Pour Schneider Electric, les fondations pour les vingt ans à venir passent par un numérique à l’échelle

Robert Auffray, Senior Vice President Schneider Digital, Global Finance & Supply Chain Digital Leader and CIO Europe, décrit « Transform @ Scale », une transformation business et digitale interne à l’échelle de Schneider Electric. Objectifs ? Simplifier le business de l’entreprise et préparer l’avenir

Vous avez rejoint Schneider Electric il y a bientôt sept ans. Comment l’entreprise s’est-elle transformée digitalement depuis lors ?

D’un point de vue informatique, la transformation principale, c’est le passage d’une informatique qui était encore gouvernée régionalement, voire localement, à l’échelle. Avec un vrai changement de stratégie qui accompagne la croissance de la société. Nous appelons cela en interne « Digital Transformation @ Scale » (NDLR :  transformation à l’échelle), qui est portée par Peter Weckesser, notre Chief Digital Officer, avec des piliers de transformation utilisés comme fondations que nous espérons pour les vingt années à venir.

Quels sont les process que vous avez mis en place qui ont déjà changé la donne chez Schneider Electric, et ce à vos trois niveaux de responsabilité (France, Europe, et les solutions finances, la Supply Chain et les ERP, au niveau mondial) ?

J’ai démarré dans la société en tant que CIO pour la France, puis j’ai eu la responsabilité de l’Europe avant d’être en charge au niveau mondial des solutions finances, de la Supply Chain et de tous les ERP. En France ce dont je suis le plus fier c’est d’avoir contribué à prioriser les fondamentaux, à diminuer la dette technique qui était assez forte car nos process sont assez fragmentés notamment en raison des acquisitions effectuées. Je suis satisfait de la transformation du process de chiffrage où nous avons tout refondu afin d’être plus efficace pour nos clients et nous. Nous avons réduit le temps pour délivrer des devis aux clients ce qui nous permet d’être plus efficients sur les marchés. C’était une refonte complète avec une approche Design Thinking, qui part du besoin des collaborateurs, des clients afin de standardiser les process en France avec la solution informatique qui les accompagne.

Au niveau européen, j’ai appliqué les mêmes fondements. Nous avons européanisé toute l’IT avec de la déduplication et la mise en place de solutions globales qui définissent des stratégies. Quand j’ai repris les solutions finances, la Supply Chain et la stratégie ERP, la volonté a été de définir les opportunités de business de demain. Nous avons mis en place des « Power Couple » avec des duos business/digital pour chaque domaine fonctionnel qui auront la vision métier pour accompagner la transformation digitale de leur domaine en ligne avec la croissance et les ambitions de Schneider, et les moyens digitaux pour la mettre en œuvre.

Grace à ce modèle, nous avons initié un programme de transformation interne, qui vise à rendre plus simple la manière d’opérer du business avec Schneider. C’est la grande transformation en cours chez nous actuellement.

Où cette « grande transformation » vous mène-t-elle ?

Nous avons un très gros programme de transformation business qui a été d’abord initié aux Etats-Unis puis s’est développé dans le reste du monde et qui vise à simplifier et standardiser nos processus internes afin que les parcours clients soient intégrés de bout en bout. Pour cela nous standardisons nos process sur le cœur (l’ERP) et les solutions spécialisées métiers différenciantes intégrées à notre ERP. Aux Etats-Unis, ces changements sont en cours et nous sommes déjà en production. Dans le reste du monde, nous avons démarré le programme il y a un an et utilisons le changement d’ERP comme une Forcing Function en allant vers une solution standard – sans spécifique – avec au cœur de ce programme une transformation des principes, une standardisation de nos données, de toute l’architecture IT de bout en bout et une harmonisation des process.

Quelles sont vos priorités actuelles pour la transition digitale de Schneider ?

Cette transition a démarré il y a de nombreuses années chez nous et est bien enclenchée. Ce que nous constatons c’est une accélération de la demande de nos produits et de nos services et nous devons nous adapter en conséquence. Le digital est un des trois piliers de la stratégie de l’entreprise avec la sustainability et l’électrification.

Comment intégrez-vous l’IA au sein du pilier digital ?

L’intelligence artificielle est un sujet majeur sans être non plus nouveau pour nous. Nous avons créé un AI hub en 2022 avec un Chief AI Officer, Philippe Rambach. Nous faisons du Machine Learning et de l’Analytics depuis des années. C’était décentralisé, nous avons centralisé et industrialisé ces processus avec un modèle similaire au Power couples, avec des Use Case qui viennent des métiers et un support central d’expertise qui compte aujourd’hui plus de 300 personnes. Et nous réfléchissons toujours à créer plus de valeur, des insights plus rapides.

Nous avons déjà des éléments pour optimiser la consommation énergétique dans les bâtiments. Nous avons un ChatGPT interne et tous nos commerciaux seront équipés d’une solution Copilot pour les aider à être plus efficaces.

Quelle perception le comex se fait-il de la transformation numérique de l’entreprise ?

Notre Chief Digital Officer est au Comex. Il gère la partie IT interne avec Elizabeth Hackenson, notre CIO groupe, toute la digitalisation et l’interopérabilité de nos offres. La digitalisation fait partie de notre ADN. Les collaborateurs rejoignent Schneider parce que l’ambition de la décarbonation, de la sustainability et du digital sont très importants pour eux.

Au quotidien, le modèle de « Power Couples » est assez unique. Moi je suis « Power Couple » avec trois personnes. Cette priorité se traduit en stratégie digitale, en investissements digitaux pour obtenir les solutions qui nous permettent de nous transformer.

Comment faire accepter le changement qu’implique cette transformation ?

Il y aura bien sûr du Change Management dans tous nos projets afin que tout le monde soit convaincu de l’intérêt de changer en constatant combien leur travail et leur métier seront facilités au quotidien. Un des objectifs est de libérer du temps pour les collaborateurs de l’entreprise. Pour faire quoi ? Plus de ventes, plus de chiffrage. Le changement est permanent, donc sa conduite est permanente.

Quand le changement vous touche individuellement, c’est mieux d’être accompagné pour comprendre les enjeux pour la société, ce qui va concrètement changer pour tous nos collaborateurs, les bénéfices qu’ils vont en tirer à tous les niveaux.

Dans l’exemple de la transformation business et digitale évoqué, nous sommes en train de préparer le déploiement d’une première usine en Europe et nous accompagnons la standardisation, la mise en place de l’architecture cible, c’est-à-dire tous les outils que l’on peut utiliser pour la stratégie de l’entreprise.

L’IA est une aide supplémentaire, un élément de plus dans notre couteau suisse, mais qui est en train de transformer notre manière de faire les choses. Oui, l’IA est un Game Changer et toute l’industrie en parle. Pour l’utiliser, il faut être clair sur ce que nous voulons améliorer, comment nous voulons utiliser ces solutions dans nos produits, mais aussi en interne pour être plus efficace avec des exemples comme la traduction automatique de documents, la génération de vidéos, la formation. La question la plus importante avec l’IA, c’est : pour quoi faire ?

Nos objectifs sont d’optimiser la consommation de l’énergie avec une demande croissante en électricité, aider nos clients à décarboner, parce que le green IT n’est pas suffisamment à l’agenda. Si l’IA peut nous y aider, pourquoi pas ?