Quels impacts de la transformation numérique sur les Ressources Humaines dans le secteur public ?

Les Ressources Humaines dans le secteur public vivent une petite révolution à l’ère du numérique et des réformes gouvernementales. Le 27 juin 2019, le Sénat a adopté le projet de loi de transformation de la fonction publique, dont la procédure accélérée avait été engagée par le Gouvernement depuis le 27 mars 2019, et sur lequel 125 amendements ont été adoptés en séance.

Perrine Meunier, Consultante mc2i Groupe

Perrine Meunier, Consultante mc2i Groupe

La volonté gouvernementale est de rendre le dialogue social plus stratégique d’une part, d’assouplir le recrutement en contrepartie de garanties renforcées d’autre part, et de renforcer l’égalité entre les agents et entre les trois fonctions publiques : d’État, Territoriale et Hospitalière.

Ces profonds changements viennent s’ajouter à ceux portés par le programme « Action Publique 2022 », lancé le 13 octobre 2017 par le Premier Ministre Edouard Philippe, dont les objectifs sont d’améliorer la qualité de service, de moderniser la fonction publique et de diminuer les dépenses.

 Les Ressources Humaines s’activent donc ardemment à la mise en œuvre d’une nouvelle organisation et des mises à jour réglementaires.

Transformation numérique et rénovation du cadre des ressources humaines : deux chantiers majeurs qui impactent les Ressources Humaines

La dématérialisation des activités et la simplification des processus de gestion des Ressources Humaines sur fond de convergence et de mutualisation demandent l’implication de nombreux acteurs. Des travaux interministériels ont notamment été menés entre la DGAFP, la DINSIC, le CISIRH ainsi que les ministères et les acteurs SIRH-Paie. Au terme de ces travaux, le Ministère de l’Action et des Comptes Publics a diffusé, en 2018, la feuille de route SIRH 2022 composée de six axes. L’orientation a été donnée à la consolidation, à l’optimisation et à la sécurisation des socles des systèmes d’information et de gestion des ressources humaines de la gestion administrative et de la paie et du déclaratif. Quant à la modernisation, elle est aussi de mise, avec le développement de nouveaux services numériques adaptés aux évolutions du métier, et aux nouvelles attentes des agents, des ressources humaines et des directions.

Dans une logique d’optimisation et de sécurisation des processus de gestion administrative et de paie, les ministères sont incités à utiliser les mêmes outils, à partager et à mutualiser leurs bonnes pratiques. Le système d’information de gestion des ressources humaines interministériel RenoiRH en est l’illustration. Il couvre l’ensemble des processus avec un faible taux de spécificités, garantissant plus de fiabilité, d’interopérabilité et de flexibilité. Des référentiels communs et des règles de gestion harmonisées sont par ailleurs diffusés auprès des ministères via l’application interministérielle INGRES.

La dématérialisation complète des processus et des documents est un des objectifs du gouvernement. Pour ce faire, il faut faciliter le partage et l’échange d’informations et de documents de manière rationnelle et simplifiée. L’enrichissement et l’ouverture des données publiques y contribuent également. Mais les textes réglementaires doivent aussi s’adapter afin de permettre au document dématérialisé de faire foi. Les systèmes d’information de gestion des ressources humaines doivent, quant à eux, en assurer l’intégrité, la disponibilité, la pérennité et la preuve. Ainsi, le dossier individuel dématérialisé de l’agent sera généralisé fin 2022 avec l’objectif de le rendre accessible à partir du portail unique de services.

En vue de répondre aux nouveaux usages des ressources humaines et des agents, des services numériques sont développés telles que des applications permettant une gestion autonome grâce à une connexion facilitée ou bien des chatbots apportant des renseignements de premier niveau.

Par ailleurs, la gestion des emplois et des compétences est au cœur des enjeux de la transformation de la fonction publique. De nouveaux outils sont déployés pour faciliter la gestion des évolutions de carrière des agents et le pilotage des compétences tels que des portefeuilles de compétences, des référentiels métiers communs, des passeports de formation numériques, des entretiens professionnels dématérialisés et une cartographie des bassins d’emplois. L’outil de pilotage interministériel, RenoiRH Décisionnel, propose quant à lui des indicateurs pré-calculés et des rapports standardisés ou paramétrables qui en fait un instrument efficace d’aide à la décision.

Les réformes de la fonction publique simplifient-elles réellement l’organisation des Ressources Humaines ?

En parallèle des orientations citées ci-dessus, le projet de loi de transformation de la fonction publique a été adopté dernièrement par le Sénat et concerne 5,5 millions d’agents. Même si l’adoption définitive ne sera effective que d’ici fin juillet, nous pouvons présupposer de conséquentes évolutions.

Le texte prévoit notamment le recours accru aux contractuels, mais aussi des mobilités facilitées, un dispositif de rupture conventionnelle, un « contrat de projet », la refonte des instances pour un dialogue social simplifié, des modifications de régime indemnitaire et la création d’une nouvelle catégorie d’agents.

Ces mesures, parmi tant d’autres, viendront impacter l’organisation et les pratiques de gestion des ressources humaines avec pour conséquence, des mises à niveau réglementaires et fonctionnelles des systèmes d’information de gestion des ressources humaines, et ce, pendant plusieurs mois.

La standardisation des outils et des processus, la mutualisation des activités et la simplification de la gestion des ressources humaines ainsi que le développement d’outils fiables, sécurisés et plus performants semblent répondre à première vue aux objectifs de service optimal et de baisse des dépenses. Mais cette configuration facilite aussi la mise à jour et la maintenance des systèmes d’information dans un tel contexte de réformes.

Cependant, la simplification et l’harmonisation, avec l’entrée du modèle privé dans le secteur public, ne   doivent pas occulter les spécificités de certains métiers et de certaines fonctions nécessaires au bon fonctionnement de la fonction publique d’Etat, Territoriale et Hospitalière. Comme par exemple, l’absence de droit de grève pour la Police Nationale et les militaires ou bien le respect au sens large des principes fondamentaux qui sont la continuité du service, la mutabilité et l’égalité devant le service public.

Sources :

[1]DGAFP : Direction Générale de l’Administration et de la Fonction Publique

[2]DINSIC : Direction Interministérielle du Numérique et du Système d’Information et de Communication de l’État

[3]CISIRH : Centre Interministériel de Services Informatiques relatifs aux Ressources Humaines