux infractions susvisées, sous 24h, en s’exposant, à défaut, à une sanction de 250.000€.

En résumé, le Conseil constitutionnel considère que :

Dans la foulée le conseil constitutionnel censure quasiment tout le reste de la loi :

Le Conseil considère également non conforme les dispositions de nature à renforcer les droits de l’autorité administrative vis-à-vis des éditeurs, des hébergeurs et des fournisseurs d‘accès.  Il faut dire qu’il leur était demandé de réagir dans un délai de … 1 heure, avec un risque de sanction de 1.250.000€ pour les personnes morales.

Que reste-t-il alors de la loi Avia ? Essentiellement deux articles : l’article 2 qui modifie de manière non substantielle la procédure de « notification hébergeur »  et l’article 6 qui, lui, fera sans doute réfléchir les hébergeurs puisque la sanction pour non-respect de la notification passe de 75.000€ à 250.000€, soit pour une personne morale de 375.000 à 1.250.000€.

Tout ça pour ça aurait-on envie de dire.

 

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