Laurent Degré (Cisco France) : « Maintenant, c’est au management de s’adapter »

Laurent Degré, président de Cisco France, revient sur les attentes des entreprises en termes d’outils collaboratifs, après une année 2020 passée pour une grande majorité de salariés en télétravail.

Laurent Degré (Cisco France)

Laurent Degré, président de Cisco France

La pandémie aura plus que jamais mis en avant l’importance pour les entreprises de collaborer de manière fluide, tout comme de transformer l’expérience de leurs collaborateurs et de leurs clients. A voir l’explosion de la demande et de l’usage des nouveaux outils collaboratifs tels Zoom, Microsoft Teams, Google Meet ou Cisco Webex… L’occasion d’échanger avec Laurent Degré, président de Cisco France, groupe présent sur tous les secteurs d’activité et dans toutes tailles d’entreprises, sur l’évolution de la demande.

Alliancy. Quelles sont les demandes actuelles de vos clients ?

Laurent Degré. Nous avons réalisé plusieurs études récemment autant sur l’état de la digitalisation des entreprises que les conséquences sur le travail des collaborateurs lors de la pandémie de Covid-19. Nous constatons évidemment une accélération de la digitalisation des entreprises (en termes d’usages et de connectivité), notamment des TPE-PME. Au départ, tout s’est fait dans l’urgence, même si les grands groupes étaient déjà équipés pour la plupart. Tout n’a pas été simple à mettre en place, mais l’évolution s’est faite peu à peu malgré des problèmes de sécurité ou de modes d’organisation du travail dans l’entreprise qui se sont également posés. Toutefois, beaucoup de barrières sont tombées sur le télétravail avec cette première phase. C’est clairement devenu un ensemble d’outils de résilience de l’activité aujourd’hui. On le voit également dans la santé, dans l’enseignement et dans le secteur public. Aujourd’hui, c’est compris : tout le monde doit pouvoir travailler à distance, quelle que soit son activité.

Aujourd’hui, nous serions donc dans une phase 2 ?

Laurent Degré. Tout à fait. Maintenant, les entreprises ont conscience de l’importance de la digitalisation, en intégrant les questions de cybersécurité. Concernant le télétravail, il n’y aura pas de retour en arrière et même l’épisode Covid achevé, les collaborateurs resteront sur un modèle hybride de travail autant en termes de lieux de travail, que de façons de travailler. Les méthodes d’avant sont devenues obsolètes.

Maintenant, une 3ème phase va démarrer, qui est peut-être la plus importante. La technologie est là, mais c’est au management de s’adapter. Le digital, c’est une question de leadership. On ne peut pas piloter et manager des collaborateurs à distance de la même façon qu’au bureau. Cela va demander de la confiance, une organisation du travail différente sous forme de missions… Il faut changer le mode de fonctionnement des entreprises.

La numérisation n’est plus un choix pour les PME, mais une nécessité. En France, plus de 75 % d’entre elles accélèrent la numérisation de leurs activités suite à la pandémie.

Dans notre étude mondiale sur la digitalisation des entreprises, la France arrive 11ème rang au niveau mondial, et en Europe, derrière les Anglais et les Allemands. Reste que si on regarde les barrières évoquées pour se digitaliser, 25 % des entreprises jugent difficiles d’avancer car du fait de la résistance de leurs équipes au changement, quand 94 % des entreprises admettent que la pandémie les a rendue dépendantes de la technologie. Tout le monde considère donc qu’il faut y aller, mais un quart d’entre elles s’estime bloqué pour des questions culturelles, notamment dans les entreprises françaises. Il faut comprendre qu’aujourd’hui, il n’y a pas travail et télétravail… qui s’oppose. Il n’y a plus que le travail.

De ce fait, il faut donc travailler différemment avec de nouveaux outils ?

Laurent Degré. Cette crise impacte tous les métiers de l’entreprise désormais que ce soit les ressources humaines, la logistique, l’immobilier, les services généraux… Tout s’intègre et cela va bien au-delà des simples outils de collaboration. C’est ce que nous visons avec la suite d’outils Webex, dont l’objectif vise à créer une expérience en mode collaboratif meilleure qu’en physique. On entre dans l’hybride ! Nous avons par exemple doté notre solution d’une fonction visant à amoindrir la pollution sonore grâce à l’intelligence artificielle… Tous les bruits ambiants n’existent plus. Nous avons également misé sur la traduction automatique et le sous-titrage en temps réel des conversations en dix langues pour suivre plus facilement les échanges entre les différents participants… Une option utile aussi pour les malentendants. Courant 2021, l’arrivée d’une cinquantaine de nouvelles fonctionnalités va révolutionner la collaboration.

La pandémie a-t-elle accéléré ces développements que vous évoquez ?

Laurent Degré. Oui, nous avons accéléré du fait de la demande et de l’accélération de l’adoption de ces outils, y compris sur la cybersécurité (solution plus performante, plus abordable, plus facile à utiliser). Nous avons aujourd’hui 600 millions d’utilisateurs sur Webex… On vise désormais une nouvelle génération d’outils collaboratifs, qui pour certains vont largement se démocratiser. A nous d’améliorer l’expérience client.

Ce que l’on avait prévu en termes de déploiement sur cinq ans va s’accélérer. Aujourd’hui, sur 700 personnes en France chez Cisco, 150 ingénieurs travaillent sur le développement et la co-construction d’outils collaboratifs avec nos clients. Mais il y a toujours un grand besoin d’acculturation et de formation, notamment dans les PME… auquel nous répondons au travers de nos 1 200 partenaires locaux. Selon notre étude, les PME pourraient accroître le PIB du pays de plus de 200 milliards de dollars d’ici à 2024 grâce à leur transformation numérique.

Plus de flexibilité demandée par les salariés

Selon les résultats de l’enquête de Cisco intitulée « Les collaborateurs de demain », les employés considèrent la pandémie comme un tournant, qui remet en question les normes culturelles sur l’espace de travail. Plus précisément, les salariés français souhaitent conserver les nouvelles habitudes de travail qui ont émanés du confinement. Les bénéfices qu’ils en retirent ? Autonomie renforcée (55 %) et travail probant pour les équipes à distance (63 %). Ils sont également 50 % à vouloir maintenir la prise de décision rapide, car cela permet leur d’être plus productif.