IA, modernisation du système d’information, cybersécurité…, l’IT de Roche doit relever un grand nombre de défis techniques. Directrice des technologies de l’information, Jacqueline Tejeda Carnot explique quels dispositifs le groupe pharmaceutique met en place pour acquérir les expertises nécessaires.
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Pouvez-vous présenter Roche et la direction des technologies de l’information ?

Depuis plus de cent vingt-cinq ans, Roche développe des traitements dans les domaines de l’oncologie, de la neurologie, de l’ophtalmologie ou des maladies chroniques. En France, le laboratoire exerce deux activités. Basée à Boulogne-Billancourt (92), Roche Pharma commercialise des médicaments innovants. Installée à Meylan (38), près de Grenoble, Roche Diagnostics se consacre à la commercialisation des solutions diagnostiques avancées.
Société suisse siégeant à Bâle, Roche est une entreprise internationale présente dans plus de 150 pays. Au sein de la direction des technologies de l’information du groupe Roche, je gère les large markets de la division Pharma, dont sept pays sont dans mon périmètre : le Canada, le Brésil, la France, le Royaume-Uni, l’Espagne, l’Allemagne et l’Italie.
À quels défis techniques majeurs êtes-vous confrontée ?
Il est difficile de passer à côté de l’engouement autour de l’IA générative. Si elle offre un grand nombre d’opportunités, il convient de canaliser les efforts et d’encadrer les usages, l’industrie pharmaceutique étant une profession particulièrement réglementée. Ainsi, nous avons développé une instance privative et sécurisée de ChatGPT. RocheChat donne aux collaborateurs la possibilité d’utiliser – sans limitation, mais dans un environnement maîtrisé – l’IA générative pour créer du contenu ou effectuer des traductions. La technologie du RAG [retrieval-augmented generation, NDLR] permet d’enrichir ces modèles à partir des données du groupe.
Notre deuxième priorité, c’est la modernisation des systèmes d’information. Le groupe étant très décentralisé, des outils ont été développés dans chaque pays d’implantation. Ce patrimoine applicatif est aujourd’hui difficile à maintenir et à sécuriser. Pour réduire cette dette technique, un travail de consolidation est engagé au profit de plateformes mondiales. Par exemple, S/4HANA de SAP est déjà déployée au Royaume-Uni, en Espagne et en Allemagne, et le sera bientôt en France.
Par ailleurs, la migration de notre infrastructure on-premise vers le cloud, qui s’est aussi accélérée durant la crise du Covid-19, se poursuit. Le siège social à Paris ne gère plus qu’un serveur en local. Prochainement, notre data warehouse basculera dans le cloud d’AWS [Amazon Web Services, NDLR].
Enfin, dernière priorité, et pas la moindre : la cybersécurité. Si la politique de sécurité est pilotée à un niveau global, il convient de sensibiliser les collaborateurs de chaque filiale afin de s’assurer qu’ils adoptent les bons réflexes dans ce domaine.
Face à ces enjeux, comment vous assurez-vous de disposer des compétences nécessaires ?
Pour acquérir les expertises clés, Roche s’appuie sur le recrutement et la sous-traitance, fait monter en compétences ses collaborateurs ou travaille avec des start-up spécialisées. Le choix de recourir à l’internalisation ou à l’externalisation des compétences dépend de leur « criticité ».
Dans le domaine de l’IA, qui constitue un facteur différenciateur sur notre marché, le groupe recrute des data scientists. De même, nous employons des experts en cybersécurité. À l’inverse, pour développer des applications, ou les mettre hors service, nous faisons appel à des sociétés de services.
Le groupe Roche s’appuie sur un outil de strategic workforce planning (SWP) pour anticiper les compétences dont le laboratoire aura besoin dans les trois années à venir, et pour arbitrer entre le recours au recrutement ou à la prestation. Pour réactualiser cette cartographie, nous réalisons, tous les ans, une revue de compétences.
Il s’agit ensuite de valoriser ces compétences en les centralisant dans des pôles d’expertise. Roche possède six tech centers dans le monde. Chacun d’eux développe une spécialité. Le Canada met l’accent sur l’IA, l’Espagne couvre la partie infrastructure et cloud, l’Inde prend en charge les développements, et le Costa Rica s’occupe du support aux utilisateurs.
Quelle offre de formation proposez-vous à vos collaborateurs ?
Notre offre de formation est particulièrement étendue et fait appel à différentes modalités pédagogiques. À côté de notre learning management system (LMS), qui gère les contenus en e-learning, le catalogue comprend des webinaires, des Mooc, et des formations en face à face. Si les équipes IT apprécient les Mooc, le « business » privilégie la formation présentielle.
Un contrat est passé entre le manager et son collaborateur pour fixer, chaque année, les actions de développement. Ce plan personnalisé comporte des « work packages », des projets de quatre mois où le salarié va développer des compétences transversales – dans le marketing, par exemple. Les « gigs » permettent, eux, de développer une compétence particulière, comme l’IA. Ce dispositif peut conduire un employé à travailler dans une autre équipe.
En ce qui concerne le développement des compétences comportementales (soft skills), nous proposons des formations à l’anglais, à la communication ou au management interculturel. Pour devenir une organisation apprenante et performante, le groupe développe également une culture du leadership et du feedback selon les préceptes de Leadership Circle, outil d’évaluation à 360°, et du VACC (visionary, architect, catalyst and coach) leadership framework.
Selon vous, que peut apporter l’IA à la formation ?
Roche commence à expérimenter l’IA pour générer des contenus de formation. Il sera aussi possible, dans l’avenir, d’utiliser un chatbot pour entraîner nos employés qui doivent passer un bac pharmaceutique. Il s’agit d’une obligation légale pour les métiers qui font la promotion des médicaments.
Un autre cas d’usage pourrait être la personnalisation des parcours de formation. Notre offre est large et pertinente, mais il manque un système de recommandation qui pourrait « pousser » des formations en fonction du profil de l’apprenant ou de ses attentes.
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