L’interdisciplinarité au cœur des transformations réussies

Transformation digitale des géants de l’énergie, distribution prochaine des fréquences 5G plus économes en énergie, développement des technologies de smart charging… Les passerelles entre révolution numérique et transition énergétique se multiplient. Elles illustrent une tendance de fond, qui doit guider et irriguer la transformation dite numérique des entreprises : aujourd’hui, une transformation réussie est une transformation augmentée d’un regard interdisciplinaire. 

Guillaume Canu,

Guillaume Canu, Associé de Cepheïd Consulting

Révolution numérique, nouveaux compétiteurs, impératifs énergétiques, transitions écologiques : les entreprises évoluent dans un environnement complexe, qui suscite une multitude de défis. C’est justement sur cette complexité que les projets de transformations achoppent. Pour réussir, les entreprises doivent simultanément accéder à davantage d’informations de marché, préciser leur vision cible, gagner en agilité, mobiliser et entretenir un tissu de compétences complémentaires, rythmer leur trajectoire d’innovation… Et une fois la transformation engagée, rien n’est encore gagné : plusieurs études[1] indiquent que plus de la moitié des entreprises ne sont pas satisfaites des effets de leur transformation.

Une transformation réussie n’est jamais seulement « numérique »

Dans ce contexte, il n’y a pas de transformations numériques réussies. Les transformations dites « digitales » doivent nécessairement prendre en compte une panoplie d’enjeux qui dépassent le numérique. C’est pourquoi, nous préférons parler de « transformations augmentées » : c’est-à-dire, de transformations qui embrassent la superposition des problématiques et qui transcendent les silos.

Prenons le cas de la transition énergétique. Le secteur de l’énergie est, comme les autres, amené à intégrer des outils digitaux et à user des technologies numériques pour adapter sa proposition de valeur et devancer les concurrents. Par exemple, sur le marché émergent des bornes de recharge pour voitures électriques, les acteurs usent de solutions numériques pour gagner en rentabilité : on parle de technologies de recharge intelligente, qui permettent de répartir la puissance électrique disponible de manière optimale.

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Mais le mouvement se fait aussi en sens inverse : la transition énergétique est une problématique transverse, qui impacte les acteurs du numérique. Citons ici le déploiement prochain de la 5G, particulièrement attendu par les opérateurs pour qui cette technologie représente un gain de rentabilité significatif : la 5G consomme 10 fois moins d’énergie que la 4G. Bitcoin, consommation de VoD : de manière générale, la question de la consommation d’énergie par les technologies numériques est amenée à prendre de l’importance. Deux problématiques majeures se posent actuellement pour les datacenters : avec un volume de données qui ne cesse d’augmenter, comment à la fois augmenter les performances du réseau et maîtriser la consommation d’énergie ? Une question complexe, qui nécessite une vision globale de la problématique.

Les quatre dimensions d’une transformation augmentée

Pour réussir leur transformation, les entreprises doivent simultanément activer quatre leviers, comme autant de dimensions d’une transformation augmentée.

Augmentée, tout d’abord, d’une vision cible : les transformations doivent être guidées par une stratégie claire. Le numérique n’est pas une tendance à laquelle il faut emboîter le pas, parce que les autres le font !

Une transformation réussie est transverse, et ceci à deux endroits : au niveau des compétences, l’entreprise doit être capable de faire intervenir des profils interdisciplinaires et spécialisés. Et au niveau organisationnel, le projet doit intégrer et faire travailler ensemble tous les services et les compétences impactés, au-delà du seul département informatique. L’agilité n’est pas une injonction, mais peut être le moyen de faire communiquer efficacement des métiers qui habituellement travaillent en silo.

Enfin, une transformation réussie est une transformation où l’innovation technologique a sa place : c’est-à-dire, celle d’un moyen et non d’une fin en soi. C’est à l’innovation de s’adapter aux objectifs stratégiques et à la maturité digitale des organisations.

Multidimensionnelle, interdisciplinaire, dotée d’une vision claire et d’une trajectoire d’innovation réfléchie : la transformation réussie est une transformation augmentée. Et peu importe le nombre de dimensions qu’elle comporte : digitale, énergétique ou écologique, c’est en investissant sa complexité que les entreprises en tireront tous ses bénéfices !

[1] Celles-ci sont citées dans l’article de Adaya, Bourdeau, Marchildon, « Projets de transformation numérique : cinq pièges à éviter », Gestion, HEC Montréal, 2019, p.94-97.