La Silver Valley zoome sur les jeunes entreprises de l’économie du vieillissement

A l’occasion de la parution de son étude sur le financement des start-up de la Silver Economie, le cluster francilien Silver Valley a fait le point sur les défis de ce secteur porteur pour les jeunes entreprises.

Silver Valley

Signature de partenariat entre Laure Reinhart, présidente de Scientipôle Initiative & Scientipôle Croissance, et Jérôme Arnaud, Président de Soliage (Silver Valley)

C’est l’une des sept ambitions pour la France définie par la Commission « Innovation 2030 » d’Anne Lauvergeon. La « Silver Economie », de plus en plus qualifiée « d’écosystème Silver » pour ne pas délaisser les aspects sociaux, a connu une forte médiatisation en 2013, avec notamment la remise d’un rapport sur le sujet à Michèle Delaunay, la ministre déléguée aux personnes âgées d’alors. Reste que les jeunes entreprises qui souhaitent se lancer ou se développer sur ce secteur, semblent s’exposer à une réalité complexe et à des défis de financement tout aussi aigus que pour leurs homologues d’autres domaines.

Pour en avoir le cœur net, le cluster Silver Valley a interrogé 54 entreprises* créées il y a moins de 5 ans et une dizaine de structures d’investissement, dans ce qu’il qualifie de « première étude nationale quantitative et qualitative des jeunes entreprises de [cette] nouvelle filière industrielle ».

Portrait-robot du « Silver Entrepreneur »

Ces start-up sont dirigées en général par des « quadragénaires chevronnés » qui, pour la moitié d’entre eux, en sont au moins à leur deuxième création d’entreprise, retrace l’étude. Ils investissent environ 150 000 euros de fonds propre sur leur projet. Par ailleurs, ces chefs d’entreprise ont, contrairement à ce que l’on pourrait penser, un profil d’ingénieur ou de commercial. Seuls 6% sont issus des professions de la santé. Mais cette expérience reste insuffisante quand on aborde le sujet de la recherche de nouveaux fonds.

« Les besoins de financement se concentrent notamment sur le moment critique du développement commercial, après l’amorçage ; avec des moyens que les entrepreneurs souhaitent consacrer avant tout au marketing et aux forces de ventes » précise Benjamin Zimmer, directeur de la Silver Valley. Parmi les principaux obstacles que ce centralien, docteur en sciences et génie industriel, a identifié à travers l’enquête : le manque d’information sur les possibilités et les processus de financement, une mauvaise identification des interlocuteurs clefs et des délais de réponses particulièrement long. En toute logique, c’est donc le sentiment d’avoir à faire à un « parcours du combattant » et de devoir faire preuve de « patience » et de « conviction » face à la « frilosité des investisseurs » qui prévalent chez ces entrepreneurs.

En effet, Silver Valley souligne que si les moyens publics sont importants, ils sont également très émiettés. De plus, « un manque de lisibilité et des freins administratifs importants pèsent sur ces jeunes entreprises » pointe l’étude. Avec au final, une atteinte au patriotisme économique défendu par le nouveau Ministre de l’Economie, Arnaud Montebourg, quand certaines de ces start-up cessent de se battre en France pour aller chercher des investisseurs à l’étranger. « Cela est même arrivé à un lauréat de notre Bourse Charles Foix (récompensant les projets innovants à destination des seniors, ndlr), qui s’est résolu à aller en Suisse » reconnait Benjamin Zimmer.

La même dynamique qu’à la naissance de l’Internet

La nature du problème commence à être bien connue en France. C’est la « Vallée de la Mort », un véritable trou d’air d’investissement, au moment où l’entreprise en a le plus besoin, c’est-à-dire pour commercialiser son produit et décoller économiquement avant d’industrialiser. « Les jeunes entreprises sont très isolées, il faut qu’elles se regroupent, ce qui les aidera à toucher les investisseurs, à se crédibiliser » encourage donc Benjamin Zimmer. Jérôme Arnaud, PDG de Doro et président de Soliage – à l’origine de l’initiative Silver Valley – regrette pour sa part un manque de maturité des porteurs de projet vis-à-vis de leur Business Plan : « Avec la Silver Economie, le risque est de penser que la Sécurité Sociale devrait de toute façon rembourser un produit innovant… alors qu’il faudrait justement partir du postulat inverse pour plus de solidité ». La Silver Valley s’est donc notamment engagée à travailler sur l’accompagnement et la formation des entrepreneurs sur ces sujets. Par ailleurs, le Cluster estime que les outils de financement qui existe déjà sont suffisants, mais qu’il convient de « mieux les flécher pour les acteurs de la Silver Economie ».

« Nous sommes aujourd’hui dans la même dynamique qu’à la naissance de l’Internet. Il va falloir inventer. La révolution démographique va s’accompagner d’une révolution numérique… et l’accélération va être notable » estime donc Jérôme Arnaud. Et de citer les sujets qui lui paraissent à ce titre les plus porteurs, comme la robotique, les technologies liées à l’habitat, au transport ou au suivi à distance des soins… Avec un enjeu très clairement identifié : plus d’efficacité dans le « soutien » à domicile des personnes âgées en situation de dépendance. Car si rien n’est fait pour accompagner le phénomène démographique du vieillissement, ce seront un tiers des actifs qui devront s’occuper de leurs ainés dans un futur proche.

 *Etude financée par la Caisse des Dépôts, AG2R La Mondiale et la DATAR, sur la base d’entretiens répartis sur 12 régions françaises, entre juin et novembre 2013

Silver Valley s’allie à Scientipôle Initiative

L’annonce des résultats de l’étude, jeudi 3 avril, s’est accompagnée par la signature d’une convention de partenariat entre la Silver Valley et Scientipôle Initiative, association qui accompagne et finance (à l’aide de prêts d’honneur) la création d’entreprises françaises innovantes. Objectif annoncé : accélérer le développement des jeunes pousses d’Île-de-France, grâce à une mutualisation de la veille et des compétences des deux organisations. D’après ces acteurs, le partenariat créé « une logique de financement de projet tout au long de la maturation » de l’entreprise, depuis l’amorçage des projets au stade de R&D, jusqu’au développement des PME en ETI.

Photo : Dorian Marcellin