Quels sont les défis cachés de la relation client/usager ? Des décideurs nous répondent

La rédaction d’Alliancy, en collaboration avec plusieurs directeurs de l’expérience client, explore ce sujet en 2021 à travers son programme Numérique en Pratique. Pour échanger sur les enjeux et les bonnes pratiques, plusieurs comités éditoriaux se sont tenus ces dernières semaines avec des responsables en poste dans des entreprises variées : voici quelques extraits de ces échanges, dont les enseignements seront synthétisés dans un guide à paraître cet été.

 

Depuis une décennie les clients ou usagers ont été mis au centre des préoccupations des organisations. Customer Centricity, ultra-personnalisation, expérience client supérieure... : sur fond de contact omnicanal, le numérique apporterait le « plus » qui manquait à leur satisfaction. Alors, peut-on dire que la partie est gagnée ? Malheureusement non, car si entrer en contact n’a jamais été aussi facile, « parler » à une structure ne suffit pas. Derrière chaque demande, réclamation, plainte ou critique constructive, c’est la capacité à apporter une réponse opérationnelle satisfaisante, à la fois rapide et efficace, qui fait la différence en matière d’expérience client. Un sujet d’autant plus important dans le contexte de crise et de travail à distance que nous traversons.

À l’occasion de notre nouvelle édition du programme éditorial Alliancy « Numérique en Pratique », en partenariat avec Servicenow, Alliancy a échangé et donné la parole à des décideurs, Directeur de l’expérience client, directeur de la relation client, directeurs marketing ou de production, pour savoir quelles sont les priorités et défis cachés de la relation client en 2021 ?

Virginie Carteron, Directrice marketing digital et expérience clients, Arval - Groupe BNP Paribas

« Le défi est de mesurer le parcours client dans son ensemble, pas seulement un NPS à un instant T. Pour certains métiers, cela peut être très complexe, mais l’enjeu de transversalité de l’expérience client est bien là. En creux, c’est un sujet d’alignement des objectifs et des KPI qui prédomine : souvent, une équipe « expérience client » identifie les irritants mais ce n’est pas elle qui est en contact, en « front » avec le client. Comment rend-t-on accessible ces informations clés ? Et quelles sont les points prioritaires à transmettre ? Tout le monde se dit « client centric » aujourd’hui : mais dans la réalité, il faut beaucoup de courage à une entreprise pour se dire que le NPS ou l’indicateur de satisfaction vont être prioritaires par rapport à des indices de productivité ou à d’autres indicateurs plus traditionnels de l’activité de l’entreprise. »

Frederic Thebault Directeur Service Clients Particuliers et commercial, EDF 

« Au-delà de la technologie, le service client reste une affaire de relation entre personnes. A ce titre, je vois trois défis majeurs : le premier est celui d’incarner au quotidien et par tous les conseillers les fondamentaux, les grands marqueurs de l’expérience client souhaitée par l’entreprise. Le deuxième concerne l’amélioration de l’autonomie des Conseillers client, tant pour saisir la demande, la problématique rencontrée par le client que pour faire preuve d’empathie vis-à-vis de lui.  C’est très structurant et c’est pourquoi nous avons lancé récemment une école interne sur la vente et la relation client qui se concentre dès le départ sur les compétences relationnelles clé : savoir écouter et comprendre, savoir prendre en compte les émotions du client, savoir trouver la solution et personnaliser sa réponse Cela consiste aussi à généraliser ces réflexes chez les managers. C’est pourquoi nos managers suivent eux-mêmes les mêmes modules de formation de l’école interne, avec pour mission de les faire résonner dans leurs équipes. On ne peut parler de symétrie des attentions seulement si on partage le même référentiel et les mêmes marqueurs entre nos clients et nos salariés ! Le troisième défi est de savoir décider, piloter, créer en sachant réconcilier à la fois la taille de notre portefeuille avec plusieurs dizaines de millions de clients et la personnalisation indispensable pour générer une expérience inoubliable pour votre client »

