Michael Brecht, CEO de Doodle : « Mon but, c’est que l’on dise bientôt « je vais prendre un Doodle », plutôt qu’un rendez-vous »

« Mon but, c’est que l’on dise bientôt « je vais prendre un Doodle », plutôt qu’un rendez-vous »

Michael Brecht, nouveau CEO de Doodle

Depuis qu’elle a pris son envol en 2008, Doodle veut simplifier l’organisation des réunions, en mode collaboratif, pour les particuliers et les professionnels. En janvier, la start-up suisse a annoncé l’arrivée au poste de CEO de Michael Brecht, pour remplacer les deux fondateurs Michael Näf et Paul E. Sevinç (qui restent au board). Ce mouvement accompagne la volonté de Tamedia, principal groupe de presse suisse, d’augmenter sa participation dans l’entreprise (à 49% depuis 2011) pour qu’elle devienne majoritaire. Le nouveau dirigeant revient pour nous sur les enjeux de la start-up et sur son avenir, entre croissance à l’international et B2B.

Quels sont les changements qu’annonce votre prise de fonction ?
La logique de cette évolution, c’est l’accompagnement de la croissance très impressionnante que connait Doodle. Après une diffusion que l’on peut qualifier de « virale », les fondateurs de l’entreprise, deux ingénieurs qui ont réussi à créer un produit extrêmement pertinent et abouti techniquement, ont senti qu’il était l’heure de changer de tactique pour assurer le futur. Mon arrivée coïncide avec cette volonté de trouver de nouveaux appuis et d’élargir la vision.

Quels sont vos principaux défis ?
Je ne suis pas ingénieur, mais j’ai une forte expérience des changements nécessaires à la croissance des entreprises, notamment dans l’univers des médias digitaux. J’aurais donc la tâche d’utiliser la force d’un groupe de presse comme Tamedia, au mieux des intérêts de Doodle, de coordonner nos expertises, tout en gardant notre esprit start-up et notre identité. Après 100 jours à ce poste, je ne vois aucune raison pour que nous ne décuplions pas rapidement nos 20 millions d’utilisateurs mensuels.

Justement, quel est leur profil ? Votre offre s’adresse à la fois aux particuliers et aux entreprises, avec une version gratuite mais également une version premium…
Aujourd’hui, nos utilisateurs sont répartis de manière égale entre les deux mondes. Quand Doodle s’est lancée, ce sont les particuliers qui ont été tout d’abord séduit et nous avons bénéficié d’un fort effet de bouche à oreille…. Mais le succès de l’outil, sa simplicité d’utilisation, ont fait que nous avons rapidement dépassé ce cadre. C’est avec ce genre de résultat que l’on peut se rendre compte que les fondateurs ont fait un travail formidable, avec un produit suisse solide et intuitif qui séduit énormément. Face à ce succès, certains ont pensé que Doodle était une start-up américaine !

Comment se répartissent vos revenus ?
En 2013, la publicité (sur la version gratuite) représentait environ 87% de nos revenus. Le pourcentage restant étant apporté à la fois par la version premium et par le téléchargement de nos applications mobiles. Cela va rapidement changer. La part de notre offre premium devrait atteindre 50% environ du total sous 4 ans. Les utilisateurs business l’apprécient particulièrement, car elle répond à certaines de leurs attentes les plus courantes, comme une intégration avec leur propre charte graphique et une réconciliation des fuseaux horaires pour les rendez-vous internationaux.

Comptez-vous diversifier cette offre ? Apporter des services complémentaires ?
Doodle a commencé à se positionner sur le sujet il y a de cela 15 mois, avec BookMe, une solution dédiée aux TPE, comme les salons de coiffure ou de massage par exemple, pour leur permettre de gérer la prise de rendez-vous de leurs clients. Ce marché est très fragmenté, mais je ne connais aucun coiffeur qui préfère avoir à répondre au téléphone toute la journée plutôt que de couper les cheveux de ses clients ! Cette approche B2B est essentielle pour notre croissance, notamment sur le marché français qui a un pool énorme de TPE.

Quelle place tient la France dans vos activités ?
Nous sommes présents dans de nombreux pays, mais il y a cependant 3 « réseaux de langue » qui sont très importants pour nous : l’anglais, l’allemand et le français. Ces langues et leurs marchés nous servent à tester nos idées, notamment d’un point de vue marketing et communication média, mais également sur le SEO, par exemple. Pour continuer à établir Doodle globalement, je suis convaincu que nous devons garder un focus sur nos points forts. En ce sens, je vais être très strict sur l’évolution de l’outil, pour que nous restions au cœur de notre métier : la prise de rendez-vous. Cependant, cela ne veut pas dire rester immobile, bien au contraire. Il y a quelques années, nous nous cantonnions à permettre le choix commun d’une date. Aujourd’hui nous facilitons tout ce qui doit s’organiser autour des rendez-vous eux-mêmes. Nous avons ainsi signé un partenariat avec un groupe de presse allemand à l’occasion de la Coupe du monde de football 2014. L’objectif : favoriser les rencontres et les rendez-vous autour de l’événement et des matchs qui – par leur nature même – ne peuvent pas être décalé et pour lesquels on ne vote pas d’heure et de date ! Pour atteindre un véritable usage mondial, il nous faut faire valoir des exemples comme celui-ci.

Si le destin de Doodle est à l’international, qu’est-ce que cela implique pour votre organisation ?
Pour le moment, nous sommes une quinzaine, avec des profils plutôt techniques et ingénieurs, basés en Suisse, à Zürich. Nous allons recruter en juillet 2 personnes de plus pour ce bureau. Mais nous voulons également grandir à Berlin, qui est une ville avec un caractère et des profils internationaux très marqués. L’équipe là-bas sera plus orientée services et marketing. Nous devrons bientôt être plus d’une vingtaine en tout. Dans tous les cas, le but est d’avoir une vraie « team internationale » qui nous permette d’assurer notre objectif de croissance à deux chiffres.

Et en termes d’image ? Ne vous confond-on pas parfois avec les doodles animés de Google, qui ont régulièrement les honneurs de la presse ?
La question se pose parfois pour nos utilisateurs français ou allemands. Jamais pour les anglophones. Toutefois, je dirais que ce lien de réputation n’est pas pour me déplaire. Google est associé à l’innovation aux yeux de tous… la comparaison est plutôt positive ! Dans tous les cas, je pense que Doodle a une forte identité propre. Et notre spécialité nous démarque. Mon but, c’est que l’on dise bientôt « je vais prendre un Doodle », plutôt qu’un rendez-vous !

Vous avez réagi très vite à l’annonce de la faille Heartbleed sur vos blogs… Est-ce que le défi de la sécurité et de la confidentialité peut être un frein pour Doodle ?
Nous avons effectivement réagi dès le jour J, pour rassurer nos utilisateurs. Je pense que pour un site global et ouvert comme le nôtre, la situation a été bien gérée. Notre avantage, c’est que même pour nos offres payantes, nous n’avons aucun accès aux données relatives aux transactions. Nous étions donc sereins et avons pu communiquer en conséquence. Heartbleed est un rappel fort : il faut toujours être vigilant. Mais je ne vois pas de frein. Au final, je crois que de toute façon, le développement d’une communication ouverte et sociale – à l’image de ce que propose Doodle à son niveau – ne va pas s’arrêter. Et nous surfons sur cette vague de fond. 

Michael Brecht, CEO de Doodle : « Mon but, c’est que l’on dise bientôt « je vais prendre un Doodle », plutôt qu’un rendez-vous »