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Au Medef, les dirigeants invités à complètement changer leur perspective sur les processus d’entreprise

Le Comité d’orientation stratégique de France Processus a présenté au Medef le jeudi 22 juin, le premier manifeste de l’association, pour changer le regard des dirigeants sur les processus.

Jean-Claude Lamoureux, Directeur Exécutif de Sopra Steria Next

Jean-Claude Lamoureux, Directeur Exécutif de Sopra Steria Next et président du Comité d’orientation stratégique de France Processus

Le Comité d’orientation stratégique de France Processus a présenté au Medef le jeudi 22 juin, le premier manifeste de l’association, née en 2021. Objectif : convaincre les dirigeants d’entreprise de changer leur vision des processus dans leur entreprise, pour développer des approches stratégiques et d’écosystème permettant de relever les grands défis économiques, sociaux et écologiques de notre société. Jean-Claude Lamoureux, président du comité, explique l’intérêt de la démarche pour des organisations en transformation dans un monde incertain.

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Alliancy. Qu’est-ce que France Processus ?

Jean-Claude Lamoureux. France Processus est une association née en 2021 de la fusion du Club des Pilotes de Processus et de l’association ProcessWay. Sa vocation est de promouvoir la démarche Processus (qui consiste à structurer son système de management autour des processus métiers, pour standardiser l’organisation du travail, NDLR). L’objectif est de sensibiliser, de professionnaliser et de proposer des formations délivrées par l’Afnor. L’association compte 250 organisations adhérentes et anime une communauté de plus de 1000 praticiens. En son sein, le Comité d’orientation stratégique vise à se projeter vers l’avenir en s’appuyant sur la participation de personnalités issues de parcours et de métiers très différents. Nous pouvons par exemple compter sur Luc Bretones (NextGen), Frédérique Jeske (ancienne directrice de la Ligue contre le Cancer et présidente de Senior4Good), Eddie Soulier (professeur à l’Université de Technologie de Troyes), Michel Morvan (spécialiste de la modélisation des systèmes complexes et co-fondateur de CosmoTech)… L’ambition est de pouvoir, à partir de ces perspectives, s’adresser clairement aux dirigeants eux-mêmes, plutôt qu’aux opérationnels et aux consultants déjà familiarisés avec la démarche Processus.

L’objectif annoncé de l’association est d’encourager les directions générales à « manager par les processus » et à « piloter les processus ». Pourquoi ?

Pour les entreprises, la donne est à l’augmentation des risques, de l’incertitude et de la complexité de leur environnement. Prendre de bonnes décisions stratégiques et les répercuter sur l’exécution opérationnelle est toujours plus difficile. Elles essayent donc de devenir agile mais se retrouvent à devoir traiter en même temps de nombreux sujets qui sont eux-mêmes complexes : transformation de leur activité avec le numérique, protection de l’environnement, inclusion…

Les processus apportent des réponses parce qu’ils permettent de développer de la transversalité dans les organisations, tout en offrant des clés pour mobiliser leurs écosystèmes. Toutefois, en tirer toute l’efficacité n’est possible que si les directeurs généraux s’emparent de ces démarches et les sponsorisent directement. C’est le seul moyen pour ne pas rester limité aux frontières traditionnelles de l’entreprise, pour à la fois mieux réguler la relation avec tout l’écosystème et assurer que l’on délivre sa promesse à ses clients. Ce n’est pas en se contentant d’approche SLA classique que l’on pilote par exemple des travaux complexes avec de multiples partenaires, d’autant plus avec le numérique.

Les dirigeants n’en ont souvent pas conscience, car la démarche Processus porte une image un peu ancienne, associée dans l’imaginaire au monde « stable » du XXe siècle : elle est plutôt vu comme un facteur de standardisation et de massification, pas d’agilité. Pourtant, les « agilistes » d’aujourd’hui reviennent sur les mêmes sujets de travail avec leurs principes de « flow ». C’est révélateur : pour prendre en compte la nouvelle donne, on n’a pas d’autres outils aussi profonds que les processus. Ce sont eux qui vont permettre l’alignement entre la vision stratégique et l’exécution.

La rédaction de votre manifeste sur le sujet est donc une étape pour mieux parler aux dirigeants ?

Il nous a semblé important de poser les grands principes structurants de cette réflexion, de manière accessible, en moins de quatre pages. Ce manifeste est une synthèse des recommandations et des principes clés que toute entreprise doit embarquer aujourd’hui selon nous. Il reprend des sujets qui ne sont pas assez pris en compte dans la transformation des entreprises, pour laquelle l’articulation entre vision stratégique et exécution manque souvent. Les 25 principes présentés donneront lieu à des travaux complémentaires, pour aller plus en profondeur sur chaque sujet. Il y aura également un « retrofit » des approches Processus qui ont pu déjà être mises en place par certaines organisations, pour mieux correspondre aux grands défis actuels. C’est l’occasion également de faire un focus sur un sujet comme les nouvelles coopérations entre acteurs en écosystème, qui n’avait pas été mis en avant jusque-là.

Qu’attendez-vous des échanges au Medef ?  

Entrer en communication avec les dirigeants est un point de départ. Il s’agit d’initier un dialogue, un développement de la notoriété sur ces thèmes auprès d’eux. Cette présentation du manifeste est donc le début du voyage : nous allons à partir de là multiplier les actions, avec des petits-déjeuners d’échange entre dirigeants, la publication d’articles de fond qui viendront décliner certains aspects de ce manifeste. Je veux également mener un travail auprès des éditeurs de logiciels qui se retrouvent au cœur de ces sujets, comme ServiceNow par exemple. Ce que l’on propose, c’est de complètement changer la perspective sur les processus. De prendre le sujet par le haut en mettant sur la table la question des dépendances ou encore des sujets complexes comme les cycles de vie des produits.

Cette discussion et ces contenus permettront de faire comprendre aux dirigeants qu’il n’y a pas obligatoirement une opposition entre des définitions de processus venant par le haut, et la nécessité actuelle d’engagement et d’autonomie des collaborateurs, que les entreprises cherchent à mettre en œuvre. Un travail de définition de « macro-processus » doit permettre de trouver cet équilibre. Mais pour le dirigeant, cela implique un certain lâcher-prise, vis-à-vis du risque notamment. Quand Pascal Demurger (directeur général de la MAIF, NDLR) évoque que dans son entreprise il n’y a pas de script pour la relation client, mais des règles du jeu sur la relation client, il touche exactement à ces sujets, qui sont un vrai enjeu de confiance.

Ces réglages ne sont pas immédiats pour une organisation et ils demandent une implication directe des membres de la direction, qui doivent se réapproprier la notion de processus. Mais quand on décortique le côté systémique de ces questionnements, on se rend compte que derrière tout cela, ce qui est interrogé, c’est le partage du sens au travail. Quand les entreprises veulent mettre « l’humain au centre », elles se retrouvent vite confrontées aux questions de l’évaluation du travail, du système de pilotage de l’activité globale et de l’action de chacun… Autrement dit, si un dirigeant veut être crédible et éviter le « purpose washing », il doit se reposer la question des processus différemment.

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