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La DSI de la Matmut ambitionne de créer une note carbone des projets métiers

Le Chief Technology Officer (CTO) de l’assureur, Sébastien Marie, revient sur les actions liées au Green IT et, plus globalement, au numérique responsable, qu’il entreprend depuis des années au sein de son entreprise. 

Sébastien Marie matmut

Sébastien Marie, Chief Technology Officer (CTO) de la Matmut

Quelle place occupe aujourd’hui le numérique responsable au sein de la Matmut ?

Une place de plus en plus grande. Nous avons en effet mené ces dernières années de nombreuses actions pour réduire l’impact environnemental de notre IT. Le domaine d’intervention est vaste : audits et préconisations sur l’optimisation des PUE (Power Usage Effectiveness) dans les datacenters, densification des serveurs pour limiter la commande de matériel, économie circulaire au niveau des postes de travail… Nous avons même nommé, dans notre organisation IT, un correspondant RSE. Le numérique responsable apparaît ainsi pleinement dans notre organigramme.

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Concernant les postes de travail, qu’avez-vous mis en place ?

Il faut tout d’abord préciser que le cycle de vie de notre matériel est très étendu. Cela signifie que nous conservons les postes de travail bien après leur amortissement comptable. Nous essayons d’étirer leur durée de vie au maximum.

Lorsque la crise sanitaire est survenue, nous avons été pris de plein fouet comme tout le monde. Nous avions assez peu de mobilité managée, notre parc était encore très fixe, il y avait peu d’ordinateurs portables. Nous avons donc engagé un remplacement complet de notre parc et avons décidé d’offrir une seconde vie à l’ensemble de nos équipements. Pour cela, nous avons doté certaines écoles et mairies, mais aussi certains collèges de la Seine-Maritime de plusieurs milliers d’ordinateurs.

Nous sommes également partenaires de l’agence Terra-Num à laquelle nous donnons régulièrement des ordinateurs qui permettent de former des personnes en reconversion professionnelle à la maintenance informatique ou d’équiper des familles souffrant de fracture numérique.

Comptez-vous étendre ce dispositif à d’autres matériels ?

Oui, nous sommes en train d’étendre ce dispositif aux imprimantes laser et aux cartouches. Nous sommes partenaires de l’entreprise Greenmatic qui prend en charge le recyclage de ces équipements. Quelques centaines d’imprimantes vont pouvoir bénéficier de ce programme cette année.

Quant à notre flotte mobile, nous sommes dans le même esprit : nous étendons sa durée de vie, avec un remplacement des équipements tous les cinq ans en moyenne au lieu de deux ans. Nous sommes par ailleurs en train de tester les smartphones Fairphone, afin de qualifier leur recevabilité dans notre écosystème. Ces matériels offrent un certain nombre d’avantages sur le caractère durable de leur chaîne de production, mais également sur leur maintien en conditions opérationnelles puisqu’ils sont modulaires, donc facilement réparables.

Vous avez évoqué à l’instant les imprimantes. Avez-vous entrepris d’autres actions les concernant ?

Oui, nous sommes dans une démarche de rationalisation des impressions. Presque toutes les imprimantes individuelles ont été supprimées, au profit d’imprimantes départementales. Quant à l’impression des courriers à destination des sociétaires, nous sommes dans une logique de centralisation avec la création de chaînes d’impression industrielles. Plus aucun courrier de ce type n’est édité en local sur les postes de travail des collaborateurs. Nous utilisons des imprimantes industrielles dont la consommation est rationalisée.

L’année dernière, ces chaînes éditiques ont été complètement rénovées, dans une démarche orientée « green ». Nous sommes ainsi passés d’une impression en laser noir et blanc à une impression jet d’encre. Celle-ci est plus économe en consommation électrique et en dégagement de chaleur. Par ailleurs, nous sommes passés d’une impression sur du pré-imprimé – qui nous obligeait à commander des rouleaux générant beaucoup de gâchis de papier – à une impression sur des bobines blanches, avec moins de gâchis.

Qu’en est-il des datacenters ?

Nous disposons de nos propres datacenters, nous nous reposons assez faiblement sur le cloud. C’est un vrai choix et la maîtrise de l’empreinte carbone de cette infrastructure on premise est un véritable enjeu pour nous, notamment au regard des évolutions réglementaires à venir, comme la CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive).

Nos centres de données font l’objet d’investissements réguliers. L’année dernière, par exemple, nous avons fait réaliser un audit par un organisme tiers afin d’optimiser notre PUE. Notre objectif est de gagner 0,17 point sur notre PUE. En parallèle de cela, nous avons changé nos onduleurs afin de ne plus avoir à redresser systématiquement le courant. Cela génère d’importantes économies de consommation électrique.

Avez-vous également agi sur l’intérieur des datacenters ?

Il y a trois ans, nous avons engagé d’importants investissements dans la réfection de nos datacenters, pour améliorer le stockage, le « compute » et le réseau. Nous les avons rénovés en tenant compte de certains critères, comme le ratio consommation électrique / puissance.

L’impact sur le stockage a été très important : nous avons ainsi remplacé deux baies par 4 U, pour une consommation électrique 2,5 fois plus faible. Le coût carbone au téraoctet est aujourd’hui extrêmement agressif par rapport à ce qu’il était il y a trois ans. Nous avons par la suite étendu cet exercice aux baies qui assurent le back-up et sommes arrivés aux mêmes ratios.

Sur le volet sensibilisation, qu’avez-vous entrepris ?

Un de nos principaux axes de sensibilisation concerne les métiers. Nous projetons de leur expliquer que tel ou tel de leurs projets peut avoir une incidence sur le datacenter, ce qui se traduit par une empreinte carbone. Nous communiquerons donc auprès des métiers sur le ROI financier de leurs projets, mais aussi sur leur empreinte carbone. Notre objectif est de communiquer progressivement sur une note carbone des projets. Nous sommes en train de fiabiliser le processus et espérons pouvoir lancer une première implémentation cette année.

Par ailleurs, nous organisons des webinaires en interne et participons à des événements externes comme le Digital Cleanup Day afin de sensibiliser les collaborateurs à tous ces enjeux.