Le Crédit Agricole fait grandir ses collaborateurs en même temps que les technologies

 

Modernisation des architectures, « cloudification » des infrastructures, renforcement de la cyberculture, appropriation de la data et de l’IA… La filière IT du groupe Crédit Agricole a une feuille de route chargée. Pour faire monter en compétences ses 13 000 collaborateurs, elle s’appuie sur sa Digit Academy et des communautés d’experts.

 

Cet entretien est extrait de notre Carnet d’expériences « IA, cloud, cyber… Quelles compétences au cœur de la stratégie des directions informatiques ? »
Découvrez ce carnet et lisez d’autres interviews sur le même thème ici : www.alliancy.fr/carnet-competences-dsi

 

Comment le groupe Crédit Agricole est-il organisé pour former ses équipes IT ?

 

Aurélie Scharff, chef de projets RH, engagement et compétences, LMSI. La filière IT du Crédit Agricole réunit environ 13 000 collaborateurs répartis dans les différentes entités du groupe, notamment Crédit Agricole CIB [Corporate and Investment Bank, NDLR], Crédit Agricole Assurances, CA-GIP [Crédit Agricole Group Infrastructure Platform, NDLR], ainsi que dans les filiales à l’international.
Ces entités sont rassemblées au sein de la direction TEC (Transformation technologique, data et IA), qui porte l’ambition technologique du groupe.
Dans cette direction, la Ligne métier systèmes d’information (LMSI) joue un rôle transverse. Elle est responsable de l’engagement et du développement des compétences de la communauté IT.
Si chaque entité définit sa propre stratégie de formation en fonction de ses enjeux, la LMSI agit comme un facilitateur : elle renforce les actions existantes, propose des solutions complémentaires et veille à la cohérence d’ensemble.

Élise Crispin, manager engagement et compétences – transformation RH. En matière d’outillage, le groupe s’appuie sur la Digit Academy. Cette plateforme de formation digitale comprend des contenus variés issus d’éditeurs tiers, comme Pluralsight et Kokoroe ; et des modules développés, en interne, par les experts du groupe. Il est ainsi possible de personnaliser les parcours de formation et de coller au plus près des attentes du terrain.

 

Quels sont les principaux objectifs de la stratégie actuelle de formation ?

 

Aurélie Scharff. Notre stratégie de formation IT accompagne la transformation en profondeur de notre système d’information, avec une ambition claire : faire évoluer les compétences des collaborateurs au rythme des technologies.
Elle s’articule autour de quatre axes majeurs : la modernisation des architectures et des pratiques, l’accélération de la cloudification, le renforcement de la culture de la cybersécurité à tous les niveaux, et l’appropriation de la data et de l’IA.
Nous nous appuyons sur notre plateforme Digit Academy, enrichie par des communautés d’experts internes, pour proposer des parcours personnalisés et ancrés dans le réel. L’apprentissage devient ainsi un levier de transformation autant qu’un moteur d’engagement.

Véronique Chastrusse, architecte SI. Pour mener à bien cette feuille de route, le groupe s’appuie sur la Digit Academy ainsi que sur des communautés d’experts, comme celle consacrée au cloud, que j’anime. Face à l’évolution croissante des technologies et à leur complexité, le modèle traditionnel de formation ne suffit pas, l’apprentissage doit se faire en continu et par différents moyens, notamment il est important d’avoir des moments de rencontres et d’échanges entre pairs.
Je crois beaucoup à l’expérimentation : labos d’innovation, projets pilotes…, ce sont des espaces d’apprentissage précieux. Par exemple, nous organisons des événements : après un hackathon de type « green code challenge », les participants deviennent des ambassadeurs, et diffusent, dans leurs équipes, de bonnes pratiques en matière de développement frugal et de réduction de l’empreinte environnementale.

 

IA, cloud, cyber... Quelles compétences au cœur de la stratégie des directions informatiques ?

 

Comment la DRH et la DSI travaillent-elles de concert pour définir les programmes de formation ?

 

Aurélie Scharff, chef de projets RH, engagement et compétences, LMSI au Crédit Agricole

Aurélie Scharff. Ce qui nous semble essentiel, c’est la qualité du dialogue entre la DRH et la DSI. Nous avançons ensemble dans une logique de coconstruction, avec une vision partagée des enjeux de transformation et de développement des compétences.
Nous nous appuyons notamment sur le processus des « ressources clés », qui permet d’identifier les expertises critiques à renforcer et les populations stratégiques à accompagner. Ce processus mobilise les managers, les RH de proximité et les directions IT, afin de croiser les besoins opérationnels avec les priorités de transformation du groupe.
De cette collaboration naissent des dispositifs concrets, conçus pour et avec les collaborateurs, afin de répondre à des besoins variés : développement du leadership, valorisation des talents, mobilité apprenante ou encore partage de pratiques.
Ces actions traduisent notre volonté d’accompagner les parcours de manière individualisée, tout en nourrissant une dynamique collective.

 

Comment mesurer l’écart entre les compétences existantes et les compétences attendues ?

 

Aurélie Scharff. Ce « skill gap » est une problématique commune à toutes les organisations. Nous travaillons actuellement à un changement de LXP (learning experience platform) au sein de la Digit Academy. Le nouvel outil permettra de réaliser une cartographie plus fine des compétences. Le salarié déclarera, lui-même, ses compétences, puis son manager les validera et, le cas échéant, en proposera d’autres.
Grâce à l’IA, la nouvelle plateforme personnalisera davantage encore les parcours de formation en proposant des contenus pertinents et adaptés à chaque profil. L’IA aidera également les animateurs de communautés dans leur rôle de curation et d’identification de contenus en leur soumettant des suggestions.

 

Quel est le ratio entre e-learning et formation présentielle ?

 

Aurélie Scharff. Environ deux tiers des formations se tiennent en distanciel et un petit tiers, en présentiel. Cette prédominance de la formation en ligne est due aux contraintes de temps et de mobilité des collaborateurs. Elle résulte aussi de la crise du Covid-19. Pour autant, il convient de travailler sur la complémentarité des formats pour répondre aux besoins de chacun, et encourager une posture d’apprentissage actif et autonome. Classes virtuelles, Mooc, vidéos, capsules de microlearning… Nous proposons une grande variété de modalités pédagogiques.

Élise Crispin. La nouvelle plateforme mettra en place des techniques de gamification. En fonction du nombre d’heures passées à se former, le collaborateur obtiendra un score. Cela permettra de valoriser ses efforts d’autoformation auprès de son manager. Le collaborateur pourra aussi recommander des contenus de formation aux membres de son équipe ou à sa direction.

 

Quelle place accordez-vous au développement des « soft skills » ?

 

Aurélie Scharff. Les compétences techniques sont essentielles, cruciales même, mais elles ne suffisent pas. Dans un monde qui bouge toujours plus vite, et avec l’enchaînement des crises, il convient d’avoir la capacité de s’adapter en permanence, de changer de posture, de travailler différemment. Cette adaptabilité requiert des compétences comportementales, comme la communication, la coopération ou la créativité. La montée en puissance de l’IA exige aussi de développer la pensée critique. Selon moi, la posture fera, demain, à compétences techniques égales, la différence.