De Scientipôle à Wilco : tout un programme

« Le plus grand accélérateur français » a changé d’identité ce printemps. Il souhaite aujourd’hui professionnaliser l’accompagnement de 150 start-up par an en Ile-de-France pour en faire des PME et plus encore… Explications.

Eric Vaysset, directeur de Wilc.

Eric Vaysset, directeur de Wilco. © Olivier Ezratty

Alliancy. Pourquoi avoir fait évoluer votre structure d’accompagnement Scientipôle, appelée désormais Wilco ?

Eric Vaysset. Ce changement de nom est l’aboutissement d’une transformation entamée il y a cinq ans ! Cet accélérateur, Scientipôle, était trop perçu comme un outil de financement de start-up [sur la centaine de sociétés financées, seulement 15% décollaient, NDLR]. Cela reste vrai, mais on a pensé qu’il était important de le faire évoluer vers un modèle plus global d’accélérateur sur un période de trois ans. Il fallait traduire ce nouveau positionnement. Nous sommes le chaînon manquant entre les incubateurs et les pôles de compétitivité.

Quel type de sociétés recherchez-vous ?

Eric Vaysset. Des start-up uniquement de la région Ile-de-France, à socle technologique, en fin d’incubation ou en cours de finalisation de leur produit. Elles ne réalisent pas ou peu de chiffre d’affaires et ce ne sont pas « vraiment » des entreprises… En fait, on se situe au niveau de l’amorçage commercial dans cinq filières « technologiques » [lire encadré]. Ces sociétés ne sont pas hébergées chez nous, elles restent là où elles sont déjà. Notre sujet est uniquement de leur proposer un parcours d’accompagnement ou d’accélération sur trois ans. L’objectif étant d’amener au moins 30 % d’entre elles au million d’euros de chiffre d’affaires sur cette période. 

Comment les choisissez-vous ?

Eric Vaysset. Nous lançons deux appels à candidatures par an et par domaine, soit 10 au total [actuellement, sélection des 15 start-up BtoC, NDLR]. A chaque fois, nous sélectionnons 15 start-up, ce qui nous fait 150 sociétés au total accompagnées par an. Nous sommes très sélectifs, car nous recevons chaque mois entre 50 et 80 candidatures [à mi-2017, 560 candidatures ont été reçues, NDLR]. Au départ, on les aide à structurer à tous les niveaux leur plan de développement au travers d’un parcours très normé de 12 à 15 ateliers à suivre sur les six premiers mois. Au bout de cette première phase, elles passent devant un comité de financement qui peut accorder des prêts d’honneur aux entrepreneurs pour alimenter le capital de l’entreprise. C’est un prêt sans garantie personnelle, ni intérêt qui peut monter jusqu’à 120 000 euros [60 000 euros auparavant, NDLR]. Elles peuvent ainsi renforcer leurs fonds propres, et disposer d’un effet de levier avec d’autres aides publiques.

De quoi est faite la troisième et dernière phase ?

Eric Vaysset. Principalement, on les aide à chercher des commandes chez les clients, qui peuvent notamment être nos partenaires privés. On dispose pour y parvenir d’une quinzaine d’équivalent temps plein de consultants « business développeurs », un réseau soutenu par une aide européenne. En parallèle, on leur propose un ensemble d’ateliers de formation pour acquérir de la méthodologie sur le financement de bilan, le développement commercial, les RH et la communication. On espère avec tout cela qu’elles passent très vite la barre du 1er million d’euros de chiffre d’affaires… et qu’elles créent des emplois. A partir de 2019, l’objectif est d’avoir un tiers des entreprises qui y parviennent. Ce qui veut dire qu’on arriverait à créer une trentaine de PME par an, soit une centaine tous les trois ans en Ile-de-France.

Station F vient d’ouvrir, la Ville de Paris dispose de nombreux incubateurs et de nombreuses structures privées existent… Vous ne pensez pas que l’on arrive aujourd’hui à saturation en Ile-de-France dans ce domaine ?

Eric Vaysset. Pas du tout car nous ne sommes pas du tout concurrents, nous ne faisons pas le même métier. Station F, par exemple, sera plutôt fournisseur de start-up par rapport à nous… Les grands groupes sont également satisfaits de voir qu’on accompagne les start-up sur le long terme. Entre eux et ces jeunes entreprises, nous sommes une forme de réassurance dans leur relation. Surtout, on affiche un taux de survie de ces boîtes de 85 % à sept ans. En fait, on crée de la valeur ensemble avec le corporate et la start-up.

Comment définiriez-vous votre action ?

Eric Vaysset. Il n’y a pas d’équivalent en France. Nous sommes en Ile-de-France, c’est aussi ce qui nous aide. Car nous suivons 150 sociétés par an et nous avons pu faire entrer des groupes privés dans la boucle pour nous soutenir. C’est la seule façon que nous avons trouvé pour financer notre structure de fonctionnement. Nous sommes 18 personnes avec un budget annuel de 2 millions d’euros et l’on prête 10 millions d’euros qui viennent de la Région et la Caisse des dépôts. On a en quelque sorte industrialisé le métier d’accompagnement de la start-up sur le long terme. On a d’ailleurs développé énormément d’outils pour nous aider, y compris des écosystèmes business de plus en plus riches avec de nombreux entrepreneurs mentors. Il faut qu’en France, on ait davantage de sociétés qui décollent !

Quelques repères

  • 2002 Création Scientipôle à Massy (Essonne), par la communauté de communes de Saclay (dédiée à l’origine aux projets scientifiques)
  • 2017 Scientipôle devient Wilco et se spécialise dans cinq domaines : Usine du futur/Energie/BTP ; BtoC (consommateur final) ; Transformation numérique des entreprises ; Retail et E-commerce ; Santé/Silver Economie.
  • 150 start-up accueillies chaque année
  • 10 millions d’euros de prêts accordés cette année
  • 2 millions d’euros : budget de fonctionnement (18 personnes), financé à 50/50 entre la région Ile-de-France et 35 partenaires privés, support ou métiers (BNP Paribas, EdF, Orange, AXA, Air liquide, Seloger.com…).
  • 750 euros de droit d’entrée pour les créateurs accompagnés. Aucun autre coût. Pas de prise de participation au capital si levée de fonds.