Industriels et Deeptech : de nouveaux outils à foison

Bpifrance et France Industrie s’allient pour construire des passerelles entre acteurs industriels et start-up de la Deeptech. Cette annonce intervient peu de temps après l’annonce du renforcement de la création d’un écosystème Deeptech également.

1 000 acteurs de la Tech sont référencés sur « Tech in Fab », dont la moitié pour des activités transverses et supports (logistique, RH…)

1 000 acteurs de la Tech sont référencés sur « Tech in Fab », dont la moitié pour des activités transverses et supports (logistique, RH…)

Face aux défis d’attractivité, de ré-industrialisation et de décarbonation de l’économie française, le rapprochement des écosystèmes industriel (la French Fab) et de l’innovation (la French Tech) constitue un enjeu crucial pour notre compétitivité. C’est tout l’objet des annonces du jour d’Agnès Pannier-Runacher, ministre chargée de l’Industrie et de Cédric O, Secrétaire d’Etat chargé de la Transition numérique et des Communications électroniques, au siège parisien de Bpifrance.

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« Les points de rencontre entre la FrenchTech et la French Fab ne sont pas assez explorés… précise Agnès Pannier-Runacher, Ministre déléguée auprès du ministre de l’Économie, des Finances et de la Relance, chargée de l’Industrie. Il faut faire en sorte que les grands groupes soient appareillés pour instaurer un dialogue permanent avec les start-up. »

Paul-François Fournier, Directeur Exécutif de Bpifrance, Agnès Pannier-Runacher, ministre chargée de l’Industrie et Cédric O, Secrétaire d’Etat chargé de la Transition numérique et des Communications électroniques.

Paul-François Fournier, Directeur Exécutif de Bpifrance, Agnès Pannier-Runacher, ministre chargée de l’Industrie et Cédric O, Secrétaire d’Etat chargé de la Transition numérique et des Communications électroniques.

« Notre volonté est de durcir l’écosystème industriel français, affirme Cédric O, Secrétaire d’Etat chargé de la Transition numérique et des Communications électroniques. Il y a un continuum assez fort entre la FrenchTech et la FrenchFab et les start-up industrielles sont d’ailleurs de plus en plus présentes dans les classements des grandes start-up françaises. L’industrie a tout à gagner de collaborer avec les entreprises de services technologiques et notre plateforme permettra d’aider les start-up à trouver des clients voire des acheteurs. » Cédric O fait référence aux américains Space X, Tesla ou Amazon qui sont des exemples parfaits de pure player ayant réussi à disrupter des secteurs industriels.

Les « start-up à vocation industrielle », vivier d’innovation conséquent, représentent environ 9 % du total des 15 000 entreprises de la French Tech, soit environ 1 300 sociétés l’an dernier, parmi lesquelles 500 start-up Deeptech, porteuses de technologies de rupture.

Ainsi, parce que la coopération entre ces jeunes pousses et les entreprises industrielles est un facteur déterminant, Bpifrance vient de signer un partenariat avec France Industrie, qui se concrétise notamment par la création de la plateforme « Tech in Fab ». Cet outil vise donc à rapprocher PME et ETI industrielles françaises des acteurs du digital et de l’innovation, en favorisant l’innovation des premiers et en accélérant leur transition vers l’industrie du futur, tout en créant des opportunités commerciales pour les seconds.

« Ce seront des solutions de start-up sur l’ensemble de la chaîne, y compris sur les fonctions support. Avec France Industrie, il y avait une cohérence à trouver sur ce sujet, explique Paul-François Fournier, directeur exécutif Bpifrance Innovation. Cette plateforme est en quelque sorte la partie émergée de nos dispositifs d’accompagnement que sont les accélérateurs sectoriels, génériques et régionaux, les diagnostics que nous finançons, etc. Elle s’inscrit dans une dynamique d’accompagnement des entreprises pour les guider vers la digitalisation, avec un premier accompagnement… et ensuite cela évoluera. Cette plateforme vise à servir et fédérer le plus grand monde. »

Aujourd’hui, ce rapprochement serait possible car « il y a une vraie compréhension du monde industriel de l’intérêt de travailler avec des start-up et des PME innovantes, poursuit-il. Certes, cette plateforme ne règle pas tout, mais elle est une étape supplémentaire, notamment d’un business raisonné, pour mieux se faire connaître de chaque côté et créer ensemble de la valeur. »

La crise aurait-t-elle donc changé les choses ? « Tout le monde s’est rendu compte que les start-up de la Tech étaient résilientes et solides, poursuit l’expert. Depuis un an, les fonds ont continué à investir et nombre d’entre elles ont bien résisté… Nous sommes donc face à un écosystème puissant. »

La plateforme « Tech in Fab » proposera donc en accès libre :

  • des contenus à visée pédagogique et explicative sur l’innovation adaptés aux industriels, y compris les moins matures,
  • un répertoire d’offreurs français de solutions technologiques et numériques classés par nature, comprenant des suggestions de professionnels catégorisés par thématique, des cas d’usage tirés de témoignages transverses (collaborations vertueuses), les présentations individuelles détaillées et ré-actualisables de chaque acteur de la tech référencé, la possibilité de les épingler en favoris et de les contacter directement…
  • La publication d’appels à projets par les PME et ETI industrielles à la recherche de solutions,
  • Une redirection vers les offres et services de Bpifrance et ses partenaires.

