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Le Pacte productif : un exercice collectif de lucidité !

Le décrochage de l’industrie, la dégradation du commerce extérieur ou le retard dans la course à l’innovation technologique… sont des maux français qu’il faut nommer pour arriver à trouver collectivement de nouvelles solutions pour y remédier. Un message rappelé avec insistance par Bruno Le Maire, ministre de l’Economie la veille d’annonces autour du Pacte productif.

bruno le maire, ministre de l’Economie et des Finances

Bruno Le Maire, ministre de l’Economie et des Finances

Annoncé par le chef de l’Etat le 25 avril dernier, le Pacte productif commencera réellement à prendre forme le 15 octobre, lors d’une présentation à Bercy par Bruno Le Maire et cinq ministres*, des dix grandes orientations choisies. Objectif de ce « pacte » : atteindre le plein emploi d’ici à 2025 et accroître la part de PIB de l’industrie et de l’agriculture pour atteindre 15 % en 2025 et 20 % à horizon 2030…

Toutefois, « avant de définir ces grandes orientations, nous avons fait un état des lieux de la situation économique de la France, commente le ministre de l’Economie Bruno Le Maire, partant des choix économiques qui ont été faits par la France depuis vingt ans et qui expliquent la situation dans laquelle nous sommes… »

Conclusion : La France affiche quelques bons résultats économiques, mais « si on regarde la situation structurelle du pays, le risque est un risque de déclassement productif. Nous sommes en train de perdre notre qualité de nation productive, dans le secteur industriel comme dans le secteur agricole, par défaut d’innovation, de positionnement et de compétences. »

La production industrielle française ne repose, selon le rapport, que sur trois grandes filières : les vins et spiritueux ; le luxe et l’aéronautique… « On ne fait pas une grande production et une grande nation économique uniquement sur la base de trois filières, a-t-il rappelé. Le nombre d’entreprises qui exportent diminue, et 5 % des entreprises pèsent 90 % des exports. »

« C’est aussi la première fois où nous reviendrons sur les raisons de ce risque de déclassement productif. La première raison est que nous ne travaillons pas assez… Le volume global d’heures travaillées en comparaison de nos voisins du G7 et des grands pays de l’OCDE est insuffisant. La richesse relative de la France par rapport aux autres pays du G7 a diminué depuis dix ans… Nous sommes donc déclassés par rapport aux autres. La deuxième raison structurelle est la fiscalité. Nous avons aujourd’hui des impôts de production, qui pénalisent nos entreprises. Ils sont sept fois plus élevés qu’en Allemagne et deux fois plus élevés que la moyenne des pays de la zone euro. » Et de souligner qu’on pourrait imaginer que « les collectivités peuvent avoir un intérêt à percevoir un peu moins d’impôts de production si c’est pour avoir un peu plus d’emplois sur leur territoire… » 

Enfin, « nous devons aller plus dans la formation des compétences que ce qui a déjà été fait depuis le début du quinquennat pour pourvoir les centaines de milliers d’emplois qui aujourd’hui ne sont pas pourvus« , une difficulté là aussi fréquemment pointée du doigt par les chefs d’entreprise. Et de revenir sur le lien également insuffisant entre la recherche publique et le développement industriel. « On doit aller plus loin dans l’innovation », a-t-il précisé.

Ce diagnostic est fait pour éclairer le débat public pour faire des choix collectifs éclairés en matière de production, qui doit également être respectueuse de l’environnement… (zéro carbone en 2050 !).

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Dans les semaines à venir, discuté le plus largement possible avec toutes les toutes parties prenantes publiques et privées, le Pacte productif doit aboutir au ciblage de quelques priorités d’avenir. Au même titre que l’Allemagne s’est spécialisée sur l’industrie ; le Royaume-Uni sur la finance et Israël sur l’innovation. L’intérêt est demain de concentrer les dispositifs de soutien sur les secteurs à forte valeur ajoutée et à forte concurrence internationale.

Un pacte passé avec les chefs d’entreprises

 Un travail d’identification de ces filières porteuses d’avenir à l’horizon 2025/2030 a été confié au cabinet Roland Berger. Les résultats seront soumis aux élus locaux, syndicats, patronat… durant les six mois à venir environ. « On  n’y arrivera que collectivement. Nous ne déciderons pas seuls… Cette méthode inclura également une consultation des Français pour qu’ils puissent dire ce qu’ils pensent des grandes orientations fixées, puis viendra le temps des décisions pour transformer l’économie du pays », a précisé le ministre, qui ne veut plus garder le même modèle et encore moins « perdre 100 usines par an… ».

Les impôts de production concernent la cotisation foncière des entreprises (CFE), la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S), la taxe sur le foncier bâti, la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE)… Soit, au total, plus de 70 milliards d’euros par an.

Mettre ainsi les entreprises face à leurs responsabilités pour répondre aux nouvelles attentes sociétales, devient indispensable, selon Bruno Le Maire, pour qui « ce qui a été fait n’est plus à la hauteur des enjeux, ni des attentes environnementales de nos compatriotes. On doit porter aujourd’hui nos efforts sur ce qu’il reste à faire. Les entreprises doivent se digitaliser plus, innover plus… Le monde de la recherche publique aussi doit se poser cette question et se rapprocher davantage du monde de la production, du monde du développement industriel… Personne n’a la solution. Il faut faire des choix collectifs », conclut-il.

En savoir plus sur le Pacte productif.

* Outre Bruno Le Maire, ministre de l’Economie, y travaillent également les ministres du Travail Muriel Pénicaud, de la Transition écologique Elisabeth Borne, de l’Enseignement supérieur Frédérique Vidal, ainsi que les secrétaires d’Etat Agnès Pannier-Runacher (économie) et Cédric O (numérique).