[Edito] De ChatGPT à NumSpot, les anniversaires de la Tech se suivent et ne se ressemblent pas

Sam Altman se souviendra longtemps de la première bougie d’anniversaire de ChatGPT. Lancé officiellement le 30 novembre 2022, la solution de l’éditeur OpenAI, qui a démocratisé massivement l’usage de l’IA, a séduit un million d’utilisateurs en seulement cinq jours. Deux mois plus tard, ils étaient cent millions. Depuis, la croissance a ralenti, mais l’outil reste employé par plus de 180 millions de personnes en novembre 2023 : un chiffre colossal pour son jeune âge ! Les entreprises ont été secouées, et les directions du numérique appelées à mesurer l’impact soudain sur la sécurité, la confidentialité, l’éthique… Mais ce boom a aussi alimenté toutes les intrigues. San Francisco, où OpenAI a son siège, s’est transformé en « Dallas » juste avant l’anniversaire du produit : le conseil d’administration de l’entreprise a limogé le PDG Sam Altman, avant de le réintégrer cinq jours plus tard face à la bronca provoquée chez les salariés et sur le marché. 

Entre l’intérêt business, les enjeux sociétaux de l’IA et les règles de gouvernance d’entreprise, le psychodrame et les commentaires qu’il a provoqués ont été à l’image de l’arrivée de ChatGPT sur le marché : hors du commun. La différence avec un autre anniversaire célébré en novembre, cette fois dans le milieu de la Tech française, est d’autant plus saisissante.

Loin de la pièce de théâtre haletante jouée à San Francisco, c’est en effet au sein du très calme hôtel particulier de Pomereu, propriété de la Caisse des Dépôts dans le 7e arrondissement parisien, que se sont réunis les acteurs principaux de l’ambitieux projet de cloud souverain NumSpot, pour fêter sa première année d’existence. Et c’est d’ailleurs avec humour qu’Alain Issarni, président exécutif de l’entreprise, a noté la bonne entente entre les actionnaires et les dirigeants, qui ont pris la parole collectivement pour montrer les progrès réalisés. 

Fruit d’une alliance publique-privée entre Docaposte, Dassault Systèmes, Bouygues Telecom et la Banque des Territoires de la Caisse des Dépôts, le projet présentera ses premières offres officielles en mai 2024. Le focus sera sur l’orchestration de conteneurs, avec des services managés Kubernetes, Openshift et de base de données, certifiés HDS (hébergement de données de santé) et ISO27001 (sécurité des systèmes d’information). L’entreprise espère aussi pouvoir décrocher rapidement l’exigeant sésame SecNumCloud, la qualification de l’agence nationale de la sécurité des systèmes d’information, dont elle dispose déjà pour ses infrastructures Outscale fournies par Dassault Systèmes. 

Pour parvenir à ce décollage business, NumSpot a fait grandir ses équipes comme une vraie start-up, passant de trois à cent personnes en quelques mois. Elle a également pu s’appuyer sur des « early-adopters » comme CNP Assurances. Au-delà des banques et assurances, l’entreprise a annoncé se concentrer sur les secteurs clés de la santé et des acteurs publics. 

Après les expériences désastreuses en matière de cloud souverain qu’ont été Numergy et Cloudwatt il y a une décennie, le projet NumSpot est dorénavant scruté avec attention. Certes, son anniversaire n’a rien de comparable avec celui, extraordinaire à tous les égards, de ChatGPT, mais est-ce vraiment une tare ? L’entreprise assume de suivre un chemin méthodique, pour éviter les écueils de ses prédécesseurs déchus, avec un cap business beaucoup plus clair, des cas d’usages et des clients concrets. Un moyen pour ne pas seulement surfer sur le succès du thème souveraineté. Et nul doute qu’en cas de réussite, le projet changerait aussi la vie de nombreux directeurs du numérique désabusés face aux manques d’alternatives françaises sur certains piliers fondamentaux du cloud, avec peut-être moins d’intrigues et de questions éthiques qu’autour de ChatGPT.