Christophe Carrere, Group Customer Engagement Director, Europcar Mobility Group

« Nous avons les enjeux d’une multinationale au sein de laquelle coexistent des cultures différentes. En la matière, on se rend compte que « l’expérience client » n’a pas toujours le même sens selon les lieux et les personnes. C’est ce qui rend la coordination autour du sujet aussi importante. Nous sommes présents dans 160 pays mais pour 140 d’entre eux, ce sont des entrepreneurs locaux franchisés qui sont à la manœuvre. Nous leur imposons peu de contraintes en tant que franchiseur, mais nous mesurons partout les mêmes KPI pour l’expérience client, en particulier le NPS. Un parti pris technologique peut aider à créer de la convergence, mais d’une part il faut s’assurer que les outils ne sont pas sous-utilisés, ce qui est souvent le cas, et d’autre part, il ne faut pas que ce sujet minore celui qui vise à transférer la culture d’entreprise et la culture client partout, y compris en off-shore où nous opérons nos activités externalisées de relation clients à distance »

Maxime Brun, Directeur Parcours et Expérience Clients, Fnac-Darty

« Quelle  que soit la relation qu’une entreprise développe avec ses clients, le travail du Directeur de l’expérience client dépasse le simple rôle de  « facilitateur » : son rôle ne se concentre pas uniquement sur la mise en connexion des différentes directions de l’organigramme pour aider les arbitrages, sa valeur-ajoutée réside également dans sa capacité de décision et d’action en propre, qui soit sponsorisée au plus haut niveau de l’organisation , afin que la Relation Client soit au cœur des décisions stratégiques de l’entreprise.

Les enjeux sont organisationnels mais aussi techniques : par exemple, au moment du rapprochement entre Fnac et Darty, il a fallu à la fois travailler sur ce qui fait l’aspérité de chaque parcours client, tout en réfléchissant aux avantages couplés possibles avec un rapprochement entre les programmes et l’expérience client des deux marques. Notre travail a consisté à donner un sens aux data au niveau du Groupe, en étant partagées efficacement et en créant de nouvelles synergies.

Cela ne s’improvise pas, et se situe dans un champ de contraintes très fort car les clients sont à la fois très preneurs d’une expérience personnalisée mais aussi très attentifs à l’utilisation qui est faite de leurs données »

Jean-Yves Locatelli, Directeur Expérience Client Grand Public et Pro, Bouygues Telecom 

« Dans une grande organisation, de nombreux sujets peuvent être source de problèmes d’alignement sur l’expérience client. Même des points aujourd’hui maîtrisés comme le click and collect nécessitent de sécuriser les impacts sur le flux et les stocks pour ne pas générer de problèmes entre le web et les boutiques. La remontée temps réel et synchrone des informations vers toutes les parties qui en ont besoin est généralement maîtrisée pour le cœur de l’activité, au sein de la maison mère et de ses filiales. Mais il y a un défi important sur les activités asynchrones pour lesquelles nous dépendons aussi d’autres acteurs tiers, comme par exemple chez Bouygues Telecom, l’installation de la fibre avec des partenaires. Dans ce cadre, le partage d’information peut parfois être moins fluide et nous cherchons à éliminer ces phénomènes. C’est pourquoi cette approche d’écosystème plus cohérente ne doit jamais être oubliée et toujours être renforcée ».

