Constellation, l’écosystème IT à l’origine de l’événement « Tech for Climate ? »

Constellation est née d’une synergie entre plusieurs entreprises de l’IT qui proposent des solutions de transformation numérique. Soucieux de sensibiliser davantage sur les questions de réduction de l’empreinte carbone du numérique et du cloud, le groupe a lancé en juin dernier « Tech for Climate ? », un événement qui explore le potentiel et les limites de la technologie face à l’urgence climatique. Etienne Besançon, son président et fondateur nous en dis plus sur l’initiative.

Constellation, l’écosystème IT à l’origine de l’événement « Tech for Climate ? »

Constellation, l’écosystème IT à l’origine de l’événement « Tech for Climate ? »

Alliancy. Qu’est-ce qui vous a poussé à lancer « Tech for Climate ? » ?

Etienne Besançon : Ce qui m’a inspiré pour le lancement de « Tech for Climate ? » est l’histoire d’Interface. Ce fabricant américain de dalles de moquettes s’était vu refuser un appel d’offres dans les années 1990 car elle n’agissait pas envers l’environnement. Le fondateur a alors investi durablement en R&D et payé du conseil externe pour revisiter entièrement son modèle de production. 

Encore aujourd’hui, cette entreprise internationale continue de perdurer même après son changement radical de sourcing, de maintenance ou encore de recyclage. Son modèle avant-gardiste est beaucoup moins gourmand en eau ou en énergie.

Quel a été votre parcours avant la création de Constellation en 2016 ?

Diplômé d’une école d’ingénieurs, j’ai ensuite travaillé à la direction stratégique et développement de Bouygues. J’ai notamment participé à la mise en place d’un outil d’aide à la décision financière pour la direction générale. Mais, puisque personne n’utilisait vraiment mon outil, j’ai proposé, au début d’Internet, de mettre en place des sites web pour l’entreprise qui permettent de remonter directement l’information auprès du conseil d’administration.

C’est comme cela qu’est né e-bouygues en 1998 autour de 4 piliers : un laboratoire de R&D pour cracker des problématiques non résolues, un fonds d’investissement pour capter de nouvelles idées et les aider à se concrétiser, un incubateur pour accompagner les projets internes ainsi qu’un média pour sensibiliser les managers à l’arrivée d’internet dans leur métier.

En 2000, je me prends au jeu d’un des projets incubés (mobile tribe) avant d’arrêter l’aventure début 2003. Je prends alors la décision de rejoindre l’un des administrateurs qui avait fondé Intrinsec en 1995. Je suis resté là-bas treize ans pour étendre leur palette de services au cloud et à l’infogérance et organiser leur déploiement en France et en Tunisie.

Fin 2015, j’ai quitté Intrinsec pour créer Constellation et proposer une offre cloud enrichie avec de nombreux services et répondre plus précisément aux besoins des ETI, plutôt que des grands comptes.

Pourquoi avoir choisi un modèle d’actionnariat partagé ? 

Toutes les filiales disposent d’une forte autonomie et je crois beaucoup en ce modèle car tout le monde est davantage impliqué. Cela garantit aussi une forme de stabilité pour notre activité. Chacun a son domaine de jeu et nous exigeons simplement que l’un n’empiète pas sur l’autre. Si un client demande un service qui dépasse le champ d’activités de la filiale, nous lui demandons de passer la main. 

Nous étions 14 associés au lancement de Constellation et nous sommes aujourd’hui 25 – voire 45 si on inclut les actionnaires des étoiles. Notre plus grosse cible reste les ETI, même si nous travaillons aussi pour quelques grands comptes. 

Quels sont les services proposés en matière de décarbonation ?

En mars dernier, nous avons fait l’acquisition d’Easyteam et le CEO est devenu notre Chief Impact Officer. Easyteam avait lancé le projet Diamond qui visait à décarboner l’IT dans les entreprises et cela a évolué vers un outil de bilan carbone ainsi qu’un programme d’accompagnement de décarbonation sur tous les Scopes

En parallèle, Constellation participe depuis un an à la Convention des entreprises pour le climat. Au total, 150 entreprises participent à une réflexion collective de huit mois pour aboutir à une plateforme de propositions et de résolutions concrètes.

Qu’en est-il de votre propre décarbonation chez Constellation ?

Nous menons depuis 18 mois une sensibilisation du groupe en entier sur les enjeux de transformation numérique et écologique. La formation Carbon Heroes nous a par exemple aidés sur la partie sobriété de l’infrastructure et du logiciel ; autrement dit l’écoconception de nos architectures matérielles et middleware. 

