Cinq partenaires autour de la création – dont Vivendi – à bord du Cargo

Pour le lancement officiel de sa deuxième vague d’appel à candidatures, Paris&Co avait réuni les cinq « membres fondateurs » de sa plateforme d’innovation « Contenus numériques et industries créatives ». Celle-ci occupe 2500 mètres carrés au sein du Cargo (75019).

_MG_8838 L’appel est ouvert jusqu’au 18 mai. Il couvre « la création, la production et la commercialisation de contenus créatifs de nature culturelle et immatérielle » (e-éducation, jeux vidéo, animation 3D, musique, édition, internet, audiovisuel, radio, presse). Réunis en table-ronde, les représentants de Vivendi, Médiamétrie, BETC, Boulanger et EMLyon ont évoqué les raisons de leur engagement. « Nous avons eu la chance de pouvoir choisir nos partenaires », explique Loïc Dosseur, directeur général adjoint de Paris&Co, qui nous a confié avoir commencé les discussions avec Vivendi il y a plus d’un an.

Les cinq « fondateurs » choisis sont complémentaires : Vivendi, pour les contenus ; Médiamétrie pour l’audience ; BETC pour la publicité ; Boulanger, pour la distribution ; EM Lyon pour l’éducation.

Déjà proche de TF1 et Amaury à travers des programmes « corporate » dédiés, la plate-forme d’innovation pourrait à terme compter une dizaine de grandes entreprises, capable d’assister les start-up chacune dans leur domaine. Hasard ou non, Orange était venu assister à cet événement.

Les cinq « membres fondateurs » vont être mis à contribution dès le processus de sélection en participant aux comités de lectures des dossiers. « Nous allons présélectionner 40 à 50 candidats sur dossier, puis il y aura une session de picth du 27 juin au 1er juillet. Au final, 25 à 30 start-up devrait nous rejoindre », explique Catherine Peyrot, chef de projet Industries numériques et créatives chez Paris&Co. Aujourd’hui, 12 start-up sont présentes dans des locaux d’une capacité d’environ cinquante start-up. Le taux de remplissage devrait donc atteindre 90 % en septembre. « Il faut toujours garder une marge pour s’adapter si certaines start-up ont besoin de plus d’espace que prévu. On se réserve aussi la possibilité d’intégrer au fil de l’eau des start-up particulièrement intéressantes », poursuit-elle.

Une première pour Vivendi

Vivendi, dont c’est le premier accord avec un incubateur extérieur, était représenté par sa directrice RSE, Pascale Thumerelle. Son message ? La dimension sociale fera aussi partie des critères lors de la sélection des start-up. « Nous pensons qu’il est de notre responsabilité d’éviter une forme de marée noire des esprits en encourageant l’émergence de contenus innovants, certes, mais responsables », a expliqué la dirigeante, évoquant l’entrepreneuriat féminin et la diversité des contenus comme priorités.

Le groupe de médias n’en oublie pas pour autant « l’efficacité économique » et espère bien rester à la pointe de l’innovation dans les contenus grâce à ce partenariat avec Le Cargo, « amené à devenir, la Villa Médicis du numérique », selon Pascale Thumerelle.

Dernier exemple en date : l’annonce lors du salon MIPTV du lancement de Studio+ qui va produire des séries courtes « Mobile first, Mobile only » : 60 séries en développement dont 25 seront lancées dès la rentrée prochaine, dans 20 pays et 6 langues, au rythme de 1 série par semaine. Il en faudra sans doute plus pour « sauver la culture » (ndlr : c’était le thème du débat de cette table-ronde animée par Les Echos), mais c’est la preuve que Vivendi s’adapte à cette nouvelle donne.

« L’internet, c’est mobile first ! En 2015, la consultation sur les écrans mobiles est passée durablement devant les écrans fixes », rappelait en préambule des débats Charles Juster, directeur de la Communication chez Médiamétrie qui affirme la nécessité d’un équilibre entre l’innovation interne et l’ouverture aux start-up : « Nous avons la conviction que nos simple ressources ne suffisent pas. Nous lançons fin avril un service de mesure de la télévision multi-écrans, capable de mesurer aussi le Replay. Nous pouvons aussi, dans notre Data Lab, rapprocher les mesures des panels avec le big data pour obtenir des données plus robustes, plus précises. » Malgré cela, pour continuer à toujours mieux analyser les comportements d’audience, « Nous avons besoin de cette fenêtre ouverte, à la fois sur les nouvelles offres de contenus, mais aussi sur des nouvelles technologies d’identification de ces contenus. »

« Il y a quatre ans, on n’aurait pas pu monter cela ! », Loïc Dosseur, directeur général adjoint Paris&Co.