Jean-Yves Lepine, Directeur de l'Expérience Clients – Direction de l'Expérience Clients, Dalkia

« Permettre de « jouer collectif » est sans doute l’un des points les plus importants pour affirmer une culture client : le numérique ne fait pas tout. Derrière les outils, l’enjeu est celui du partage de l’information : chacun doit chercher ce que savent ou peuvent voir ses collègues. Quel est le point de vue du commercial ?  Quel est le point de vue de l'opérationnel ? Quelles visions ont-ils des étapes suivantes ? Pour améliorer l’expérience client, l’entreprise doit pouvoir faciliter les échanges entre ses différentes parties et susciter des postures collectives. C’est un enjeu d’accompagnement managérial de premier plan. »

Damien Nuyttens, Directeur Expérience client et Opérations, Edenred

« Cela fait des années que l’on en parle et je pense qu’aujourd’hui les entreprises doivent changer de posture : l’omnicanalité était un sujet de différenciation par le passé, maintenant elle est devenue une normalité. Elle est même devenue une dette si elle est mal assurée. Il y a une telle attente de fluidité et de simplicité du côté du client, que quand on ne se donne pas les moyens de gérer cette omnicanalité, on s’exclue automatiquement du jeu. Que ce soit d’un point de vue technique ou organisationnel, adresser cette question est un impératif de performance. »

Sébastien Poiblanc, Directeur des Opérations Expérience Client Macif

« L’entreprise est souvent prise par le quotidien et les processus qu’elle maîtrise bien. Elle ne s’aperçoit pas ou plus des angles morts de l’expérience qu’elle propose et ne détecte plus les impasses dans lesquelles elle peut mettre ses clients. Pour sortir de ce piège, il est nécessaire de développer une culture de l’amélioration continue qui permette de faire évoluer la prestation proposée évidemment, mais aussi l’organisation qui la permet. »

David Ruiz, Directeur Expérience Client, e.Voyageurs SNCF

« Un des principaux challenges de l’Expérience Client actuellement est sans doute d’assurer le continuum entre les différents points de contact. C’est par ce continuum que l’on peut répondre proactivement aux besoins de nos clients, porter l’identité de la marque, activer des leviers d’engagement, mais aussi capitaliser sur les basiques. Il s’agit aussi d’une opportunité pour exprimer implicitement ou explicitement la raison d’être de l’entreprise. Y parvenir, enfin, nécessite une attention particulière portée sur la connaissance fine des comportements de nos clients, de la gestion de la data, mais aussi le développement des API pour le système d’information, autant qu’une évolution des pratiques, du manager au collaborateur. »

Laurent Vimont, Président, Century 21

« Aujourd’hui, les entreprises se retrouvent dans la situation paradoxale d’avoir trop d’informations sur leurs clients ! Il est vraiment devenu essentiel de savoir déterminer efficacement ce qui est prioritaire parmi ces données, et qui doit pouvoir s’appuyer dessus. Rendre tout accessible à tout le monde est tentant, mais avec ce parti pris, il est facile de perdre tout le monde. Au contraire, l’effort doit être de créer des tableaux de bord par activité, par projet, par équipe, pour accéder à ce qui est vraiment prioritaire pour soi. Cette segmentation ne s’oppose pas au partage, bien au contraire : l’information doit s’adapter au besoin du collaborateur selon les spécificités de son poste. »

Myriam Huin, responsable du département Vision usager au sein de la DEUD, Pôle Emploi

« On a vu se multiplier ces dernières années les discours sur l’amélioration de l’expérience usagers, mais l’essentiel aujourd’hui est d’en apporter la preuve. Il est facile de se revendiquer de travailler pour les utilisateurs dans son organisation, mais le prouver c’est savoir définir une problématique de départ précise et apporter une réponse cohérente en face. La crise de la Covid-19 a été un révélateur, avec beaucoup d’incompréhensions ou de méprises qui ont pu apparaître, parce que les organisations ne se posaient pas forcément les bonnes questions. Pour être sûr de trouver des solutions aux problèmes qui sont vraiment à l’origine d’une expérience négative, il faut prendre le temps de se poser les bonnes questions. A-t-on vraiment diagnostiqué le bon problème ? Et ne pas confondre vitesse et précipitation. »