Il s’agit ensuite de mener une décarbonation de nos propres gaz à effet de serre. Sur le Scope 1 et 2 cela représente 10% de notre impact. Nous avons par exemple opéré le remplacement de notre flotte par des véhicules électriques. Il a fallu ensuite s’attaquer au reste dans le cadre du Scope 3. Nous avons ainsi décidé de changer de partenaires financiers et exclure ceux dont le bilan carbone était trop important.

Notre objectif est de diviser notre empreinte par deux d’ici 2030 et cela passe aussi par l’exemple. Nous avons récemment publié notre bilan carbone pour montrer à nos partenaires, fournisseurs et clients que cela est possible. L’idée n’est pas de lâcher nos clients les plus pollueurs mais de les accompagner vers leur transformation.

C’est en ce sens que nous avons lancé Impakt, notre étoile destinée à accompagner les organisations dans la définition et le pilotage de leur plan de réduction d’empreinte carbone.

Vous avez aussi organisé le 8 juin dernier la première édition de l’événement « Tech for Climate ? » …

Oui, nous avons mobilisé notre écosystème autour de débats et d’interventions d’experts pour traiter des opportunités et des limites de la technologie. L’idée est de partager humblement notre trajectoire bas carbone et de rappeler à notre écosystème que nous n’y arriverons pas seuls.

La technologie est aujourd’hui majoritairement présentée sous l’angle de l’optimisation énergétique et un peu moins sous l’angle de la sobriété. Qu’en pensez-vous ?

Oui, et le choix du point d’interrogation dans le titre de notre événement n’est pas anodin. Evidemment, la technologie ne sauvera pas le monde. La conclusion de notre salon est la suivante : la tech est comme le feu pendant la préhistoire, elle nous apporte la connaissance mais peut aussi brûler des forêts entières. 

La destination et le sens du projet technologique sont importants à prendre en compte. C’est un état d’esprit à adopter afin que la sobriété et la circularité puissent guider les stratégies d’investissements et d’innovation.

L’IT en tant que tel n’est pas régénératif car il n’entretient pas de lien direct avec le vivant. Mais il peut être orienté vers des projets vertueux qui ne se limitent pas au plantage d’arbres. La priorité pour l’IT est l’allongement de la durée de vie du matériel et il faut que l’obsolescence soit écartée des modes de pensée actuels. 

L’experte des risques environnementaux et sanitaires des filières minérales Aurore Stéphant me partageait dans un entretien la nécessité de passer par la législation face à l’urgence de la situation…

Nous avons aussi invité Aurore Stéphant lors de notre événement et j’ai la même certitude que sans législation, nous n’y arriverons pas. Il faut que les appels d’offres publics privilégient le matériel éco-conçu et, de la même manière, il faut une obligation à trouver des mécaniques de réutilisation de nos appareils électroniques. À ce jour, nous récupérons près de 15% du matériel informatique et seulement 5% est effectivement recyclé. 

Mais plusieurs signes présagent un changement de paradigme. Il va déjà y avoir une obligation de réemploi du fait de la rareté des ressources naturelles. Puis, nous voyons aussi une forme de pression du citoyen sur le politique et les entreprises quant aux enjeux environnementaux. Les derniers discours des étudiants de Polytechnique, HEC ou AgroParisTech en sont des exemples probants.

Et puisque le législatif arrive souvent après le business, nous devons dès maintenant trouver des voies de réconciliation entre l’entrepreneuriat et la protection de la planète. Sans tomber dans le techno-solutionnisme, il s’agit bien de trouver une troisième voie qui se mobilise pour la décarbonation et la régénération de la biodiversité.

Le numérique responsable ne se limite pas à la suppression des “emails rigolos”, comme le laissait entendre notre précédente ministre de la Transition écologique. C’est mettre notre data, notre IT et nos ingénieurs au service de projets vertueux. J’aime par exemple faire référence au projet Eloi qui propose à de jeuens agriculteurs l’acquisition de fermes en copropriété pour opérer leur conversion en agroécologie et favoriser leur résilience. Sans l’IT ou la tech, cette initiative ne serait pas faisable.

Puisque le politique ou le législateur arriveront en retard, les entreprises doivent s’emparer en urgence de ces enjeux. Et comme je le répète souvent : on ne change pas le monde en lui criant dessus, mais en l’aimant de l’intérieur.