Interview de Philippe Tavernier (Syntec Numérique) – un soutien nécessaire

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« Il faudrait des sortes de “cloud shop” avec des vendeurs qui montrent » Philippe tavernier, coprésident du Comité infrastructure* du Syntec Numérique.

Peu d’entreprises de taille intermédiaire sont prêtes au changement de culture que suppose l’utilisation du cloud computing. Mais, à leur décharge, l’offre peut paraître confuse et le vocabulaire employé difficile à appréhender, reconnaît Philippe Tavernier, coprésident du Comité Infrastructure* du Syntec Numérique.

Alliancy, le mag. Comment voyez-vous la manière dont s’opère la transformation numérique des entreprises de taille intermédiaire (ETI) en France ?

Philippe Tavernier. Dans leur grande majorité, elles sont en retard au regard de ce qui se passe sur la scène internationale. Leur pratique est à l’image de l’économie française qui manque d’offensive dans la compétition mondiale. En développant les réseaux sociaux, le commerce en ligne et la communication avec les partenaires, les nouveaux outils du numérique génèrent du business. Mais, les PME et les ETI françaises sont trop centrées sur elles-mêmes. Peu d’entre elles sont prêtes au changement de culture que suppose l’utilisation de tels outils IT.

D’où vient ce manque d’appétence pour l’informatique en nuage ?

Beaucoup d’ETI sont des entreprises qui vivent encore dans le XXe siècle alors que l’économie mondiale en est au XXIe. La manière de créer de la valeur a beaucoup changé. Tout va très vite. Il faut savoir faire preuve d’agilité et de réactivité. L’organisation et les moyens d’échange des entreprises françaises continuent de fonctionner sur d’anciens modèles, non adaptés au monde d’aujourd’hui. A leur décharge, l’offre cloud peut paraître confuse, et le vocabulaire employé difficile à appréhender par les non-initiés. Il manque d’accompagnement pour aider ces entreprises à comprendre de quoi il retourne. D’autant que leurs fournisseurs d’équipements informatiques ont tout intérêt à les convaincre de continuer comme avant. Et, souvent, leurs propres informaticiens ont peur du changement qu’entraîne l’usage du cloud.

ScreenHunter_59 Nov. 21 11.26Quelles solutions préconisez-vous ?

Les entreprises de taille intermédiaire et les PME ont besoin d’un accompagnement de proximité. Ces sociétés font confiance aux acteurs qui ont, comme elles, un fort ancrage territorial. Il faudrait des sortes de cloud shop avec des vendeurs qui montrent l’intérêt des fonctionnalités du cloud par des démonstrations concrètes. D’ailleurs, les ETI qui vont vers le cloud le font souvent sur recommandation d’un acteur de leur entourage qui a su les rassurer. Comme ces entreprises ont fait confiance à leur expert-comptable, à leur chambre de commerce et d’industrie, ou à une entreprise de services numérique (ESN) qui leur a été recommandée.

Quels arguments utiliseriez-vous pour les convaincre d’y aller ?

J’en ai plusieurs. Tout d’abord, je ne connais aucune entreprise ayant basculé dans le cloud qui désire faire machine arrière. Ensuite, les entreprises de taille intermédiaire qui n’y vont pas auront du mal à attirer les jeunes talents, ceux qui sont agiles, qui zappent, qui veulent tout immédiatement et prennent plaisir dans l’innovation technologique. Enfin, il y a urgence ! La compétition économique est très rude. Les usages de consommation changent. Pour continuer à exister face à une concurrence devenue internationale même sur son propre territoire, les PME et les ETI doivent grossir. Elles y sont contraintes. Le cloud facilite la croissance interne et externe. Plus besoin de se soucier de la compatibilité ou non des systèmes informatiques de l’entreprise rachetée.

* Le Comité Infrastructures Numériques et Services réunit les entreprises du secteur, qui représentent 80 % de ce marché en France : constructeurs, éditeurs de logiciels, intégrateurs, hébergeurs, opérateurs…