Marine de Bouchony, directrice de l’expérience client, CNP Assurances

« Le partage de l’information pour améliorer l’expérience client est un sujet clé. Ces derniers mois, nous avons en ce sens pris le parti de lancer un cockpit client cohérent pour nos collaborateurs. Pour ce faire, j’ai tenu à impliquer le Comité exécutif et les responsables des différents métiers de l’entreprise : ils se sont donnés comme ambition d’avoir un cockpit transversal afin de s’approprier des indicateurs client communs et de les partager avec tous les collaborateurs de l’entreprise. L’idée de ne pas réserver certains indicateurs à une seule strate du management a amené une grande adhésion et impose la perception du client comme une objectivité évidente à prendre telle quelle. »

Armelle Balenceu, Directrice Expérience Client Total Direct Energie

« La création d’une direction de l’expérience client permet de répondre à un double enjeu de focus et de transversalité sur ce sujet. C’est un des caps à passer pour de nombreuses organisations : créer de la transversalité, prendre véritablement en compte l’expérience du client et ne pas rester seulement sur des questions de processus, souvent silotés. Une clé pour faire ce lien est d’analyser les parcours et de partir de la voix du client pour comprendre les insatisfactions partout où elles se trouvent : bien écoutée, la voix du client est un vrai levier de transformation. Mais pour cela il faut trouver les moyens de la quantifier, d’animer le partage de l’information et d’engager les plans d’action nécessaires. »

Anne-Christelle Vogler, Directeur Clients & Opérations HomeServe France

« Après ces nombreuses années où l’expérience client est devenue de plus en plus importante dans les discours, les entreprises sont passées à l'action et vivent de nombreuses nouvelles transformations. Selon les historiques et les modes de fonctionnement des organisations, les problématiques peuvent différer, mais on constate souvent un frottement entre les sujets technologiques, culturels et de management. Parmi les sujets qui ne sont pas encore assez abordés, ceux de l’autonomie managériale et de l’autonomie des conseillers clients me paraissent très importants. La confiance et les responsabilités octroyées à ses collaborateurs est un levier exceptionnel en matière d’expérience client délivrée. »

Claire Leauté, Directrice du Service Client, Suravenir Assurances

« Il y a clairement un équilibre à trouver entre les possibilités offertes aux clients par une variété de canaux et l’impératif d’assurer une vraie continuité du parcours. En ce sens, je ne pense pas que toutes les entreprises ont vocation à ouvrir forcément tous les canaux théoriquement disponibles : il vaut mieux être vraiment performant sur les quelques-uns sur lesquels elle choisit de se concentrer. En la matière, il ne faut pas hésiter à aller à contre-courant des tendances si cela permet de proposer une meilleure expérience au client. Par exemple, sur la gestion des sinistres nous avons fait il y a 18 mois le choix de l’individualisation du suivi, par un seul et même gestionnaire, alors que notre secteur est largement sorti de cette pratique. Pourtant, nous ne le percevons pas comme un retour en arrière, mais plutôt comme un moyen cohérent d’assurer la continuité, la confiance et donc la qualité de l’expérience. »

Nous remercions nos invités pour leur présence à cet échange et pour s’être prêtés au jeu du partage, ainsi que notre partenaire qui a permis son organisation.

Des rencontres organisées avec le soutien de ServiceNow :

ServiceNow a été créée en 2004 avec la profonde conviction que toutes les opérations, des plus élémentaires aux plus complexes, peuvent être simplifiées. Dès ses débuts, ServiceNow a pensé un monde où chacun peut concevoir de puissants workflows utiles à tous. Aujourd’hui, nos applications permettent d’automatiser, de simuler, de numériser et d’optimiser les tâches et les processus métier, de la DSI au service client en passant par la cybersécurité et les ressources humaines… ServiceNow, c’est une nouvelle façon de travailler qui transforme les entreprises, et offre une expérience exceptionnelle à tous les utilisateurs, qu’ils soient vos employés ou vos clients.

Pour plus d’informations, rendez-vous sur le site www.servicenow.fr 

Guide Numérique en pratique Relation client et usagers