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Société générale expérimente tous azimuts

En 2017, Frédéric Oudéa, directeur général de Société générale, s’est beaucoup exprimé sur l’avenir de la banque face aux nouvelles technologies. Les évolutions en cours du comportement des usagers transforment les services bancaires, imposant aux acteurs du secteur de revoir leur business model.

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Frédéric Oudéa, directeur général de Société générale

« La banque de détail a pour clients les particuliers, mais aussi les entreprises. Celles-ci lui fournissent au moins 50 % de ses revenus, un point important quand on aborde les nouvelles technologies », prévient d’entrée Frédéric Oudéa, CEO de Société générale, lors de son intervention sur le Paris Fintech Forum. Le groupe fournit, en effet, une diversité considérable de services et les problématiques de transformation varient en fonction de chaque catégorie de clients.

Dans le B to B (PME structurées, ETI et grandes entreprises), où les contraintes deviennent extrêmement fortes en matière de connaissance client (know your customer/KYC), « il s’agit plutôt d’une modernisation des processus que d’une rupture dans le modèle relationnel », explique le dirigeant. Les investissements sont donc destinés à fluidifier les services, les rendre plus efficaces, en temps réel, moins coûteux, etc. Pour lui, les exigences réglementaires ne pourront être gérées à des coûts satisfaisants que grâce à la technologie.

Ainsi, en matière de trade finance, Société générale expérimente-t-elle la technologie numérique du distributed ledger (grand livre distribué) pour effectuer des transactions avec d’autres banques. « Plus qu’à une technologie de cryptage décentralisée de type bitcoin, avance-t-il, je crois davantage à une technologie où le cryptage et la sécurité ne sont pas assurés nécessairement par une infrastructure centrale, mais, de manière discrétionnaire, par un réseau d’institutions telles que des banques ou des notaires. Cette technologie ne sera pas applicable avant longtemps à de très gros flux de type marché boursier ou flux de paiements mondiaux. »

L’enjeu de la gestion des données dans le B to C

Le cœur de l’innovation doit partir des métiers et des besoins des clients. Avec les nouveaux usages liés à Internet et aux applications sur leur mobile, les particuliers n’ont plus besoin de se rendre en agence. « Nous compterons donc beaucoup moins d’agences et de back-office dans le futur, prévient-il. Cette réduction, négociée avec les syndicats, s’effectuera sur cinq ans. » Certains services, comme les outils de gestion des finances personnelles (PFM), qui ont pu être mal rendus par la banque avec les technologies existantes, peuvent être fournis par les Fintech et, afin de satisfaire au mieux nos clients, « nous pouvons être amenés à distribuer des produits ne provenant pas de l’interne si une Fintech propose un meilleur service », admet le dirigeant. 

Ce foisonnement de nouvelles technologies offre de réelles opportunités inimaginables dix ans auparavant, comme dans la gestion des données. Ces dernières deviennent un enjeu essentiel, en raison de leur utilisation par de nouveaux acteurs peu ou moins régulés que les banques, notamment avec l’entrée en vigueur de la deuxième directive sur les paiements (DSP 2). « On confond d’ailleurs trop souvent banque avec paiements alors qu’ils ne représentent qu’une toute petite partie du service bancaire », confirme Frédéric Oudéa, pour qui le vrai sujet reste la rentabilité.

Les petits paiements rapportent très peu, aujourd’hui, et deviendront gratuits à terme. Ils sont un appendice naturel pour les Gafa (Google, Apple, Facebook, Amazon), pour lesquels le « one click » gratuit fait partie du business model. Leur objectif n’est pas de grappiller 1 à 2 centime(s) d’euros par paiement, mais de conquérir des données. De la même façon, dans la chaîne de valeur bancaire, en B to C, beaucoup de choses seront gratuites parce qu’elles serviront d’autres objectifs qu’un rendement immédiat. Enfin, poursuit le dirigeant : « Même s’il faut être extrêmement prudent, je ne vois pas l’intérêt pour les Gafa, aujourd’hui, d’aller dans un domaine bancaire, infiniment moins rentable que tout ce qu’ils peuvent faire ailleurs, et où ils sont peu régulés en dehors de la protection des données personnelles. »

Toutefois, avec cette volonté affichée d’une banque « customer centric », « le groupe expérimente tous azimuts dans une logique de collaboration ouverte avec des partenaires français et internationaux », souligne Frédéric Oudéa. Outre des voyages organisés à l’étranger pour explorer et développer de nouvelles coopérations, des expérimentations sont réalisées en s’appuyant sur les start-up internes (trois projets sont en cours au sein du nouveau site Les Dunes à Fontenay-sous-Bois) et sur les milliers d’informaticiens du groupe, notamment à Bangalore (Inde) où, se réjouit-il, « nous disposons d’une réserve de talents formidable », mais aussi en collaborant avec des Fintech.

