Matthew Broadway (Netatmo), besoin d’un globe trotter

De par son parcours international, autant en Europe qu’en Asie, Matthew Broadway a séduit les fondateurs de la start-up francilienne Netatmo pour partir à la conquête du monde avec leurs objets connectés.

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Matthew Broadway directeur général délégué de Netatmo © Franck Ferville

Tous les lundis, Matthew Broadway se lève à 5h00. Direction l’aéroport d’Heathrow, près de Londres, pour être d’attaque au siège de Netatmo, à Boulogne-Billancourt, en banlieue parisienne, à 10h00. Ce Britannique de 40 ans a été nommé, en avril dernier, directeur général délégué du fabricant d’objets connectés, spécialisé dans l’environnement et le bien-être.

Matthew Broadway partage sa vie entre la France et le Royaume-Uni, travaille du lundi au jeudi soir à Paris, avant de rentrer à Oxford, où vivent sa femme et sa fille de trois ans. Le vendredi, il en profite pour développer, outre-Manche, le business de la start-up fondée en 2011 par Frédérique Potter et Jean-Pierre Dumolard.  Un rythme soutenu qui n’entache pas sa décontraction naturelle. «  Nous allons quand même déménager en France,  probablement à l’automne. D’ailleurs, ma famille est enchantée de venir vivre ici », se réjouit-il. 

Cet homme plein d’énergie a longtemps travaillé à l’étranger : Chicago, Tokyo, mais aussi un peu partout en Angleterre. Profil international, il a évidemment séduit Netatmo, société présente aux Etats-Unis depuis 2012, avant la Grande-Bretagne, l’Allemagne, l’Espagne et l’Italie en 2014… Des marchés porteurs dans le domaine des objets connectés. « Internet a déjà avalé la musique, le cinéma, la télé, mais aussi l’immobilier. C’est au tour du marché des objets connectés de tout manger. » Et Netatmo compte bien ne pas louper le coche ! Ses produits sont déjà des succès, comme la station météo lancée en 2012 et le thermostat connecté, « designé » par Philippe Starck. Ce moisci, elle lance Welcome, une caméra qui détecte les visages familiers. Matthew s’empresse d’en faire la démonstration : il l’a déjà installée dans sa maison d’Oxford. Il reçoit une notification quand sa femme – « The Boss » comme il la surnomme –, rentre à la maison ou quand la baby-sitter arrive. « Ça le rassure », dit-il. Welcome n’est pourtant pas son chouchou. Il préfère de loin le thermostat : « Je l’aime surtout parce qu’il permet de faire  économiser de l’argent aux utilisateurs. Il peut réduire de 37 % la consommation d’énergie pendant l’hiver. »

Une leçon de business

Avant de rejoindre Netatmo,  Matthew a travaillé dix ans chez Dyson, la célèbre société anglaise d’électroménager. Il entre dans  l’entreprise en 2005, en tant que directeur marketing produit. « La première chose que j’ai faite en arrivant a été d’arrêter de fabriquer des machines à laver. La technologie était fantastique, mais la supply chain n’était pas ce qu’elle devait être. Ça nous faisait perdre de l’argent. » Une entrée en matière plutôt radicale, mais une « leçon de business » qu’il n’est pas près d’oublier.

Il lance ensuite le célèbre sèche-mains pour professionnels, Dyson Airblade. Un nouveau secteur pour son employeur habitué à vendre des produits BtoC. « C’était effrayant. Nous ne devions pas nous tromper, car nous étions déjà une grande marque. Mais nous avions confiance dans la technologie. Notre produit était plus rapide et plus hygiénique que ce que l’on trouvait sur le marché. » Il vit le lancement du sèche-mains comme une expérience « fantastique ». « A part James Dyson et mon équipe, personne d’autre ne se souciait de ce projet. C’était comme travailler dans une start-up. C’était très libérateur. D’un côté, nous avions les ressources, la marque, le poids et l’intérêt d’une grande entreprise et, de l’autre, on nous laissait trouver les solutions tout seul. » En 2008, il s’envole pour le Japon pour diriger le marketing, puis devient directeur commercial du groupe en 2013.

Mais alors, pourquoi avoir quitté Dyson ? « Je voulais me prouver que je pouvais réussir en dehors d’une grande entreprise, avec de nouveaux produits, une nouvelle équipe. Et je voulais faire quelque chose à la pointe de l’électronique grand public. » Après dix années passées chez Dyson, le Britannique connaissait tous ses concurrents, les plus grands et les plus petits comme Netatmo. Quand Frédéric Potter est venu frapper à sa porte, il n’a pas hésité une seconde. D’ailleurs, il se souvient très bien de sa première rencontre avec le fondateur de la start-up française. « C’était dans un bar de la gare du Nord. Au début, j’étais un peu surpris quand je l’ai vu arriver avec son jean et son casque de moto à la main. Mais, à la minute où il a commencé à parler de sa technologie et de Welcome, j’ai été instantanément convaincu. » 

Le duo fonctionne. Frédéric dirige l’innovation, tandis que Matthew s’occupe de la partie commerciale. Son objectif est simple  : faire du  business ! Avec un challenge : les objets connectés domestiques n’emballent pas totalement le grand public… « Les consommateurs ne sont pas encore prêts à vivre dans une maison connectée. Ce qu’ils veulent, c’est un produit qu’ils utilisent déjà, mais qui ait un vrai bénéfice une fois que le produit est connecté », explique le Britannique. Depuis son arrivée à bord, Matthew met toute son énergie dans la commercialisation de Welcome. Il ne donnera pourtant aucun chiffre : « C’est trop d’informations pour nos concurrents. Les chiffres sont extrêmement bons, mais les règles sont les règles. » Aujourd’hui, la société compte 75  collaborateurs (contre dix à la création). Au  CES 2015 de Las Vegas, où  Welcome a remporté quatre prix, Frédéric Potter a annoncé le recrutement de soixante-dix personnes cette année. Et, dans son équipe, Matthew recherche dix nouveaux profils.

Avec de tels projets de développement, le mot d’ordre est surtout croissance. « Fred et moi sommes ici pour durer. Je n’ai pas quitté Dyson juste pour être là à court terme. Fred n’a pas non plus créé cette entreprise en ce sens. Nous pensons surtout à croître et à étendre notre distribution. » D’ailleurs, Matthew prévoit déjà de se mettre au français : « J’ai la chance d’être dans une équipe internationale, où l’anglais est courant. Mais ce n’est pas une excuse. Le français devrait m’aider dans le travail et, en plus, ça doit être bien plus facile que le japonais », s’amuse-t-il.