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Le Club des Partenaires clarifie la question de la co-innovation à l’ère du numérique

Face à une sur-médiatisation des start-up récurrente, le club des partenaires du numérique a décidé d’interroger des décideurs et experts sur les nuances que l’on peut voir dans les nouveaux écosystèmes d’innovation. La soirée du 13 février, place Vendôme, dont Alliancy était partenaire, a permis de pointer les priorités pour les entreprises qui souhaitent mieux co-innover.

Il est 19h, les salons de SwissLife Banque Privée, place Vendôme, commencent à se remplir. Une cinquantaine de décideurs, chef d’entreprises et experts en innovation sont attendus pour débattre sur le thème : “Au-delà de la surenchère start-up, comment pouvons-nous tous mieux innover en écosystème ?

“Cette initiative existe maintenant depuis 15 ans et grâce à vous, cette dynamique existe toujours, félicite Sylvain Fievet, président du Club et directeur de publication d’Alliancy.  C’est une rencontre d’affaires avec l’ambition de créer des synergies entre vous, qu’elles soient technologiques, capitalistiques, commerciales”.

Co-innovation : les start-up mais pas que !

Frédéric Le Roy - Enseignant-Chercheur à Université Montpellier, spécialiste en coopétition, stratégie et innovation

Frédéric Le Roy – Enseignant-Chercheur à Université Montpellier, spécialiste en coopétition, stratégie et innovation

Frédéric Leroy, enseignant-chercheur à l’Université de Montpellier et grand spécialiste de la coopétition, stratégie et innovation, est le premier intervenant à introduire le débat. D’emblée, il aborde ses thèmes de recherche autour de l’open-innovation et la coopétition. “Je sais pas pourquoi on a cette vision restrictive de l’open-innovation en France autour des start-up, mais pour moi le réel potentiel est entre grands groupes parce que le concurrent c’est le vrai expert”, affirme-t-il avant d’illustrer son propos avec des exemples de synergies entre groupes concurrents comme Thales Alenia Space et Airbus Defence and Space sur le projet de satellite Arabsat 6B. “Si ils n’avaient pas mutualisé leurs technologies, ils n’auraient pas eu le marché. On est face à deux grands groupes concurrents mais pour relever les défis d’innovation radicale, on est obligés d’adopter ce type de stratégie”.

“Nous pensons que l’innovation se gouverne, c’est pas aléatoire” lance Lilia Coll, Director Applied Innovation Exchange France de Capgemini. “On parle beaucoup de start-up mais dans les écosystèmes d’innovation il y a aussi les centres de recherche, les écoles et les partenaires classiques comme Microsoft, Amazon, etc… Je pense que l’innovation c’est aussi une posture de leadership”.

C’est également ce que partage Jean-François Galloüin, Professeur à Centrale Supélec et à l’Essec, spécialiste en innovation, entrepreneuriat et intrapreneuriat. Il rappelle les fondements de l’innovation incrémentale que “l’on fait seul, avec des petits, des moyens, des gros, des labos privés ou publics … ça fait partie du business as usual des boîtes […] Là où les groupes commencent à être en difficulté, c’est quand ils ont à affaire à des modèles disruptifs qui vont percuter des modèles existants. C’est facile d’identifier les menaces et les opportunités mais c’est compliqué pour les grands groupes de les transformer. Il faut donc faire attention à ne pas mettre toutes les innovations dans le même paquet”.

L’avènement de l’intraprenariat et l’open-innovation

De gauche à droite : Fabrice Marsella, Lilia Coll, Olivier Flous et Jean-François Galloüin

De gauche à droite : Fabrice Marsella (Village by CA), Lilia Coll (Capgemini), Olivier Flous (Thales Group) et Jean-François Galloüin (Centrale Supélec)

“C’était une époque où les grands groupes avaient peur des méchantes start-up qui voulaient remettre en cause un ordre établi. Mais l’idée de notre projet c’était d’accompagner ce changement.”, ajoute Fabrice Marsella, “Maire” du Village by CA. “Le village c’est ça, c’est faire le trait d’union entre les start-up et les grands groupes. Au début il y avait un besoin de dédiaboliser ces méchantes start-up”.

Ce virage récent d’innovation de rupture a poussé les grands groupes à adopter une démarche d’intraprenariat et d’open-innovation. Cette perspective de co-innovation existe pourtant depuis longtemps mais ce qui change, c’est les opportunités pour les petits acteurs d’impacter le marché.

Pour Olivier Flous, VP Digital Transformation & Digital Factory de Thales Group, cette rupture est en partie due au phénomène de plateformisation des entreprises. “Aujourd’hui ce qui révolutionne totalement nos écosystèmes c’est la notion de plateforme, affirme-t-il. Ils se fédèrent autour de plateformes digitales, ce qui place les grands acteurs du cloud comme Amazon Microsoft Google et Alibaba dans des positions d’orchestrateur d’écosystème… On est dans un monde en pleine effervescence et c’est l’innovation avec tout un ensemble d’acteurs petits et grands qui nous permet de survivre et de s’autodisrupter”.

Jean François Galloüin évoque la nécessité pour les grands groupes de favoriser les intrapreneurs. Il les compare aux “corsaires” opposés aux créateurs d’entreprises qui sont des “pirates”. Les premiers bénéficiant d’une lettre du roi pour éviter la pendaison en cas de capture mais reversant, en contrepartie, 80% de leur butin.

La soirée touche à sa fin et les invités ont pu pleinement échanger leurs expériences et points de vue respectifs sur les nouvelles dynamiques qui animent les écosystèmes d’innovation. La prochaine rencontre le 10 avril sera consacrée à la transformation des business model des entreprises de service numérique (ESN) pour mieux accompagner l’innovation.