Alliancy

Pierre-Marie Argouarc’h (FDJ) « L’environnement numérique de travail doit permettre d’aller plus loin que la seule collaboration »

Pierre-Marie Argouarc’h est le Directeur de l’expérience collaborateur et de la transformation du groupe FDJ, qui intègre notamment les fonctions de DRH. Il détaille la posture proactive qu’il a adopté sur le sujet de l’environnement numérique de travail depuis plusieurs années et la répartition naturelle des rôles avec le DSI de l’entreprise.

Pour aller plus loin : Alliancy organise le 12/01 une émission qui aura pour thème : « Environnement de travail numérique : comment améliorer la coopération IT/RH ? ». 

Comment résumeriez-vous la philosophie de FDJ en matière d’environnement numérique de travail ?

Pierre-Marie Argouarc’h, le Directeur de l’expérience collaborateur et de la transformation du groupe FDJ

Pierre-Marie Argouarc’h. Notre orientation en matière de numérisation de l’entreprise, et donc des usages des collaborateurs, remonte à 2014. En tant que DRH, j’ai eu la chance d’être un des sponsors du projet « Numérique Interne ».Dès le départ, le sujet a donc été de promouvoir les usages des collaborateurs, plutôt que la technologie elle-même, qui est essentielle mais qui doit rester un moyen. En nous posant la question : « quels services numériques l’entreprise doit-elle vraiment fournir à ses salariés ? », nous avons évité de tomber dans le piège de la numérisation « pour la numérisation ».

Pour 2015, Stéphane Pallez, notre Présidente directrice générale, a pris la décision de doter tous nos collaborateurs d’un smartphone, y compris ceux dont le métier ne l’exigeait pas, a priori. En effet, l’environnement numérique de travail ne peut être en retard sur celui de la vie personnelle des collaborateurs. Cela a été une fondation pour l’avenir et a envoyé, à tous les collaborateurs du Groupe, un message fort sur notre philosophie, résolument « collaborateur centric ». En parallèle, nous avons négocié avec les syndicats un accord de droit à la déconnexion, signé à l’unanimité en 2016, qui a permis de garantir l’équilibre vie privée – vie professionnelle. Avec le smartphone comme point de départ, nous avons pu numériser plus facilement l’environnement de travail : réseau social interne, dématérialisation du contrat de travail et des bulletins de salaire, digitalisation des courriers de la DRH, coffre-fort numérique individuel et utilisable pour les documents privés du collaborateur s’il le souhaite (carte d’identité, facture d’électricité…) …

Qu’a changé la crise en 2020 ?

Pierre-Marie Argouarc’h. Elle a permis de montrer encore plus à quel point le digital pouvait permettre à l’entreprise d’apporter une aide concrète pour faciliter la vie des collaborateurs. Nous avons pu, par exemple, proposer très rapidement des rendez-vous médicaux digitalisés à partir de l’environnement de travail, avec ordonnance imprimable sur l’ordinateur professionnel. Un autre exemple est notre partenariat avec Wittyfit, une start-up qui facilite les micro-enquêtes individualisées au quotidien, afin d’être au plus près du ressenti du collaborateur et de son état d’esprit.

Comment définir « l’expérience collaborateur » recherchée de manière générale ?

Pierre-Marie Argouarc’h. L’expérience collaborateur ne doit pas se limiter au seul cœur de métier. Dans notre cas, il fallait que le nouvel environnement numérique de travail aille notamment jusque dans les entrepôts, changer le quotidien des préparateurs de commandes. Grâce au smartphone, ceux-ci peuvent accéder à toutes les informations de l’entreprise, mais aussi aux applications RH : la gestion des congés payés, les demandes de validation… L’idée est d’apporter une souplesse très importante aussi bien pour le collaborateur que pour le manager. L’objectif est double : développer à la fois la performance de l’organisation et la qualité de vie au travail de toutes et tous.

A quoi l’environnement de travail numérique ne permet-il pas de répondre en termes de besoins ?

