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La Mobility as a Service, appui précieux pour les nouvelles mobilités des territoires

Pour faire face à la multiplicité des structures et niveaux de responsabilité à travers le territoire, la MaaS se présente comme un outil permettant d’offrir aux usagers une information centralisée, fiable et en temps réel.

Mobility as a ServiceEn France, un tiers des émissions de CO2 sont générées par les activités de transport. Et plus d’un Français actif sur cinq (21%) utilise exclusivement sa voiture pour aller sur son lieu de travail, bien que son trajet soit inférieur à neuf kilomètres. Enfin, sur 80 % du territoire, aucune collectivité ne propose de solution pour les transports du quotidien.

La loi d’orientation des mobilités (dite loi LOM), publiée en décembre 2019, a pour ambition de créer des solutions nouvelles pour se déplacer plus facilement et de tirer parti de la révolution numérique pour proposer de nouveaux services aux usagers. Elle souhaite également mettre en place des transports plus propres, avec notamment l’inscription dans la loi de la fin des ventes de voitures à énergies fossiles carbonées d’ici 2040 (entre-temps, l’Union européenne a validé l’interdiction de la vente de voitures neuves à moteur thermique en 2035), le déploiement de la recharge électrique ou encore le développement des zones à faibles émissions (ZFE).

« Si nous repositionnons la LOM dans une perspective de transformation des mobilités, nous pouvons dire que la démarche vise à amplifier et accélérer l’innovation et la décarbonation, tout en essayant de pousser une dimension sociale. Les dimensions environnementales et sociétales, qui sont gravées dans la loi, sont cependant les plus difficiles à mettre en œuvre d’un point de vue financier. Les perspectives des collectivités d’un côté et des opérateurs privés de l’autre ne sont en effet pas toujours alignées sur ce point », déclare Didier Givert, Directeur Associé du cabinet Eight Advisory.

Quelques exemples remarquables en France

Sur le terrain, quelques initiatives remarquables sont à signaler. On peut notamment citer le plan vélo de la ville de Grenoble. Avec plus de 450 km d’itinéraires, le réseau cyclable de cette métropole est l’un des plus dense et maillé en France. Le service Métrovélo, avec un parc de 7 000 locations, rend par ailleurs les déplacements en vélo accessibles à tous. Et sur le réseau TAG (Transports de l’agglomération grenobloise), le transport des vélos est autorisé dans les trams avant 7h30 et après 19h30 en semaine, et toute la journée les dimanches et jours fériés.

« À Grenoble, nous avons assisté à l’augmentation de la part du vélo dans les déplacements et à la réduction de la place de la voiture, ce qui a libéré de l’espace public et amélioré la qualité de l’air. Par ailleurs, des services de covoiturage solidaires et de transport des personnes âgées ont été développés », commente Didier Givert.

Autre exemple, celui de l’Agence Savoie Mont-Blanc qui propose depuis le mois de novembre 2022 le service Go Savoie Mont-Blanc. Imaginé par l’organisme de promotion des stations de Savoie et de Haute-Savoie, avec le soutien technique de l’entreprise Antidots, le nouveau site de réservation agrège plusieurs solutions de mobilité pour organiser 100 % de son déplacement, de son domicile à la station de ski de son choix : train, avion, bus, location de voiture…

« Cela fait 30 ans que le tourisme attend une solution intégrant le dernier kilomètre. Avec ce nouveau dispositif inédit à l’échelle européenne, l’Agence Savoie Mont-Blanc franchit un cap en associant les problématiques de transport à des enjeux d’avenir que sont l’incitation à réduire son empreinte carbone et penser la mobilité comme un service », note Vincent Rolland, député de la Savoie, co-président de l’Agence Savoie Mont-Blanc.

« Le voyageur peut se rendre ou venir de n’importe quelle destination à travers le monde, notre technologie est capable de traiter la demande. La solution a pour objectif de transposer l’innovation au service du ‘mieux consommer’, d’avoir une démarche plus vertueuse et doit répondre au besoin de tous les territoires », complète Grégory Guzzo, directeur associé de la start-up Antidots.

Le MaaS, la solution intégrée idéale ?

Malgré ces quelques initiatives qui sortent du lot, la réalité sur le terrain est qu’il existe une grande diversité de structures et de responsabilités au niveau des autorités organisatrices de mobilité (AOM) créées par la loi LOM. « Le principal défi se situe au niveau de la coordination de toutes les actions, entre l’État, les régions, les départements et les communautés, que ce soit en termes de décision ou de financement », analyse Didier Givert.

Pour fluidifier les flux et tirer profit de la data disponible, les acteurs des nouvelles mobilités se tournent vers le numérique. « Le rôle du numérique devient aujourd’hui très central, à la fois technologiquement, mais aussi sur les aspects organisationnels et structurels. Il est essentiel dans un premier temps pour que les autorités organisatrices puissent comprendre les besoins, les niveaux de fréquentation et les volumes de transport, afin de prendre les bonnes décisions », note Didier Givert.

Le numérique devient également crucial pour garantir la cohérence des dispositifs mis en place vis-à-vis des utilisateurs, au niveau des horaires, mais aussi de la capacité à s’abonner à l’ensemble des mobilités, de manière globale. « C’est ici que la Mobility as a Service entre en jeu. La data devient alors centrale dans la façon dont on propose aux utilisateurs une transversalité des mobilités pour lesquelles ils vont pouvoir accéder à l’ensemble des informations, afin d’optimiser leurs déplacements. Côté autorité organisatrice, le MaaS permet de suivre les volumes et les besoins afin d’apporter les meilleurs services », ajoute Didier Givert.

Modalis, un MaaS grandeur nature en Nouvelle-Aquitaine

C’est dans cette logique servicielle que Nouvelle-Aquitaine Mobilités a lancé Modalis, sa marque d’intermodalité en Nouvelle-Aquitaine. Avec son calculateur d’itinéraire accessible en ligne, sur les app-stores et depuis les sites des réseaux membres, Modalis délivre une information partagée et en temps réel aux usagers.

« L’avènement des smartphones, associé au développement des technologies 4G/5G et à l’ouverture des données de transport, permet d’imaginer de nouveaux services à destination des usagers : calculateur d’itinéraire multimodal, achat de titres dématérialisés, informations réseau en temps réel… Autant de fonctionnalités qui redonnent à l’usager le contrôle sur ses déplacements au sein d’une offre de mobilité plurielle. Une invitation à repenser la mobilité des personnes en l’intégrant dans une réflexion servicielle globale », peut-on lire sur le site de Nouvelle-Aquitaine Mobilités.

Avec Modalis, le syndicat mixte Nouvelle-Aquitaine Mobilités réunit 33 collectivités locales et 40 réseaux de transport. Il revendique 1,6 million de calculs d’itinéraires par mois en 2022 sur son outil dédié et 40 000 utilisateurs de la carte Modalis. Enfin, l’application a connu une forte croissance en termes d’usage avec 650 959 trajets effectués l’an dernier, soit plus de trois fois le nombre de trajets réalisés en 2021. Son chiffre d’affaires 2022 dépasse l’objectif symbolique du million d’euros.

Selon le cabinet Markets and Markets, le marché mondial des MaaS devrait passer d’un volume d’affaires de 3,3 milliards de dollars en 2021 à 40,1 milliards en 2030, suivant un taux de croissance annuel composé de 32,2 % sur la période de prévision (2022 / 2030).