Pour Solvace et Efeso Management Consultants, les industriels français ont l’opportunité de passer un cap majeur dans leur digitalisation

Quelles sont les principales tendances de la digitalisation de l’industrie en France ? Yannick Bordereau, directeur du développement de Solvace en Europe et Roberto Maroncelli, directeur général France d’Efeso Management Consultants), analysent les transformations récentes vécues par les entreprises industrielles et les défis qui les attendent encore.

>> Cet article est issu du guide « Source de la donnée, partage d’informations, empowerment : Les usines face aux nouveaux défis de la digitalisation »

Alliancy. Peut-on dire que les entreprises industrielles françaises sont aujourd’hui matures sur leur stratégie de digitalisation ? Les choix réalisés ces dernières années ont-ils payés ?

Yannick Bordereau directeur du développement de Solvace en Europe et Roberto Maroncelli directeur général France dEFESO Management Consultants

Yannick Bordereau directeur du développement de Solvace en Europe et Roberto Maroncelli directeur général France d’Efeso Management Consultants

Roberto Maroncelli. Je pense que l’on est encore dans une situation assez hétérogène. Certaines entreprises sont dans des phases de tests, d’apprentissage, et d’autres sont vraiment en phase de transformation profonde. Le dénominateur commun, c’est que toutes ont cependant compris l’importance de l’adoption par leurs équipes de cette digitalisation et des programmes qui y sont liés, pour en faire une réussite. La valeur amenée par le numérique doit être « transférée » vers les équipes et cela ne s’improvise pas. A la clé, il y a un enjeu de productivité, mais aussi d’attractivité des métiers industriels. Cette appropriation est sans doute le point majeur en termes de maturité, car c’est celui qui rend les programmes vraiment pérennes, une véritable préoccupation des industriels. L’ingrédient principal est de rendre ses équipes parties prenantes de la transformation engagée.

Yannick Bordereau. Certains secteurs d’activité se sont vraiment remis en question. En quelques années, le monde du semi-conducteur par exemple est pleinement entré dans ces logiques décrites par Roberto. Ces entreprises articulent différemment l’accompagnement de leurs équipes jusque sur le terrain et elles veulent vraiment passer un cap en matière de performance apportée par la digitalisation.

Quels sont pour vous les meilleurs exemples de projets de digitalisation pour améliorer l’excellence opérationnelle ? Qu’ont fait vos clients ces dernières années ?

R.M. Il y a beaucoup de bonnes idées et les transformations remarquables sont donc celles qui sont adoptées largement par les équipes. Les meilleurs exemples se voient au niveau de la maitrise du procédé : plus on a la bonne information, la bonne donnée, au bon moment mieux on comprend le fonctionnement du processus de production, et plus fine sera l’analyse et la prise de décision, avec des optimisations décisives pour l’excellence opérationnelle.

Y.B. Dans le secteur des cosmétiques, j’ai l’exemple d’une entreprise qui a vraiment compris l’importance de l’automatisation de ses processus pour diminuer les gaspillages, tout en améliorant la coopération des équipes. On les a vu s’emparer des accélérations technologiques permises par le machine learning : ce sont des transformations qui changent le quotidien d’une organisation, à la fois en termes de productivité et de collaboration.

R.M. Au-delà de la maitrise des procédés, les groupes industriels ont également beaucoup à gagner à capitaliser sur leur savoir-faire, à partager les bonnes pratiques et à les mettre à disposition au sein d’un même site, entre sites au niveau national ou à l’international.

Y.B. C’est d’ailleurs bien une des réponses qu’entend apporter Solvace. Nous permettons notamment d’accéder plus facilement à des pratiques qui ont été mises en œuvre ailleurs dans l’organisation : découvrir ces avancées, mais également les personnes qui les ont rendues possibles. 
Une autre demande récurrente de nos clients est également de mieux traduire les contenus autour des meilleurs procédés et démarches. Il faut pouvoir rechercher les contenus avec des mots-clés, et ce, au-delà de la barrière de la langue pour être certain de trouver les bonnes informations au niveau d’un groupe international. La digitalisation orchestrée avec notre plateforme offre cet avantage unique sur le marché.