Même discours du côté de BETC, l’agence publicitaire qui va s’installer prochainement à Pantin. « En accompagnant des start-up, en leur apportant notre savoir-faire de communicants, comme nous le faisons déjà avec notre Start-up Lab et bientôt ici au Cargo, c’est une façon de sourcer l’innovation et de mieux servir nos clients », témoigne Tiphaine Duplessis, codirectrice générale.

Une relation gagnant-gagnant qui semble faire consensus dans cette table-ronde et dans les grands groupes en général, mais qui reste finalement assez récente. « Il y a quatre ans, on n’aurait pas pu monter ça ! », affirme Loïc Dosseur, directeur général adjoint de Paris&Co qui rappelle l’expérience difficile du Labo de l’édition. « Il y a désormais de chaque côté une compréhension plus fine des enjeux. Cette démarche d’innovation ouverte qui fait que chacun porte un regard constructif sur l’activité de l’autre, c’est nouveau. Il y a des équipes qui ont été mis en place. Les directions de l’innovation, ça n’a que 3 ans ! », constate Loïc Dosseur.

Tous les intervenants ont insisté sur l’importance du dialogue et de la collaboration pour éviter les dérives opportunistes, toujours possibles. « Le meilleur moyen c’est l’autocontrôle », explique Loïc Dosseur, qui constate que les grands groupes sont aujourd’hui dans une émulation positive : ils sont fiers de mettre en avant leurs bonnes pratiques. « Avec les start-up, au cœur de tout ça, et nous comme intermédiaire, pour être des forces de rappel. Et puis vous savez, si ça se passe mal, le bad buzz il va très vite. »

De son côté, Boulanger, ouvrira son troisième magasin parisien à deux pas du Cargo, près de la station Rosa Park et envisage un lien fort entre ce magasin et les start-up de l’incubateur. Des réunions, des sessions de formation sont déjà prévues dans les locaux de l’incubateur. « Boulanger, c’est 8000 collaborateurs, au contact quotidien avec les utilisateurs, le fait qu’ils puissent venir ici rencontrer des développeurs de solutions. Ça fait énormément de sens. Nous avons un rôle pédagogique essentiel. Via notre filiale B’Dom, nous sommes d’ailleurs les seuls en France à proposer l’installation et la formation à domicile. » explique Daniel Broche, responsable e-commerce et innovation chez le distributeur. L’intérêt pour les start-up paraît lui aussi évident : « Nous leur offrons un accès gratuit à notre site e-commerce pour leurs produits en précommande ou en lancement. Nous organisons aussi des rencontres consommateurs dans nos magasins pour leur permettre d’adapter leur offre. »

Enfin, dans le domaine de l’éducation, décidément ça bouge à l’EM Lyon ! Nouveau campus à Paris à la rentrée prochaine (ndlr : près de la Gare de Lyon, naturellement) ; rapprochement avec Grenoble Ecole de Management ; et surtout une grande ambition dans le numérique qui explique sa présence ici, au Cargo. « Nous avons signé avec IBM récemment pour révolutionner l’enseignement, c’est ce qu’on appelle la Smarter Business School. On est à l’époque des MOOC, des SPOC, bref de la classe inversée: on apprend à la maison et on met en pratique en classe. Avec IBM, c’est une colonne vertébrale sur laquelle peuvent se greffer des applications développées par des start-up. Nos critères de sélection : l’envie de transformer l’éducation, donc un certain humanisme ; la dimension internationale, nous sommes présents à Shanghai, Casablanca et aux États-Unis ; une solution avancée avec une bonne brique technologique, donc qui soit pas loin de la preuve de concept », explique le directeur de l’incubateur de l’EM Lyon, Michel Coster.

En routard de l’entrepreneuriat, il distille aussi quelques conseils aux candidats en guise de conclusion : « Il faut qu’ils soient capables de faire évoluer leur business model à notre contact. Des porteurs de projets qui seraient arcboutés sur leur projet, de façon égotique, pour nous, c’est une erreur. »