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Détecter les Fintech prometteuses 

Là, pas de recette miracle ! « Il faut mettre en place tout ce qui peut aider à gagner du temps, à détecter les Fintech prometteuses et à prendre des parts de marché. » Cela passe par des acquisitions, des financements, des investissements dans des fonds tels que Partech Ventures, 360 Capital Parners, Daphni ou, plus récemment, dans Paris-Saclay Seed Fund, nouveau fonds d’amorçage dédié aux start-up des étudiants, jeunes diplômés et chercheurs de l’université Paris-Saclay et de ses membres.

« Notre responsabilité est de gérer socialement ces transformations de manière responsable et d’anticiper. » Frédéric Oudéa, directeur général de la banque

A l’international, notamment en Afrique, la Société générale est présente dans plusieurs pays et dispose d’un réseau de 11 000 personnes et d’environ 1 000 agences (contre 3 000 en France). Le B to C ne va pas y évoluer de la même façon : le nombre de personnes bancarisées et la capacité à épargner y sont encore faibles. Il faut d’abord assurer les paiements, avec des problèmes de sécurité et des lois contraignantes, d’où l’usage des téléphones mobiles par exemple, comme moyen de paiement. « Nous avons décidé de lancer une banque alternative sur ce continent afin de répondre à des besoins différents d’autres clients que ceux de la banque traditionnelle. C’est la raison pour laquelle nous avons investi 1 million d‘euros (8 % du capital) dans TagPay*, afin de lui permettre de nous accompagner et de gagner du temps en nous intéressant à une technologie différente », précise-t-il.

De nombreux processus bancaires pourront être gérés via des systèmes automatisés qui apprendront d’eux-mêmes. « Notre responsabilité est de gérer socialement ces transformations de manière responsable et d’anticiper. Cela signifie des efforts gigantesques en termes de formation – car il va falloir faire monter les compétences – et de mobilité. »

Des dizaines de milliers de personnes sont concernées. Cependant, il va se passer encore un peu de temps avant que tous utilisent ces systèmes experts et soient convaincus qu’ils apportent la réponse optimale. Beaucoup de gens utilisent des chèques en France, par exemple. Et puis, certaines choses comme la fiscalité peuvent beaucoup changer de manière régulière et ne seront pas totalement mises dans les systèmes. «L’ensemble des besoins pourront-ils être satisfaits par des machines capables d’anticiper et  de reproduire le passé ? Je reste confiant sur le fait qu’un certain nombre d’entre eux, notamment le diagnostic en matière d’épargne, exigera un contact incarné. L’évolution se fera lentement et nous laissera la possibilité de nous adapter », conclut-il.

Groupe Société générale

  • Banque universelle opérant dans la banque de détail, en France (numéro 3) et en Europe de l’Est essentiellement, et dans la banque de financement ;
  • Le groupe emploie plus de 145 000 collaborateurs, présents dans 66 pays, et accompagne au quotidien 31 millions de clients dans le monde entier.
  • Son champ d’activité s’étend sur trois métiers : la banque de détail en France (le tiers des revenus) avec les enseignes Société générale, Crédit du Nord et Boursorama; la banque de détail à l’international, l’assurance et les services financiers internationaux aux entreprises (près de 30 %) et la banque de financement et d’investissement.
  • Boursorama vient de passer le cap du million de clients. La banque en ligne table sur les 2 millions d’ici à 2020 et 8 millions à terme.

* La start-up française TagPay est l’une des seules Fintech spécialisées dans la banque digitale mobile à adresser les téléphones mobiles de base qui représentent encore la majorité du stock dans les pays émergents. Munie d’une technologie de paiement mobile et d’authentification forte, elle capitalise sur l’universalité du son (NSDT).

Cet article est extrait du  magazine Alliancy n°17  » Où en est l’IA dans l’entreprise » à commander sur le site.

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