Rentrée 2025 : l’urgence de sortir de la fatalité politique et numérique

 

Sauf retournement de situation dans les 10 prochains jours, la France devrait de nouveau perdre un gouvernement le 8 septembre prochain. Le « vote de confiance » appelé par le premier ministre François Bayrou, alors que son équipe ne peut s’appuyer sur aucune majorité parlementaire nette, ressemble à une énième manœuvre politique hasardeuse dans une France ingouvernable depuis la dissolution de l’Assemblée nationale à l’été 2024. Réminiscence de l’an passé, la rentrée se place ainsi sous le signe de l’instabilité et de l’incertitude, là où les entreprises n’aspirent au contraire qu’à avoir de la visibilité sur l’avenir et à de la continuité réglementaire… Deux éléments, ô combien essentiels, pour pouvoir mener leurs propres transformations business et technologiques critiques. Et ce trou d’air, qui va provoquer un vrai problème d’incarnation et de légitimité de la parole gouvernementale sur les nombreux chantiers du numérique, arrive au moment où le bras de fer entre l’Europe et les Etats-Unis se renforce. Les récentes déclarations de Donald Trump concernant les « discriminations » dont serait victime la tech américaine donnent envie de sourire au regard de sa domination dans notre économie, malheureusement, c’est un signe qui ne trompe pas : la lutte contre de telles dépendances technologiques et pour la construction d’une Europe technologique ne se fera pas paisiblement.

 

Faiblesse exploitable

 

Alors certes, l’Union Européenne n’a pas tardé pour réagir et mettre en évidence son « droit souverain » à réglementer la tech comme tout autre secteur. Mais la parole européenne est ressortie affaiblie de la peu flatteuse séquence de négociation estivale avec l’administration américaine concernant les droits de douanes. Malgré les dénégations de la Commission européenne, l’accord trouvé pendant l’été a une nouvelle fois prouvé (si besoin était) le caractère asymétrique de la relation transatlantique : craignant pour sa sécurité, l’UE s’est couchée face aux exigences commerciales de son partenaire, sans ne rien vraiment obtenir d’autres en retour que l’espoir vacillant d’un prolongement du soutien face à la crise ukrainienne. Le chaos sur la scène politique intérieure hexagonale vient fragiliser un peu plus l’édifice : quand la France (au même titre que l’Allemagne) est affaiblie, non seulement sa parole sur la scène européenne et internationale devient un peu plus inaudible encore, mais c’est également l’Union européenne tout entière qui en pâtit. Dans les yeux du « bully » Trump, une telle faiblesse appellera forcément à être exploitée, comme l’atteste déjà le fait que l’ambassadeur des États-Unis en France décide de ne pas se présenter en personne à une convocation du Quai d’Orsay.

 

Ne pas attendre l’État

 

Qu’Emmanuel Macron nomme un nouveau premier ministre pour monter à son tour sur l’échafaud gouvernemental ou bien qu’il se résolve à une nouvelle dissolution de l’Assemblée, le résultat immédiat sera le même : beaucoup de temps perdu. Car l’incertitude provoque la paralysie et ne peut donner envie aux entrepreneurs, aux talents, aux étudiants, de se projeter avec confiance dans l’avenir. Comment espérer que la pépite Mistral ne regarde pas vers l’autre côté de l’Atlantique (et le miroir aux alouettes d’un rachat par Apple), quand de ce côté-ci il n’y a que l’incapacité à fédérer autour du budget national… Et que dire de l’espoir d’un projet de société qui intègrerait le numérique de façon convaincante et équilibrée ? D’un point de vue politique, la voie jusqu’aux élections présidentielles de 2027 ressemble à un long chemin de croix. Les entreprises ne peuvent pas attendre jusque-là. Et elles ne peuvent donc pas non plus attendre l’État pour agir sur leurs dépendances et leur propre autonomie stratégique numérique. C’est pour cela que le 2 juillet dernier, Alliancy organisait un premier Independence Tech Day. Et c’est aussi afin d’aider les organisations à trouver leur propre voie pour agir que les travaux de notre Do Tank « Dépendances technologiques et libertés d’action » continuent en cette rentrée, malgré les errances politiques.