Est-il aisé de mesurer les gains apportés par ces transformations « 4.0 » ?

Y.B. Pour les entreprises industrielles, la question de la mesure est effectivement clé car elles doivent choisir leurs priorités et leurs investissements en connaissance de cause. Trop souvent, elles nous disent manquer de metrics, de calculateurs pour justifier des investissements profonds, qui changeront vraiment la donne… En d’autres termes, elles doivent se convaincre de passer du « proof of concept » (POC) à une transformation à l’échelle. C’est aussi sur ce point que nous accompagnons les industriels

R.M. C’est bien l’ADN d’Efeso d’accompagner l’amélioration des performances industrielles, en aidant notamment à suivre et mesurer avec précision les gains générés. Les indicateurs de la performance impactés sont variés, et lorsque l’on utilise une plateforme de collaboration OpExc comme Solvace, on est capable d’estimer dès le départ des potentiels d’amélioration en termes de productivité. Par exemple, la plateforme peut permettre de faire gagner 15% de temps au collaborateur sur l’accès à l’information : c’est factuel. Ces gains de productivité sont alors traduits en temps investi par les équipes pour des activités d’optimisation du processus ou encore de la formation. 

Y.B. Le résultat peut aussi être la recherche d’innovation. Nous avons un très bel exemple dans le secteur de la chocolaterie, où un tel gain de temps a été utilisé par une entreprise pour créer de nouveaux produits, et générer une autre ligne de production, grâce à une allocation plus efficace des ressources.

Quels autres avantages voyez-vous à un meilleur partage de l’information ?

R.M. On constate chez nos clients des problématiques importantes de recrutement… à la fois pour des experts expérimentés et pour de jeunes talents. L’utilisation d’une plateforme comme Solvace change nettement le travail au quotidien. Il permet de fluidifier la communication, d’améliorer la réactivité dans la prise de décision, de donner une touche de modernité dans la façon de travailler, et ce grâce aux outils digitaux. Cela a donc un effet positif sur l’attractivité des postes. Il faut pouvoir proposer un environnement de travail moderne, car quand on a du mal à recruter, c’est un aspect qui pèse dans l’équation. Un opérateur qui utilise un support digital, avec la bonne information au bon moment, va vivre un quotidien très différent de celui qui sera obligé d’utiliser du papier et de rechercher difficilement l’information…

La France se démarque-t-elle d’autres pays sur ces sujets ?

Y.B. Au niveau national, la France a très vite compris que la digitalisation permettait vraiment de changer la donne. Les autorités publiques se sont positionnées fortement sur le sujet. L’accent mis sur l’intelligence artificielle est une bonne illustration : meilleure organisation, meilleures synergies entre les lignes de production… La France est bien partie en temps et en heure sur ces sujets. Cela ne veut pas dire que l’on est en avance par rapport à d’autres pays, mais que l’on peut facilement capitaliser sur les expériences d’ici ou d’ailleurs. Si un proof of concept fonctionne à Tours, on le reproduira à Seattle sans problème. Il y a également une forme d’attractivité pour expérimenter dans le pays. Dans la métallurgie par exemple, de grands groupes mondiaux choisissent de mener leurs POC en France, plutôt qu’ailleurs. C’est très positif.

Y-a-t-il pour vous des prérequis nécessaires pour s’emparer avec succès des transformations que vous décrivez ?

R.M. Quand il y a un programme d’excellence opérationnelle bien établi, des fondamentaux en place sur la gestion des compétences, sur la mesure, le pilotage… alors la digitalisation est beaucoup plus simple. Elle est vraiment ressentie comme un levier d’accélération. Quand les fondations sont solides, il n’y a pas, ou rarement, de frictions. Il faut donc bien comprendre la maturité d’une organisation pour adresser les deux sujets de l’excellence opérationnelle et de la digitalisation de front.

Y.B. Parmi les fondamentaux, je pense que l’un des points qui est trop souvent sous-estimé est l’importance d’avoir une collecte des données efficace et bien pensée. Sans cette attention portée à la data dès le départ, il sera difficile de gagner des batailles déterminantes plus tard.

