Le petit « Palantir » à la française… veut grandir vite

Le Français Sinequa, leader sur le marché des logiciels de Search et d’analyse du Big Data en temps réel, croît très rapidement, notamment à l’international… De quoi réfléchir à une nouvelle étape de son développement.

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Fabrice de Salaberry, directeur général de Sinequa

Nicolas Dufourcq, patron de Bpifrance, devrait être satisfait. Lui qui s’interrogeait l’autre soir, à la Garden Party 2017 de TECH in France, sur le fait que le ministère de l’Intérieur n’avait pas trouvé mieux que de signer avec Palantir en matière de cybersécurité… Il dispose peut-être avec Sinequa d’un « petit Palantir » à la française. Ce qu’il appelait de tous ses vœux !

« Ils ont une expérience métier que nous n’avons pas, minimise toutefois Fabrice de Salaberry, Chief Operating Officer de Sinequa. Mais, pour autant, nous sommes sur le même type d’offres, soit la capacité à traiter des milliards de données structurées et non structurées pour de grands comptes dans différents secteurs ». A l’image également de ce que peut faire un IBM Watson…

Le « petit » Français se détache en effet dans le paysage du « search », du fait d’avoir été reconnu plusieurs fois comme « leader du marché » par Forrester Research (rapport the Forrester Wave) ou Gartner dans son Magic Quadrant for Enterprise Search… Mais aussi IDC ou encore Datamation et KM World… Ce qui lui permet de recevoir de nombreux appels d’offres.

« Notre plateforme générique intéresse autant les banques, les assureurs, les bourses que les grands centres de recherche scientifique ou les géants de la pharmacie et de l’industrie, poursuit-il. « 80 % de notre solution est un produit standard, auquel nous adaptons du machine learning selon les besoins métiers avec nos partenaires intégrateurs que sont Atos, Capgemini, CGI, Sword… C’est un positionnement qui marche très bien aujourd’hui, mais peut-être qu’il faudra le faire évoluer à terme », reconnaît-il.

Ainsi, pour le Crédit Agricole ou Groupama, Sinequa traite une masse énorme de données non structurées (courriels, courriers…), qu’il couple à d’autres données structurées cette fois, de façon à offrir aux collaborateurs de leurs multiples agences, une vision 360° de la clientèle. Dans un tout autre domaine, pour le groupe pharmaceutique AstraZeneca, la plateforme permet cette fois « d’aider à la constitution des meilleures équipes de recherche sur un sujet donné », en se basant sur le CV, mais aussi sur les informations issues de publications scientifiques et d’analyses de laboratoire (qui a travaillé sur telle découverte ? qui l’a testée, qui a écrit des thèses sur telle molécule…). Toujours avec cette « vision 360° » qui s’applique aussi bien à un individu, une problématique ou une entité.

« Les données structurées et non structurées s’enrichissent mutuellement pour offrir une vision globale du marché et de la clientèle ». Fabrice de Salaberry

La liste des clients est révélatrice. L’éditeur vient tout récemment de signer avec Alstom pour trouver et analyser notamment les données à partir du système central Alstom Management System (AMS) contenant les documents et les procédures relatifs à l’entreprise. Les 31 000 collaborateurs de l’industriel pourront ainsi accéder à l’information via une interface utilisateur personnalisée en fonction de leur département. Dans cette liste, on trouve également Bristol Myers Squibb (BMS), Celgene, Engie, le ministère de l’Economie, Saint-Gobain, le Nasdaq, le FMI, la Direction du renseignement militaire (DRM), la Commission Européenne, l’IRSN…

Créée il y a quinze ans à Paris et présidée par Alexandre Bilger, Sinequa se développe seulement depuis sept ans dans sa forme actuelle, soit sur le big data et les grands comptes. Depuis deux ans, la société a choisi de partir à l’international où elle compte désormais trois bureaux (Londres, Francfort et New York). Aux Etats-Unis, Sinequa rencontre un franc succès : « C’est là où se trouve la plus haute concentration de sociétés du Global Fortune 2000, notre cœur de cible. »

Une levée de fonds début 2018 et 25 recrutements cette année

« Les Américains sont pragmatiques, analyse le dirigeant. Il cherche une solution et s’il la trouve, il signe rapidement. » Sa méthode ? « Vu notre taille, on leur propose de faire un POC [proof of concept, NDLR] sur 2 ou 3 cas d’usages ».

Aujourd’hui, Sinequa, qui réalise 60 % de ses ventes à l’international, réfléchit sérieusement à s’installer côté Ouest des Etats-Unis. Une décision qui a des conséquences : « Notre histoire américaine nous impose de lever des fonds pour aller vite et se développer massivement là-bas. »

Prévue début 2018, la levée de fonds sera donc « conséquente » et comptera au minimum un investisseur américain pour la crédibilité sur ce marché. Mais il n’exclut pas l’entrée de capitaux français ou BpiFrance… car il se sent totalement conquis par ce vent de « renouveau » qui souffle depuis peu sur la tech française. « Depuis trois mois, il y a un vrai alignement sur le terrain. Tout le monde veut bouger, explique-t-il. Nous sommes contactés régulièrement par des acteurs qui veulent voir comment on pourrait collaborer… On voit une volonté qui va du politique au chef d’entreprise. C’est très engageant à condition que cela aille jusqu’à l’administration… ». Et de citer pour exemple la réelle dynamique qui s’enclenche autour de Thales et sa « Digital Factory », tout juste sélectionnés par Xavier Niel pour être le référent « cyber-sécurité » des start-up de Station F, le plus grand campus de start-up au monde qui ouvrira cet été à Paris.

Cette montée en puissance de Sinequa se couple également avec l’ouverture de 25 postes en R&D, essentiellement en France, « mais pas seulement ». « La moyenne d’âge est de moins de 30 ans chez nous, explique-t-il. Pour développer des algorithmes d’intelligence artificielle et de machine learning, les ingénieurs sur le marché sont tous très jeunes ». Sinequa est d’ailleurs installée près de Saint-Lazare, en plein cœur de Paris pour cette raison : « C’est un quartier qui plaît à la jeune génération. Non loin de Silicon Sentier où tout se passe dans le numérique et des quartiers animés une fois la journée terminée », conclut-il.