Cette annonce de Bpifrance fait suite à une autre annonce récente, qui concernait la création de la plateforme LesDeeptech.fr, pilotée par le réseau des SATT, dans le cadre du Plan Deeptech. Son objectif : encourager les transferts technologiques venant des acteurs académiques et des grands organismes de recherche. La plateforme cherchera donc à fédérer principalement les grands réseaux universitaires et de recherche publique (Inria, CEA, CNRS…). À terme, Bpifrance vise la création de 500 start-up Deeptech chaque année et souhaite ériger 1 à 2 start-up de la French Tech dans le CAC40 à l’horizon 2025.

En parallèle de ces actions, France Industrie, organisation professionnelle représentative de l’industrie en France*, présente deux initiatives complémentaires, que sont :

1. le lancement d’un Manifeste des grandes entreprises pour les start-up rejoint par 26 industriels de premier plan (voir image) qui s’engagent à renforcer leur soutien aux start-up. Ensemble, ils proposent déjà un « Memorandum » de collaboration entre start-up Deeptech et grands groupes, en partenariat avec l’INPI. Disponible dès avril, ce « contrat-type » permettra d’encadrer et de guider les négociations entre les deux parties en vue de la contractualisation de leur partenariat.

2. et la création du club « Tech Factory » qui réunit 18 CEO de start-up (chaque année, ce panel sera renouvelé). Son objectif est notamment d’initier des collaborations techniques permettant, via des task forces de start-up et grandes entreprises, d’identifier et lever, en lien avec l’Etat, des freins au renforcement de l’écosystème Deeptech. Ainsi, dès ce printemps, sera créer une première task force sur la circulation des talents. L’objectif est aussi, petit à petit, de créer des filières industrielles nouvelles et cela met du temps à se construire… « C’est un vivier formidable pour la ré-industrialisation de la France et notre souveraineté technologique. Des usines conjointes de nouvelle génération vont se développer. Concrètement, ces start-up comme Ynsect, McPhy Energy, InnoFeed, Eligo Bioscience… sont le ferment de l’implantation de nouveaux sites industriels sur le territoire », précise de son côté, Vincent Moulin Wright, directeur général de France Industrie.

Pour rappel, France Industrie rassemble 69 membres, dont 25 fédérations sectorielles et les présidents de 44 grandes entreprises privées et publiques intervenant dans l’ensemble des secteurs industriels. Interlocuteur des pouvoirs publics sur les sujets transverses relatifs à l’industrie (compétitivité, emploi, transition écologique, innovation et numérique, politique industrielle européenne et attractivité des territoires), France Industrie est également co-fondateur de la French Fab.

Une seconde plateforme en vue pour les offreurs de solutions clés-en-main…

Début avril également, sera lancée une autre plateforme appelée « Boost French Fab » pour les offreurs de solutions digitales pour l’industrie du futur et français. Cet outil, qui entend favoriser la mise en œuvre rapide des investissements subventionnés par le plan de relance, est une initiative d’entrepreneurs de la French Fab (Laurent Couillard/InUse et Yann Jaubert/Alfi Technologies), soutenue par la Fédération des Industries mécaniques (FIM), l’Alliance pour l’industrie du futur, le Cetim et Bpifrance.

 La plateforme « Boost French Fab » permettra gratuitement :

  • aux lauréats France Relance de faire des appels à solutions et offres commerciales,
  • aux offreurs de solutions clés-en-main de constituer des consortia pour répondre de manière globale à un appel d’un lauréat de France Relance.
  • A des experts neutres d’aider les entreprises à la sélection de la meilleure offre, notamment sur le plan technique lorsque des technologies innovantes sont proposées.

À ce rythme, un nouvel écosystème vertueux Industrie et Deeptech pourrait enfin prendre forme… Ce n’est pas la première fois que l’Etat tente de renforcer les liens entre ces deux mondes. On se souvient du rapprochement de Syntec Numérique et de l’Alliance Industrie du Futur d’il y a quelque temps qui n’a jamais réellement abouti… « Les temps ont changé », m’explique-t-on. Je veux bien le croire.

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POSTULER À L’EIT DIGITAL CHALLENGE

L’EIT Digital Challenge, principal concours pour les start-up Deeptech, vient d’ouvrir ses inscriptions. Les start-up à forte croissance ayant déjà des clients (dites scale-up) peuvent postuler dans l’une des cinq catégories : Digital Tech, Digital Cities, Digital Industry, Digital Wellbeing et Digital Finance. Les trois lauréats recevront des prix d’un montant de 250 000 euros. La date limite de dépôt des candidatures est fixée au 10 mai prochain. « Nous allons sélectionner 20 entreprises parmi toutes les candidatures et les inviterons à un événement exclusif à l’automne où elles présenteront leur projet à un jury composé d’entreprises et d’investisseurs de premier plan », explique Shehryar Piracha, directeur de l’EIT Digital Accelerator.

L’EIT Digital Challenge permet d’identifier ces entreprises et de les aider, par le biais de l’accélérateur, à lever des fonds, accéder à de nouveaux marchés et se développer à l’échelle internationale. Depuis 2012, l’EIT Digital Accelerator a accompagné des startups et scale-up de 18 pays pour un montant cumulé d’investissement dépassant 1 milliard d’euros. La liste des précédents lauréats depuis 2014 est consultable ICI et pour 2020, cliquez sur les liens pour voir la liste des finalistes et lauréats. En France par exemple, Deepomatic a été reconnue « meilleure start-up deeptech européenne 2020 » lors de ce challenge.