À l’European Cyber Week, le programme Cyber Singuliers a été officiellement lancé pour accompagner l’entrée dans l’emploi d’étudiants neuro-atypiques dans la cybersécurité. Sabrina Menasria, fondatrice de Singularité Talents et partenaire du dispositif, ainsi qu’Hélène Chinal, vice-présidente des enjeux sociaux au Pôle d’excellence cyber, détaillent les objectifs du programme, son fonctionnement et les raisons pour lesquelles ces profils sont particulièrement adaptés aux métiers du cyber.
En quoi consiste le programme Cyber Singuliers ?
Sabrina Menasria : L’initiative est portée par le Pôle Excellence Cyber en partenariat avec Singularité Talents. L’objectif est d’accompagner des étudiants neuro-atypiques, aux singularités cognitives variées, depuis leurs études jusqu’à leur entrée dans la vie professionnelle. Un dispositif complet d’accompagnement est déployé pour faciliter cette transition.
Hélène Chinal : Le programme repose sur quatre piliers. D’abord, les écoles partenaires proposent des étudiants en fin de formation, prêts à s’orienter vers l’emploi. Ensuite, des employeurs publics ou privés s’engagent à accompagner ces jeunes. Un troisième pilier réunit un conseil scientifique composé d’experts de la neuro-atypie qui soutient les accompagnants et les entreprises, partage les bonnes pratiques et répond aux questions. Enfin, des professionnels neuro-atypiques déjà en poste viennent témoigner pour montrer que la réussite est possible. L’initiative est lancée cette année à l’European Cyber Week 2025.
Quel est le rôle de Singularité Talents ?
SM : Notre mission est de créer des programmes de formation dédiés. Pour accompagner efficacement des personnes neuro-atypiques, il faut comprendre leur fonctionnement, leurs zones de talent, leurs zones d’effort et les domaines où un soutien est nécessaire. Nous avons donc conçu des modules destinés aux mentors afin qu’ils puissent guider les étudiants au plus juste. Nous proposons aussi des modules de coaching aux profils neuro-atypiques, eux-mêmes, pour les préparer au monde de l’entreprise, souvent difficile à appréhender en raison des codes sociaux et implicites qui le structurent.
Comment les entreprises peuvent-elles participer ?
HC : Elles doivent investir sur deux points. D’abord, identifier des collaborateurs motivés pour suivre un étudiant sur une période de 12 à 18 mois, sans changement d’accompagnant en cours de route. Ensuite, organiser des immersions en entreprise pour que les étudiants puissent anticiper leur intégration, comprendre les codes et se projeter dans l’environnement professionnel.
Quel constat faites-vous sur l’accueil des neuro-atypiques en entreprise ?
SM : Les entreprises connaissent mal ces jeunes et peinent à comprendre leurs singularités. Le principal défi pour eux réside dans la compréhension du cadre : les codes sociaux, les règles implicites ou les environnements hiérarchiques. L’école est déjà un lieu complexe pour ces profils ; l’entreprise devient un nouvel écosystème social qu’il faut décrypter. L’accompagnement sert justement à rendre cet environnement lisible et accessible.
Pourquoi la cybersécurité a-t-elle besoin de profils neuro-atypiques ?
SM : La cyber est un domaine singulier, qui compte de nombreux autodidactes et exige une grande capacité à imaginer toutes les voies possibles pour pénétrer un système ou identifier des vulnérabilités. Cette pensée divergente est précisément la force de nombreux profils neuro-atypiques. La gestion des risques, l’analyse des failles, la compréhension des réseaux – cœur du métier – s’appuient sur une pensée en arborescence que beaucoup de neuro-atypiques maîtrisent naturellement. Dans un secteur où les talents formés manquent, il existe une véritable synergie entre ces compétences et les besoins de la cybersécurité.
Quelle valeur ajoutée pour les employeurs ?
HC : Les accompagnants ne sont pas neuro-atypiques ; ils sont formés pour comprendre les besoins spécifiques des jeunes qu’ils guident. À l’issue du programme, les entreprises disposent de personnes réellement acculturées au sujet, capables de travailler efficacement avec des collaborateurs neuro-atypiques ou de les manager. C’est un gain durable en compétence et en inclusivité.
Pourquoi est-il essentiel d’intégrer les personnes neuro-atypiques dans la cybersécurité ?
HC : La diversité renforce la créativité et l’innovation. Une équipe composée de profils différents est plus performante qu’un groupe homogène. Encore faut-il créer un environnement qui permette aux personnes neuro-atypiques de ne plus compenser en permanence leur différence. La confiance favorise l’innovation, la cohésion et la qualité du travail collectif. Tout le monde y gagne.
Comment le projet a-t-il été accueilli ?
HC : L’accueil a été excellent, avec de nombreuses entreprises intéressées. Des personnes neuro-atypiques sont également venues témoigner, parfois de leurs difficultés. Si le programme cible les étudiants en formation, il n’apporte pas de réponse aux adultes diagnostiqués tardivement et confrontés à des parcours professionnels discontinus. L’espoir est d’éviter à l’avenir ces situations difficiles grâce à un accompagnement plus précoce.
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