Pierre-Marie Argouarc’h. Notre philosophie est très arrêtée sur le sujet du travail à distance, avec un accord de télétravail de deux jours par semaine depuis 2019, puisque nos études montrent qu’au-delà, le lien social professionnel se perd. L’enseignement de la crise avec presque 100% de télétravail obligatoire, démontre qu’il y a beaucoup de choses extraordinaires qui peuvent être faites avec un environnement de travail numérique et que l’ensemble fonctionne.  Suite à cela, les derniers métiers qui n’étaient pas adeptes du télétravail, notamment par crainte d’une perte de productivité, ont désormais changé d’avis.  Néanmoins, nous croyons à la force, la créativité et l’intelligence du collectif, qui ne peuvent s’exprimer pleinement qu’en présentiel. Ainsi, il est donc essentiel de prendre le meilleur des deux mondes et de ne pas les jouer l’un contre l’autre. L’enjeu est de trouver l’équilibre.

Avez-vous des attentes particulières vis-à-vis des outils logiciels disponibles sur le marché ?

Pierre-Marie Argouarc’h. Nous savons qu’ils ne remplaceront jamais totalement la richesse apportée par les modes d’échanges présentiels. Cependant, je pense que dans les années à venir, il va y avoir de plus en plus de surprises : il suffit de voir tout ce qui a changé durant la dernière décennie, en termes d’ergonomie, de fluidité, d’expérience utilisateur et de transparence… Les outils doivent aujourd’hui permettre d’aller plus loin, en apportant des services étendus. Par exemple, en 2019, nous avons lancé le service « FDJ Group for Me », en partenariat avec une société d’assurance, pour proposer aide et assistance à nos salariés : accompagnement psychologique, assistance sociale…

Cela a un effet logique sur le taux d’engagement des collaborateurs, déjà très élevé, et qui a pourtant progressé de 5 points dans notre dernière enquête de juin 2020, avec 92 % de satisfaction. L’étude portait aussi bien sur la satisfaction en termes de qualité de vie, que de la gestion de la crise sanitaire voire même de l’efficacité de l’offre numérique interne. L’environnement de travail numérique va donc bien au-delà de l’ordinateur.

Comment avez-vous abordé l’ensemble de ces sujets avec la DSI ?

Pierre-Marie Argouarc’h. En charge du sujet « Numérique Interne », j’ai eu de nombreux échanges avec le DSI qui avait la responsabilité des outils, de leur acquisition et de leur déploiement. Nous avons vite convergés sur le fait que les ressources de la DSI devaient être entièrement focalisées sur le développement des jeux et de leur commercialisation sur notre plateforme. Il est apparu que le SI numérique interne avait toute sa place au sein d’une direction dont l’objectif est de mettre chaque collaborateur dans les meilleures conditions de performance opérationnelles et de qualité de vie au travail, que ce soit en présentiel ou à distance. En 2018, j’ai donc récupéré sous ma responsabilité la partie de la DSI tournée vers les collaborateurs.

En ce sens, j’ai pris le titre de Directeur expérience collaborateur et transformation, puisque je ne porte pas seulement le domaine RH traditionnel, mais aussi l’équipement digital du collaborateur et l’environnement de travail au sens physique et immobilier. Cela permet d’avoir une vision globale du parcours collaborateur, à la fois digital et physique. Dans ce cadre, je dois faire travailler des équipes RH et des équipes IT, avec une fluidité et une synergie suffisante pour offrir un service global au collaborateur, depuis son recrutement jusqu’à sa vie quotidienne dans nos locaux ou à distance. Cela a vraiment fait la différence pendant la gestion de la crise du confinement. L’avenir de la fonction RH est bien de combiner les services généraux, l’environnement de travail numérique, l’informatisation du collaborateur… Et d’y trouver des synergies nouvelles et insoupçonnées. Ce sont là les conditions à réunir pour que les fonctions RH et Transformation deviennent véritablement des « Human et Business Partners » de l’entreprise.

Quitter la version mobile