Vous avez insisté sur l’importance de l’adoption des collaborateurs dans l’équation. Comment créer de l’adhésion et de l’engagement ?

Y.B. Il n’y a pas de secret. Il faut accompagner, accompagner, accompagner. Organiser des formations directement sur les sites, mais également nommer des team leaders, des champions, des ambassadeurs, sur chaque ligne de production. Former ne suffit pas : avoir un référent pour la montée en compétence de chaque équipe, qui sera aussi un point de contact de proximité, est clé.  

R.M. Les opérationnels, les managers de ligne, les managers de fonction, ont tous des besoins un peu différents. Il n’y a donc pas de réponse type à apporter sur un accompagnement. Chez Efeso, nous nous appuyons sur des remontées permanentes du terrain, pour détecter les irritants auprès des métiers et permettre un coaching des équipes, qui va progressivement se transformer en un transfert des compétences et de savoir-faire pérenne. Sur certains sujets, il est beaucoup plus simple de générer de l’engagement au niveau des équipes. Quand l’on veut digitaliser les rituels du quotidien par exemple, il y a souvent une dimension dynamique, presque ludique, à réimaginer des moments comme la réunion journalière… Les dimensions de travail d’équipe, de réduction de temps, de réduction du poids administratif, facilitent toujours l’adoption et ouvrent la voie aux autres sujets.

Les autorités politiques françaises ont mis en avant ces dernières années la volonté d’une « réindustrialisation » du territoire. A quel point l’amélioration de l’excellence opérationnelle par le digital peut-elle aider en ce sens d’après vous ?

R.M. Nous voyons une forte dynamique post-covid, avec une accélération des investissements. Les projets mis en standby ont été réactivés mais sans pour autant décaler ceux qui étaient déjà prévus en 2022 et 2023. Pour faciliter la réindustrialisation, beaucoup de facteurs entrent en compte : la meilleure intégration des nouveaux capex, une détection plus avancée des risques opérationnels, une généralisation de l’adoption d’outils digitaux appropriés pour les équipes… La bonne digitalisation des processus jouera énormément sur la réussite ou non de la réindustrialisation. C’est pourquoi nous voulons aussi à notre niveau faciliter la mise en œuvre de nouvelles lignes de production, autour de ces critères et prérequis fondamentaux que nous avons décrit précédemment. C’est ce qui assurera la pérennité de ces choix.

Y.B. Il y a des exemples inspirants, par exemple du côté des semi-conducteurs, avec Lacroix, All Circuits et Actia qui se mobilisent pour développer de nouveaux processus, pour contrecarrer ce qui se passe en Asie et réindustrialiser en France. Leur stratégie s’appuie sur une capacité de partage de la connaissance plus avancée et la volonté de profiter de ce que permet la digitalisation en la matière. C’est aussi dans cette logique que nous voulons montrer aux industriels ce qu’il est possible de faire avec notre plateforme Solvace pour faciliter la réindustrialisation. En tant qu’offreur de solutions, notre enjeu est de montrer notre capacité d’adaptation. Le fait d’avoir une solution de bout en bout, clé en main, capable de se connecter en OpenAPI à tout type d’applications, ouvre vraiment le champ des possibles. L’intelligence artificielle et le machine learning vont nous permettre d’accélérer sur tous nos sujets, notamment pour amener une connexion plus forte avec les processus eux-mêmes, en rendant possible l’amélioration de ceux-ci directement. Le caractère intégré de la plateforme est l’une de ses plus grandes forces, pour éviter aux entreprises de gérer difficilement de nombreuses solutions et leurs éditeurs. Son interconnexion avec les systèmes déjà en place, comme un ERP, amène une cohérence globale qui est justement au cœur des enjeux actuels pour réussir des transformations ambitieuses. Et l’impact sur la cybersécurité est très fort : ne pas avoir de multiples outils changent complètement la donne. Autant de points qui peuvent faire la différence pour les projets menés actuellement par les industriels.