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La France se veut leader en santé numérique

Vendredi dernier, Emmanuel Macron était à l’hôpital Necker à Paris, pour annoncer le lancement d’un projet stratégique de campus, public/privé, sur le site du Val-de-Grâce. Objectif : structurer une filière de santé numérique de rang mondial d’ici à 2028.

PariSanteCampus---photo-Inria

PariSantéCampus s’installera dans l’ex-hôpital d’instruction des armées du Val-de-Grâce, proche des grandes universités, hôpitaux, centres de recherche et incubateurs de start-up. Ses travaux devraient porter notamment sur les bio-productions, notamment les thérapies géniques et les nouveaux vaccins à ARN actuellement en pointe de la lutte contre la Covid-19.

La souveraineté industrielle de la France a été largement mise à mal ces dernières années… Les chiffres de Trendeo, observatoire de l’emploi et de l’investissement, le prouve hélas régulièrement. L’Etat en est conscient et tente, par diverses actions et programmes à court-terme, de renverser la tendance… L’impact est faible. C’est pour cela qu’Emmanuel Macron avait souhaité, en juin dernier, devant des chercheurs de l’Institut Pasteur et de l’Inserm, vouloir « retrouver le sens du temps long et de la stratégie industrielle ». C’est aujourd’hui chose faite en matière de santé.

Accompagné des ministres de l’enseignement supérieur, de la Recherche et de l’innovation, Frédérique Vidal, et des solidarités et de la Santé, Olivier Véran, le chef de l’Etat a présenté, vendredi dernier, avec l’IHU Imagine (Institut des maladies génétiques), au sein de l’hôpital Necker à Paris, « sa vision sur la recherche et l’innovation en santé pour les prochaines années. »

Emmanuel Macron a notamment annoncé la création du « PariSanté Campus », dédié à la santé et au numérique, sur le site de l’ancien hôpital d’instruction des armées du Val-de-Grâce. Soit un espace de 73 000 mètres carrés (géré par un concessionnaire) qui seraient partagés entre acteurs publics et privés d’ici à 2028. Le tout pour un financement bipartite de près de 400 millions d’euros, dont 45 proviennent d’ores et déjà du plan de relance post-Covid du gouvernement et 180 millions sont issus de la loi de programmation de la recherche. 

Ce campus mutualisera les compétences et les expertises, et mettra à disposition de la communauté bases de données et équipements. PariSanté Campus accueillera également un centre international de conférence permettant aux chercheurs du monde entier de se rencontrer et de partager les résultats de leurs recherches. Un hôtel d’entreprises et un incubateur de start-up abriteront des entreprises souhaitant bénéficier d’un tel environnement. Rassemblant acteurs publics et partenaires privés, ce campus permettra de répondre aux besoins de l’ensemble des acteurs de la filière santé, comme l’appui au développement de projets entrepreneuriaux, la formation, la mise à disposition d’outils en faveur de l’innovation et de l’expérimentation.

PariSantéCampus, pour un modèle « européen » de la santé numérique, à condition de :

  1. Récolter des données, les rendre accessibles et exploitables dans le sens des préconisations du rapport de l’OMS (WHO Global Strategy on digital health 2020-2024).
  2. Structurer une filière industrielle française des technologies numériques de la santé, dans la lignée des recommandations de la Fédération européenne des académies de médecine et du rapport intitulé Artificial intelligence in healthcare : is Europe ready ?
  3. Protéger les données des citoyens et encadrer leur utilisation.

Dès l’année prochaine, un site provisoire pourrait accueillir des premières équipes de recherche et quelques start-up. Et, d’ici à cinq ans, le campus serait élargi à des chercheurs de l’Inserm, d’Inria, de l’université PSL (Paris Sciences et Lettres), de l’AP-HP (Assistance publique-hôpitaux de Paris), de même que l’Agence française du Numérique du ministère de la Santé, le Health Data Hub (plateforme française de données de santé utilisant l’intelligence artificielle), Sanofi, Dassault Systèmes, France Biotech et autres start-up…

Après la crise sanitaire que nous traversons, il est en effet pertinent de disposer et de pouvoir utiliser toutes les données de santé des Français en vue d’améliorer d’une part l’état général de la population, mais également le pilotage et le coût de notre système de santé. « Nous avons une recherche pluridisciplinaire excellente, mais il faut structurer les coopérations entre secteurs public et privé, avec entre les deux, comme tuyauterie, les données de santé », indique-t-on au ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche.

De son côté, Bruno Sportisse, PDG d’Inria, précise dans un communiqué que « l’émergence ou la résurgence de maladies infectieuses capables de bouleverser les équilibres économiques, sociaux et politiques mondiaux, l’augmentation du nombre de patients atteints d’une affection chronique n’appellent pas seulement une évolution du monde du soin et de la santé ; elles constituent, encore plus depuis la crise de la Covid-19, une priorité de toute politique publique. »

L’espace numérique de santé : un projet pour 2022

La mise en place effective de l’« espace numérique de santé » sera l’un des projets phares du campus. Il s’agit du compte personnel en ligne permettant à chaque Français d’accéder notamment à son dossier médical partagé/DMP (ou carnet de santé numérique), à des applications et autres informations de santé. Cet espace numérique devra aussi permettre à l’usager de fournir divers renseignements sur une personne de confiance, des données relatives au don d’organe, voire des constantes de santé produites par des applications grand public (rythme cardiaque, activité physique…). Opérationnelle en 2022, cette application doit permettre de disposer également d’un agenda unifié de tous les rendez-vous médicaux du patient… Ce qui permettra ensuite d’accéder aux données relatives au remboursement de ses dépenses de santé, grâce à l’intégration du service Ameli.fr.

D’ici à cinq ans, PariSantéCampus vise à devenir le principal hub d’innovation et de recherche sur le numérique dans la santé. Le temps presse en effet : « Nous avons moins de cinq ans pour prendre une position sérieuse car sinon nous aurons perdu les données, ce sera trop tard », a averti Bernard Charlès, directeur général de Dassault Systèmes, leader mondial des logiciels de santé, appelant de tous ses voeux une plateforme européenne. « Je tire le signal d’alarme sur la lenteur de ces décisions, a-t-il ajouté. Il n’est pas acceptable que ce soit les plateformes américaines qui soient utilisées pour des données souveraines ».

L’exemple du rôle-clé du numérique dans la santé a d’ailleurs été rappelé par Gilles Bloch, président de l’Inserm : « Une intelligence artificielle de Google a réalisé la semaine dernière une percée majeure en biologie fondamentale, permettant de passer de la séquence primaire, c’est-à-dire l’enchaînement des acides nucléiques dans une protéine, à la fonction. L’IA a résolu un mystère que tous les biologistes avaient devant eux depuis cinquante ans. Mais, une IA de Google, malheureusement ». Mais de conclure : « Avoir dans ce lieu plus de numérique à notre disposition sera un élan formidable pour accélérer la diffusion de cette technologie. Cela va nous permettre de faire des découvertes importantes dans les maladies infectieuses, mentales ou chroniques ».

La création d’une nouvelle agence de recherche sur les maladies infectieuses, qui devrait voir le jour dès janvier 2021, n’a toutefois pas été évoquée par Emmanuel Macron lors de ce déplacement. Cette structure vise à mieux coordonner la recherche sur les crises sanitaires liées aux maladies infectieuses émergentes (virus chikungunya, Ebola, Covid-19…).

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