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Un chatbot n’est pas si simple !

Depuis fin 2017, Botfuel propose un kit de développement de chatbots en open source pour permettre aux développeurs de construire facilement ces agents conversationnels. En jeu : la compréhension correcte des intentions de l’interlocuteur, qui en exprime souvent plusieurs dans une même phrase.

| Cet article fait partie du dossier « Industrie : Des robots, mais pas seulement »

Yan Georget (polytechnicien, docteur en IA) et Javier Gonzalez (HEC), les cofondateurs de Botfuel. Auparavant, tous deux ont œuvré dans d’autres entreprises de la fintech, de la logistique urbaine, du marketing digital et des grands groupes.

Les deux fondateurs de Botfuel en 2016, Yan Georget et Javier Gonzalez, sont d’accord : « Le web va vivre une deuxième transformation avec la montée en puissance des réseaux sociaux sur lesquels on passe de plus en plus de temps… La voix devient le nouveau canal de communication et cela va durer car l’interface conversationnelle est la plus dématérialisée. Il n’y a besoin d’aucun apprentissage ! »

Tous les services sont de plus disponibles dans le cloud, on n’a pas à télécharger une quelconque application : « Il n’y a qu’à voir ce dont disposent les jeunes sur leurs portables, ce ne sont plus que des plates-formes conversationnelles ».

Ceci a eu un impact négatif : beaucoup de sociétés se sont engouffrées dans ce créneau et, par exemple, plus de 100 000 chatbots ont été développé sur Messenger, dont 90 % sont inutilisés aujourd’hui.

« Dès que vous sortez du parcours imaginé, vous n’avez plus aucune réponse. Ce qui est extrêmement déceptif », expliquent-ils de concert. Ils étaient trop simples.

2017 aura ainsi été l’année d’expérimentation des chatbots, selon eux. 2018 sera celle de la phase d’industrialisation, avec des cas d’usages bien mieux adaptés à leur potentiel. « On ne peut pas tout faire avec cette technologie. Et, si on peut faire des choses, il faut y consacrer de l’énergie, du temps et de l’argent ! ». C’est dit.

Ce « nouveau canal » pour communiquer trouve deux grands cas d’usages : la transaction (commander une pizza, un taxi, une voiture… ou déclarer un sinistre). Botfuel est, par exemple derrière le chatbot de BlaBlacar pour réserver une voiture ou, encore, ceux de La Poste (sur les tarifs professionnels) et de la FDJ. « Le chatbot guide en direct l’interlocuteur et lui permet de naviguer dans un catalogue complexe de produits. Il est là pour vous simplifier la vie ».

Le deuxième cas où le chatbot est très usité également est le « support client », qui peut être plus ou moins compliqué. « Dans ce cas, le chatbot vous pose des questions. On le fait par exemple pour Banque Casino, dont il répond à 30 % des requêtes ainsi. »

Mais, les deux fondateurs insistent : « Le chatbot ne remplace pas l’humain ! Il ne comprend que les questions simples auxquelles il donne une réponse rapide. Toutes les tâches à valeur ajoutées doivent encore être assurées par des hommes. »

Un tel process nécessite quelques mois de mise en œuvre et de test si on ne veut pas se tromper… « Beaucoup d’entreprises veulent fournir un très bon service client, mais ne s’en donnent pas toujours les moyens. Un tel projet nécessite de bien penser l’interaction entre l’homme et la machine, car parfois, il y a un vrai intérêt à pousser le client à entrer en contact avec une personne ».

L’outil que propose Botfuel est en place depuis la mi-2016. « Une partie de notre solution est en open source (Botfuel Dialog), l’autre c’est du SaaS, que l’on pense plus pratique. Nous voulons créer une communauté autour de notre technologie », précisent-ils. Leur solution permet de développer des chatbots pour des plates-formes telles Facebook Messenger, Slack, Skype, Twitter ou Telegram.

