Inria pour s’affirmer dans le numérique

L’Institut national de recherche en sciences et technologies du numérique, en présentant son nouveau « Contrat d’objectifs et de performance » signé avec l’Etat d’ici à 2023, doit permettre à la France de garder son autonomie stratégique dans un monde de plus en plus numérique…

Hier soir, Bruno Sportisse, PDG d’Inria et Cédric O, Secrétaire d’Etat chargé du Numérique, sur la scène de la Gaîté Lyrique, en présence également dans la salle de Frédérique Vidal, ministre de l'Enseignement supérieur, de la Recherche et de l'Innovation.

Hier soir, Bruno Sportisse, PDG d’Inria et Cédric O, Secrétaire d’Etat chargé du Numérique, sur la scène de la Gaîté Lyrique, en présence également dans la salle de Frédérique Vidal, ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation.

Hier soir, à Paris, avait lieu le lancement officiel du projet « Ambition Inria 2023 » pour les trois ans à venir, en présence de Frédérique Vidal, ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation et de Cédric O, secrétaire d’état auprès du ministre de l’Economie et des Finances et du ministre de l’Action et des comptes publics, chargé du numérique. Tout l’écosystème académique était présent, tout comme de nombreux jeunes entrepreneurs et industriels.

La soirée s’est achevée par la signature du COP, le « contrat d’objectifs et de performance » (COP) d’Inria avec l’Etat pour la période 2019-2023. « Le COP réaffirme notre rôle comme un bras armé de l’Etat pour la souveraineté numérique, par la recherche et l’innovation, a déclaré Bruno Sportisse, PDG de cet institut national de recherche en sciences et technologies du numérique, reconnu dans le monde entier. Notre projet repose sur la confiance de tous les acteurs impliqués, qu’ils soient internes ou externes, et sur leur courage pour mener à bien les transformations que nous initions et que dictent les circonstances de l’accélération numérique. »

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De fait, alors que « le logiciel dévore le monde », la France doit construire les conditions de sa souveraineté numérique pour garder son autonomie stratégique. La volonté d’Inria est donc de répondre à cet enjeu par la recherche et l’innovation. Avec plusieurs objectifs :

  • Accélérer la construction d’un leadership scientifique, technologique et industriel, dans et par le numérique, de la France dans une dynamique européenne.
  • Attirer les talents et faire rayonner la France dans le numérique.
  • Avoir un impact économique dans les territoires, avec les entreprises du tissu industriel engagées dans la transformation digitale et la création de startups technologiques.
  • Accompagner le développement des grandes universités de recherche.
  • Avoir de l’audace dans les choix scientifiques et par le pari de l’innovation.
  • Prendre des risques, faire bouger les lignes, expérimenter de nouvelles organisations, être créatif au service des grandes politiques publiques.

« Nous n’aborderons aucun des défis de notre époque sans des connaissances et des technologies nouvelles, a de son côté déclaré Frédérique Vidal. Outre les dispositifs pour encourager les nouvelles initiatives scientifiques, une priorité forte a été donnée à la création d’entreprises, notamment en facilitant les transferts technologiques et en soutenant l’émergence de start-up. »

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La soirée s’est poursuivi sur le retour plus en détails des quatre axes stratégiques que se fixe l’institut, à commencer par « l’impact scientifique », en accélérant la construction d’un leadership scientifique et technologique de la France, dans une dynamique européenne. Ses priorités scientifiques tournent à la fois dans le cœur du numérique, dans la sécurité numérique, dans l’intelligence artificielle, dans l’informatique quantique, et pour répondre aux grands défis de la société où le numérique joue un rôle clé (de la médecine personnalisée à l’agriculture de précision, en passant par la réduction de l’empreinte énergétique du numérique).

Dans ce cadre, Inria renforce son modèle organisationnel unique, celui d’équipes-projets avec des feuilles de route de recherche et d’innovation, agiles et focalisées, propices à la prise de risque, à l’interdisciplinarité et au développement logiciel, engagées dans des partenariats, et le met à disposition de ses partenaires, grandes universités de recherche ou organismes (CNRS, CEA, INRAE, INSERM, et demain également l’IFPEN). A ce sujet, Inria se donne de plus pour ambition d’avoir en 2023 30 % des responsables d’équipes-projets qui seront des femmes (contre 13 % aujourd’hui).

