Celles et ceux qui disruptent
Frédéric Bordage Fondateur et animateur de GreenIT Linkedin

Frédéric Bordage a été journaliste durant plus de dix ans, chez 01 Informatique, puis chez Programmez, Les Echos et L’Usine Nouvelle. Il a auparavant occupé des postes tech dans des organisations comme l’École supérieure de commerce et de management (ESCEM), la CCI de Tours et SQLI.

Créé en 2004, le collectif Green IT est une association qui fédère les experts à l’origine des démarches de sobriété numérique, numérique responsable, écoconception de services numériques et slow tech. Editeur du site web éponyme, il s’intéresse aussi à la low tech et plus globalement à un avenir numérique alternatif, plus enviable pour les jeunes générations.

 

 

Pour un numérique « porteur de sens » !

 

Dans le cadre de nos 10 ans, nous avons invité ces « 100 personnalités » à prendre la parole, en nous partageant leurs visions, idées ou initiatives pour un numérique porteur de sens. Voici le retour à nos trois questions…

 

1. Qu’est-ce qui vous a le plus marqué ces dix dernières années dans la digitalisation de l’économie ? 

 

L’absence quasi totale de prise en compte des limites planétaires par les acteurs du numérique, ce malgré les travaux du GIEC et du Stockholm Resilience Centre. J’ai lancé le collectif Green IT en 2004. Dix-huit ans plus tard, je constate des progrès dans la prise de conscience des enjeux environnementaux associés au numérique. Mais cette prise de conscience ne se traduit pas encore, ou trop peu, en actes concrets et efficaces. Selon mes calculs, le numérique représente 40 % du budget soutenable d’un européen. C’est encore 10 fois trop par rapport aux limites planétaires. Et la part du numérique augmente d’année en année. En tant qu’industrie, plutôt que de nous rapprocher des objectifs fixés par les scientifiques nous nous en éloignons. 

 

2. Auriez-vous une idée d’action concrète pour faire bouger les lignes et rendre le numérique plus « responsable » (au sens porteur de sens) ?

 

Oui. L’urgence, c’est de rendre opérationnels les articles 1, 2 et 3 de la loi pour la Réduction de l’Empreinte Environnementale du Numérique (REEN). C’est un progrès remarquable et essentiel que de rendre obligatoire la sensibilisation à la sobriété numérique de l’école primaire à l’université. Et c’est tout aussi remarquable d’intégrer l’analyse du cycle de vie et l’écoconception des services numériques dans le titre d’ingénieur. Je suis particulièrement fier d’avoir contribué à cette avancée. Cependant, malgré l’adoption de nos préconisations dans la loi, les professeurs du primaire et les enseignants du secondaire ne sont pas outillés par leurs ministères de tutelle. A minima, il faudrait leur fournir des kits pédagogiques comme nous le suggérions déjà dans notre livre blanc remis en mars 2018 à Brune Poirson et Mounir Mahjoubi.  

 

3. Dans ce domaine, vous êtes-vous fixé un engagement pour anticiper un avenir positif ? 

 

Oui. Cela fait 18 ans que je porte les sujets de la sobriété numérique et du numérique responsable en France avec le collectif Green IT. Notre association s’est beaucoup développée depuis. Mais nous constatons que les connaissances fondamentales ne sont toujours pas acquises par les décideurs. C’est mon chantier prioritaire au sein du collectif : former les décideurs pour leur permettre de prendre les bonnes décisions. Le second chantier est celui de l’accélération. Nous sommes en train de perdre notre pari d’un développement soutenable. J’ai donc lancé, avec le collectif Green IT et la start-up Resilio, une nouvelle démarche – la slow.tech – dont vous entendrez de plus en plus parler dans les années à venir. L’enjeu de cette nouvelle approche est à la fois d’accélérer la transition écologique du secteur numérique, mais aussi de préparer les mesures d’adaptation et d’atténuation préconisées par le GIEC. 

 

Créé en 2004, le collectif Green IT est l’association à but non lucratif qui réunit les experts à l’origine des démarches de sobriété numérique, numérique responsable, écoconception de service numérique et slow.tech. GreenIT.fr anime le Club Green IT et le Collectif Conception numérique responsable et est cofondateur du consortium NegaOctet.org et de l’association Attention Hyperconnexion. Chaque année nous publions le Benchmark Green IT. 

A lire : 

Ecoconception web, les 115 bonnes pratiques, Eyrolles, 2012-2022 (4ème éd.) 

Tendre vers la sobriété numérique, Actes Sud, 2021 

Sobriété numérique les clés pour agir, Buchet-Chastel, 2019 

Qui sont les 100 personnalités, innovateurs et esprits marquants, qui donnent du sens au numérique et qui, par leurs réalisations, idées, choix ou actions… contribuent à une société plus efficiente, plus résiliente, plus juste, plus durable ? C’est la question que s’est posée, et qu’a posé la rédaction d’Alliancy mi-2022 à sa communauté dans le cadre de la préparation de ses 10 ans. Retour sur cette démarche particulière.

Chez Alliancy, nous croyons que la maturité du secteur sur la transformation de notre société et de nos organisations par le numérique est aujourd’hui mâture pour apporter des réponses différentes à l’épineuse question : « Quel numérique voulons-nous (vraiment) pour demain ? »

Dans cette liste que nous dévoilons, il ne s’agit donc pas seulement de celles et ceux pour qui le fait de transformer notre société par la technologie va de soi (parce que rien n’entrave la marche du progrès et de l’innovation), mais plutôt de celles et ceux qui, par leurs idées, leur choix, leurs décisions et actions contribuent à une société plus équitable et apaisée à tous les niveaux…

Certain.e.s ont déjà des activités bien installées et une réputation à l’avenant, d’autres sont beaucoup moins connus et débutants, mais tous nous ont suffisamment marqué pour avoir envie de parier sur eux pour un avenir commun.