Aujourd’hui, miser sur le conversationnel ne suffit pas. « Il faut aussi gérer le dialogue pour que la relation entre humain et chatbot ressemble de plus en plus à une conversation humaine. La personne doit pouvoir changer d’avis par exemple (si elle configure un voyage, une heure de départ) et il faut réagir aux intentions multiples exprimées dans une même phrase… Trop souvent, on est dans un parcours où le client est bloqué ou insatisfait. C’est vraiment sur ces points que nous avons travaillés ».

Depuis deux ans, Botfuel travaille pour deux types de clients : ceux en direct qui veulent du clé en main et les autres, dans le monde entier, qui se connectent à sa plate-forme open source et l’utilisent.

« En 2018, on veut notamment développer les partenariats avec de grands cabinets de conseil ou des SSII qui vont pouvoir développer des chatbots, à partir de notre technologie, pour leurs clients. Il y a une attente très forte sur ce sujet, car peu de plates-formes répondent aux attentes dans ce domaine. »

Le concurrent de Botfuel est tout simplement… Microsoft. « Nous sommes tout petits, mais aussi très agiles. On peut aller très loin avec nos clients en termes de développement et de formation », précisent-ils. Nous sommes un des rares petits éditeurs de logiciels dans ce secteur à développer toute la technologie. »

Aujourd’hui, les métiers se réapproprient les chatbots, qui entrent du coup dans les cycles de développement plus traditionnels des entreprises. « Nos contact sont aujourd’hui les métiers et les DSI qui cherchent des solutions industrialisables. Elles ne veulent surtout pas de gadget ». Les références de la start-up sont un gage : « La FDJ parle de notre solution dans son rapport annuel ».

Pour prouver la pertinence d’un chatbot, le POC reste incontournable selon eux. « La bonne démarche est de choisir un « use case » étroit et simple, et d’aller de A à Z dans ce use case. Ensuite, on va plus loin, on l’améliore peu à peu via la demande que l’on repère chez les utilisateurs. Il faut adopter la méthode agile. Il ne faut surtout pas que ce soit déceptif au début. Mais cela veut dire y consacrer du temps et bien penser au design ».

Objectif : passer de la start-up à la scale-up

Concernant l’évolution de leur entreprise, les deux dirigeants se montrent optimistes, notamment concernant leurs relations avec les grands groupes. « Ils sont de plus en plus ouverts à l’innovation. » Sortis de Polytechnique et d’HEC, l’aspect réseau joue également beaucoup : « Pour y avoir travaillé, on connait également beaucoup de grands groupes. Surtout, on maîtrise leur fonctionnement. »

Alors, à la question de ce qu’ils pensent du rachat récent de Recast.AI par l’éditeur allemand SAP, ils répondent sans hésitation : « Cela prouve qu’il est difficile de passer à l’échelle. Le grand groupe a racheté une équipe constituée et une techno… C’est une bonne nouvelle dans le sens où cela montre l’intérêt des grands pour les chatbots et un de nos concurrents disparaît… Mais il y a aussi beaucoup de destruction de valeur dans ce type de rachat. »

Ce qui est le plus difficile, reconnaissent-ils toutefois, est de passer de la start-up à la scale-up. « Il y a beaucoup de concurrence. Il faut être résilient. On n’en est pas à notre première start-up et rien n’est jamais simple… Mais les difficultés, on va les résoudre. Et c’est vraiment cela que l’on vise, devenir une scale-up ».

Quelques chiffres

 D’ici à cinq ans, 80 % des applications mobiles n’existeront plus. Elles seront remplacées par des messageries instantanées, avec une part belle pour les conversations automatisées, puisque les chatbots représenteront 40 % des interactions mobiles d’ici à 2020. Sur les quatre prochaines années, le marché des chatbots affichera une croissance de 37 %, pour atteindre 994,4 millions de dollars en 2024. Infographie Conversationnel

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