Sa politique scientifique s’inscrit également dans la construction de l’espace européen de recherche et d’innovation, en s’impliquant dans les programmes communautaires comme Horizon Europe, Digital Europe, EIT, EIC ; ou la construction de partenariats bilatéraux stratégiques, notamment avec l’Allemagne (DFKI sur l’intelligence artificielle par exemple).

Emmanuel Baccelli par exemple, chargé de recherche à Inria Saclay et professeur affilié à la Freie Universitat Berlin, est revenu sur le projet franco-allemand RIOT-fp, dont l’objectif est de mettre au point pour les objets connectés une plateforme logicielle embarquée. « RIOT se veut l’équivalent de Linux pour n’importe quel type d’objet connecté qui fonctionne sur microcontrôleurs, donc avec une puissance de calcul bien moindre et un millionième de la mémoire, comparé à des microprocesseurs », a expliqué le chercheur, coordinateur du projet. Face à Amazon qui vient de racheter un projet concurrent de RIOT, on voit là que l’enjeu de taille. « Notre modèle open source est un gage de pérennité d’un bien commun, constamment amélioré par ses contributeurs : des universitaires, des industriels et d’autres utilisateurs tels les ‘makers’ », commente Emmanuel Baccelli. Dans cette optique, Inria a récemment lancé un projet d’envergure (Défi Inria) destiné à soutenir les développements de RIOT par plusieurs de ses équipes-projets (EVA, GRACE, PROSECCO, TEA et TRIBE) et à la Freie Universität de Berlin.

100 projets de start-up par an dès 2023

Deuxième axe : avoir un « impact économique » dans les territoires. Inria fait donc le choix de donner la priorité aux entreprises qui créent des emplois en France, à travers des partenariats bilatéraux et des équipes-projets conjointes. Avec Bpifrance, l’institut cible 100 projets de création de start-up « Deeptech » par an en 2023. Au cœur de ce dispositif, la création du Inria Startup Studio pour le codesign des projets entrepreneuriaux adossés à la recherche publique dans le numérique, un dispositif ancré dans les grands campus universitaires de recherche sur lesquels Inria est présent. Par ailleurs, l’institut souhaite donner l’envie aux jeunes, et notamment aux jeunes lycéennes, de faire des sciences et de la technologie, dans le cadre du projet « 1 scientifique/1 classe : Chiche ! », avec ses partenaires et le ministère de l’Education Nationale et de la Jeunesse. Pour être également plus présent sur les territoires, un centre Inria sera créé à Lyon et les antennes de Montpellier et Strasbourg seront renforcées.

Margot Corréard, cofondatrice de DiagRAMS Technologies, qui développe un logiciel dédié à la maintenance prédictive industrielle, issu des travaux de recherche de l’équipe Modal. Ceci pour répondre à la pénurie des techniciens de maintenance dans ce secteur et l’urgence de trouver des solutions de supervision pour optimiser les interventions… « Grâce à sa solution de surveillance de l’ensemble des équipements, il devient possible d’analyser tous types de données de production et de maintenance sans avoir besoin de rajouter de nouveaux capteurs », a expliqué la jeune femme qui fut en charge du transfert de technologies chez Inria pendant plusieurs années. La start-up valorise ensuite les données existantes et accompagne ses clients dans leur stratégie de maintenance prédictive. Créée en juillet 2019 à Lille, DiagRAMS Technologies emploie aujourd’hui six personnes.

Ensuite, Hervé Guillou, PDG de NavalGroup, a expliqué l’intérêt du partenariat poussé signé avec Inria le 9 décembre dernier : « Maintenir la supériorité de notre Marine et garder notre leadership dans les grands systèmes navals de défense. Nous avons besoin d’accélérer l’innovation face à la Chine et la Russie. » Trois métiers sont visés avec ce partenariat, l’intelligence artificielle, la cyber-sécurité et le traitement du signal. « Nous allons créer des équipes communes de recherche pour répondre à nos besoins industriels et aussi attirer les jeunes talents, a-t-il conclu. Mais ce n’est pas un système fermé. On veut aussi inciter des start-up à se joindre à nous et intégrer leurs technologies à nos grands systèmes. »