La Dinum adapte son programme Tech.Gouv avec la crise

La Dinum coordonne les actions des administrations en matière de systèmes d’information. Elle a également lancé le programme Tech.Gouv qui vise l’accélération de la transformation numérique du service public. Mais, avec l’irruption de la crise sanitaire, certains objectifs ont pris le pas sur d’autres. Nadi Bou Hanna, directeur interministériel du Numérique, a tenu sa conférence de rentrée fin août pour refaire le point sur les priorités.

Avant 2019, la Dinum (Direction interministérielle du numérique) s’appelait la Dinsic (Direction interministérielle du numérique et du système d’information et de communication).

Présidée par Nadi Bou Hanna, directeur interministériel du Numérique, la Dinum (Direction interministérielle du Numérique) est à l’initiative du programme Tech.Gouv. Elle est rattachée au Premier ministre Jean Castex, ainsi qu’à Amélie Montchalin, ministre de la Transformation et de la Fonction publiques. Bruno Lemaire et Cédric O peuvent également la solliciter pour des besoins spécifiques.

« Nous avons remarqué que la France en 2018 était 18ème sur 29 nations européennes en matière de numérique », rappelle d’emblée Nadi Bou Hanna lors de sa conférence de presse de rentrée. Selon l’expert, c’est une manière de justifier l’intérêt de son travail à travers le programme Tech.Gouv lancé il y a tout juste un an. L’année 2020 le conforte d’autant plus, au regard des enseignements de la crise sanitaire, mais aussi de la nécessité de renforcer les relais numériques, en réaction à la crise des gilets jaunes.

Depuis 2019, la DINUM a lancé 35 projets alignés aux enjeux politiques. Les enjeux poursuivis sont sensiblement les mêmes : 

  • la simplification des démarches administratives (pour les fonctionnaires et les citoyens)
  • l’inclusion numérique (notamment pour l’accès aux services publics)
  • l’attractivité (recruter de bons profils pour mettre en oeuvre les projets)
  • la maîtrise (devenir autonome et assurer la réversibilité de la donnée)
  • les économies (pour capitaliser sur des technologies non matures)
  • les alliances (nouer des relations de confiance avec des entreprises et la société civile)

La crise révélatrice de dysfonctionnements

La crise sanitaire est venue bouleverser le travail de la DSI au niveau des ministères. Si la Dinum assure ne pas avoir connu d’interruption de réseaux pendant les mois de mars, avril et mai, elle a tout de même connu une forte saturation, notamment pour pouvoir soutenir tous les besoins en visioconférence. En effet, ceux-ci n’étaient pas correctement dimensionnés et il a fallu investir très vite pour absorber les cent conférences virtuelles menées par jour… OBS a donc été mis en avant, en parallèle des offres de téléconférence du gouvernement pour assurer la puissance capacitaire. 

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Alors que les collaborateurs commencent à revenir au bureau, les besoins en visioconférence n’ont pas pour autant diminué. Les usages numériques au sein des services publics ont pris de l’ampleur. C’est aussi le cas de la messagerie sécurisée Tchap qui, dernièrement, a été adoptée par des personnels des Hôpitaux de Paris (APHP), de l’Assurance-Maladie ou de la métropole du Grand Lyon. En mars, elle affichait 700 000 utilisateurs et en compte aujourd’hui 60 000 de plus. La Dinum prévoit même d’atteindre la barre des 200 000 utilisateurs supplémentaires d’ici à la fin de l’année. 

Enquête Perception de la cybersécurité en entreprise

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Pour soutenir ces nouveaux usages, la Dinum a besoin d’accentuer sa recherche de talents. Elle travaille donc en ce moment même sur un référentiel commun de rémunération pour simplifier les procédures de recrutement. Cela permettrait de gagner environ 1 mois et de réduire le temps de recrutement trop long (environ quatre mois) pendant lequel le talent risque d’être embauché par une autre entreprise.

En effet, le secteur numérique est extrêmement concurrentiel et Nadi Bou Hanna admet qu’il peine à recruter les bons profils. L’enjeu est donc de rendre plus attractif sa promotion d’Entrepreneurs d’Intérêt Général et de trouver d’autres talents pour rejoindre son équipe de « commandos UX », afin d’aider les administrations à déployer des téléservices de qualité. Au total, 40 nouveaux recrutements sont prévus encore cette année. 

Enfin, l’initiative « Partagez vos talents numériques » est lancée pour construire un vivier de compétences à destination des fonctionnaires. Sur ce point, Nadi Bou Hanna a expliqué que les managers des différents ministères ne travaillent pas encore suffisamment entre eux. D’où l’importance de trouver des moyens de « faire des ponts et casser les silos ».

Trois nouvelles actions au programme

En réponse à la crise, la Dinum a souhaité ajouter trois nouvelles actions dans son programme Tech.Gouv. En premier lieu, le sac à dos numérique de l’agent public (Snap) qui vise à rendre disponibles les outils collaboratifs aux agents et ainsi leur permettre une meilleure mobilité. En deuxième lieu, la Dinum souhaite éclairer les décisions publiques grâce à la donnée. Concrètement, les technologies d’intelligence artificielle vont être mobilisées pour mesurer l’impact des politiques publiques et aider à la prise de décision. Enfin, le Lab GovTech va voir le jour pour créer un guichet ouvert aux acteurs de la GovTech et mieux faire remonter les solutions éditées par la société civile.

Autres carences détectées pendant la crise : la résilience des réseaux. Concrètement, cela signifie prévoir d’autres options, d’autres opérateurs au cas où les réseaux ne peuvent pas soutenir tous les besoins. C’est un moyen de pouvoir mitiger le risque de dépendance aux tiers. « La réalité, c’est que Microsoft est le premier fournisseur de l’Etat, affirme Nadi Bou Hanna. 75 % des agents utilisent la Suite Office, mais si demain les éditeurs incitent les utilisateurs à migrer dans leur propre cloud, nous allons devoir trouver une alternative. Nous ne migrerons pas vers Office 365 et nous ne voulons pas dépendre de Microsoft. »

Pour cela, la Dinum travaille sur le développement d’une plateforme collaborative indépendante dans la même veine que Tchap. L’enjeu ici étant d’accéder à la résilience sans forcément se contenter de services moins performants. Pour Nadi Bou Hanna, « il faut trouver un bon compromis et favoriser la diversité des offres ».