[Interview] Les espaces de travail conçus aujourd’hui par les DSI sont-ils prêts pour les usages de demain ?

>> Cet article est issu du carnet à télécharger « DRH, DSI et Digital Workspace Vol. 2 »

La transformation du digital workspace est une course de fond, qui implique une adaptation permanente aux nouveautés en termes d’usages et de technologies.  Quelles sont les tendances à suivre absolument pour les mois à venir ? Les réponses de Fabrice Mazars, consultant stratégie IT de VMware France.

Fabrice Mazars, consultant stratégie IT de VMware France

Fabrice Mazars, consultant stratégie IT de VMware France

A quel point les environnements numériques de travail que sont en train de mettre en place les entreprises vont-ils devoir s’adapter à de nouveaux usages à l’avenir ?

Le principe clé à garder en tête sur un sujet comme le digital workspace, c’est que l’incertitude règne. Il suffit de regarder en arrière, pour constater à quel point en quelques années seulement notre façon de travailler à profondément changée. Nos fonctionnements individuels ont évolué, nos outils ont énormément changé, et plus globalement l’organisation du travail dans l’entreprise s’est également métamorphosée.

Et rares étaient ceux qui, il y a 2, 5 ou 10ans, avaient parfaitement anticipé ces transformations. Alors, il faut rester humble : personne n’est vraiment certain de ce qui va se passer dans les années à venir. On sait cependant qu’il y a plusieurs sujets à observer de près, car leurs impacts sont visibles dès aujourd’hui : le changement des générations et de leurs attentes vis-à-vis du travail, les nouvelles habitudes prises à partir des crises, qu’elles soient sanitaires ou autres, les nouvelles possibilités en termes d’interface offertes par la technologie…

A lire aussi : [Interview] Generali veut passer de la digital workspace au smartworking

En parallèle, il y a une autre constante : le fait que la digitalisation des processus des entreprises est bien engagée partout maintenant. Mais on constate que parfois, souvent, ces processus ne sont pas complètement « amenés jusqu’à l’utilisateur ». Plus les processus sont digitalisés, plus l’espace de travail digital devient critique. La question de l’adaptation tient donc en grande partie celle de l’interface homme-machine. Drones, lunettes connectées, nouveaux écrans… nous savons tous que ces outils vont se diffuser. Le défi est de faire en sorte que l’espace de travail conçu aujourd’hui soit prêt à recevoir tous les nouveaux usages de demain, que ce soit en termes de nouveaux périphériques, d’applications ou de processus. Cela passe par une organisation agile et pluridisciplinaire dans l’entreprise d’une part, et par une plateforme Digital Workspace ouverte, évolutive et robuste d’autre part.

Pour autant, cet environnement de travail ne sera pas « seulement » numérique…

C’est clairement l’autre point à surveiller dans les mois à venir. De quelle façon mieux réunir le physique et le digital ? Il y a plusieurs aspects au sujet bien sûr, avec la réglementation d’un côté et la pratique de l’autre. Mais la cohabitation entre les deux environnements va être vraiment déterminante. Il y a en effet de nombreux points pour lequel le physique pèse fortement sur le digital, comme l’identification des utilisateurs, l’efficacité des réunions, l’utilisation de l’intelligence collective …

Autant de sujets qui ont un impact fort sur l’expérience des collaborateurs. Depuis quelques mois, les outils s’améliorent en la matière pour proposer des interactions plus globales et de plus en plus de fonctionnalités adaptées au « phygital », que ce soit pour mieux animer les échanges avec des post-it virtuels ou pour « projeter » une table en 3D par exemple.

Mais le vrai point d’attention reste la capacité des collaborateurs eux-mêmes à accepter cette mixité. Ces nouveaux cas d’usages hybrides nécessiteront du coaching pour diffuser et généraliser les bons réflexes. Les jeunes générations vont être tout particulièrement attentives à cette posture de l’entreprise. Des ambassadeurs doivent émerger pour porter ces évolutions culturelles, avec une forme de curiosité numérique et d’envie de tester des usages innovants.

Avec une plateforme de digital workspace ouverte, on peut se permettre d’expérimenter de la sorte, car on sort de la logique qui veut imposer un même outil et un même usage à tout le monde quelle que soit la situation. La cohérence viendra des processus d’approbation des usages, des applications, voire de procédés de refacturation plutôt que d’essayer de tout déterminer a priori. De toute façon les utilisateurs vont rentrer de plus en plus dans une logique de bring your own application (Byoa), tout comme on a connu le bring your own device (Byod). L’hétérogénéité va devenir la règle.

Cela revient-il à prévoir des investissements toujours plus importants ?

Nos clients les plus avancés ont constaté des budgets légèrement en baisse tout en proposant des services à valeur ajoutée pour l’entreprise et les collaborateurs. Cette baisse de coût est notamment obtenue grâce à la simplification des outils et des opérations. En utilisant une gestion moderne, ils ont supprimé une multitude d’outils et de processus qui avaient été accumulés depuis des années. Par ailleurs, ils ont constaté une baisse significative des incidents et des demandes par le biais du « self-service ».

Concernant les bénéfices, ils ont tous constaté une hausse de la productivité des utilisateurs et une amélioration très significative de la satisfaction des utilisateurs. Par ailleurs, leur capacité à innover a été largement accélérée. Ainsi, un projet Digital Workspace, il faut étudier comment celui-ci peut soutenir la stratégie de l’entreprise à la fois sur le coût et les bénéfices.

Peut-on dire que le digital workspace va devenir une évidence dans toutes les entreprises cette année ?

En tout cas le sujet va accaparer une dimension bien plus stratégique. Une autre tendance lourde, c’est en effet l’évolution des attentes et des contraintes sur la gestion de l’équilibre vie professionnelle-personnelle. La législation va continuer à évoluer dans les années à venir sur ces sujets et les entreprises ne pourront pas l’ignorer. Elles vont devoir intégrer intimement ces notions à leurs plans de transformation stratégique. Les nouvelles organisations du travail vont peser sur les business models de demain.

Par ailleurs, le sujet du digital workspace va aussi s’imposer dans l’entreprise en termes de responsabilité sociale et environnementale ; de nombreuses entreprises parviendront à faire de ces enjeux une force. C’est d’ailleurs un facteur d’attraction des talents ; négliger ces aspects en ne les intégrant pas dans la construction de l’espace de travail de demain peut coûter cher, à plus d’un niveau. Et s’il y a quelques années, les DSI pouvaient être intimidés par ces sujets, notamment devant les partenaires sociaux, l’élan actuel et les attentes des employés sont de nature à leur faciliter aujourd’hui le travail.