Avec Ninja, le fonds Jolt Capital assiste ses investissements par l’IA

Cet article a été publié originellement sur mydatacompany.fr

L’intelligence artificielle intervient au sein de l’activité de Private Equity du fonds indépendant Jolt Capital dans les décisions d’investissement. Le service Ninja est désormais exploité dans tous les domaines pour le profilage des sociétés.

Deux méthodes permettent aujourd’hui de faire grossir un fonds d’investissement. La première, historique, a consisté à multiplier le nombre d’analystes. Ceux-ci effectuent de la veille auprès de millions de sociétés pour le compte d’investisseurs. La seconde méthode s’appuie sur la data et l’intelligence artificielle.

C’est dans cette seconde approche qu’investit le fonds de private equity Jolt Capital depuis maintenant 2016. Son équipe de recherche, intégrée au métier d’investissement, a développé un service dédié : Ninja.

 

Faciliter la détection des sociétés où investir

« Un petit nombre d’investisseurs est en prise directe avec le marché grâce à cet outil. Cela leur permet de suivre potentiellement des millions de société et de prendre des décisions d’investissement en ayant un accès direct à l’information » détaille Philippe Laval, CDO de Jolt Capital.

A ce jour, la plateforme Ninja, basée sur l’exploitation de l’intelligence artificielle, permet de profiler automatiquement plus de 600.000 sociétés. Et son objectif est bien entendu un gain de productivité. Les investisseurs peuvent ainsi se consacrer prioritairement aux décisions d’investissement et plus à la collecte d’information, automatisée.

Traitement du langage naturel et Deep Learning

« Le fonds de la technologie, c’est du traitement du langage naturel et du deep learning, qui permet d’apprendre ce qu’est un bon investissement » précise le chief digital officer. Pour l’apprentissage, Ninja repose sur un corpus de 14.000 sociétés, dont la qualité en termes d’investissement a été validée manuellement par des experts humains.  

Cette base ne suffit pas cependant à déterminer les bonnes décisions d’investissement. Philippe Laval rappelle qu’aucune règle ne permet aujourd’hui de distinguer bons et mauvais placements. Chaque fonds dispose de ses propres critères, rarement formalisés d’ailleurs. Ce n’est pas la seule difficulté cependant.

Pas de décision d’investissement automatique

Les données elles-mêmes, souvent non structurées, « sont difficiles à obtenir » souligne Philippe Laval. Mais le développement de l’intelligence artificielle dans le domaine du private equity repose aussi sur un changement culturel. Lever ce frein suppose la mise à disposition d’une « solution complète qui adresse tout le système, du sourcing jusqu’à l’exit. »

En ce qui concerne les données, essentielles à la prise de décision, elles proviennent de trois sources principales. Les données peuvent être publiques. Elles sont collectées au sein de communiqués de presse, des sites Web des entreprises ou de salons.

Données stockées dans un graph de connaissances

Jolt puise également au sein de sources semi-ouvertes comme des bases de brevets ou LinkedIn. S’y ajoutent des données payantes, fermées. Toutes les informations sont stockées dans un « immense » graph de connaissances.

Mais les données déterminantes sont cependant collectées en interne. Elles sont constituées du feedback des utilisateurs eux-mêmes. Grâce à Ninja, ils votent pour des sociétés listées par le service. « C’est ce critère-là qui permet finalement d’apprendre ce qu’est une société intéressante pour un fonds » note le CDO.

L’engagement des utilisateurs indispensable à la performance

L’utilisation de Ninja par les investisseurs est à ce titre fondamentale pour la détection des sociétés. Cela suppose une interface adaptée et des fonctionnalités suscitant l’engagement (scoring, chat, etc.). « Chaque action a une valeur. Plus on peut construire une boucle de feedback et plus on est capable d’apprendre ce qui constitue  une entreprise intéressante » pointe Philippe Laval.

Concrètement, au cours du dernier semestre de 2019, les cinq partners de Jolt ont pu examiner 4000 entreprises, suggérées automatiquement par Ninja. Parmi cette sélection, 900 ont été conservées (20%). Au démarrage du service de Machine Learning, les investisseurs ne retenaient que 5% de ces suggestions.

Deux tiers des deals actifs sourcés par Ninja

Le processus ne s’arrête pas là néanmoins. Sur les 900 leads, 10% sont parvenus jusqu’au comité d’investissement pour 62 « deals actifs ». Beaucoup de propositions de Ninja n’ont pas abouti donc. Toutefois, parmi les 62 deals, les deux tiers provenaient du service d’IA. La décision d’investir reste bien cependant un processus humain.

« En aucun cas, il ne s’agit d’investissement automatique » prévient Philippe Laval. « Ninja est un outil qui permet aux investisseurs de faire leur vrai métier de qualification. Ils peuvent prendre une vraie décision grâce à des outils qui les rendent les plus informés possible. »

Agrégation de données et collaboratif

Pour informer au mieux les investisseurs, Ninja réalise donc principalement un travail d’agrégation de données. Pour chaque société référencée dans le système, ils disposent instantanément d’informations détaillées sur son activité, ses brevets, etc.

IA complétée par du scraping, l’UX et la sécurité

Ninja conçoit automatiquement aussi des rapports d’analyse, fournissant par exemple une liste de comparables. Cette tâche nécessiterait un à jour de travail à un humain. Investisseur Deep Tech, Jolt Capital met également à disposition une analyse de brevets, du positionnement de la société par rapport à ses concurrents et les grands comptes, ou encore des personnes clés.

Pour le chief digital officer du fonds, l’intelligence artificielle n’est pas tout néanmoins. « C’est aussi beaucoup du travail de scraping et de récupération de l’information, parfois avec des algorithmes sophistiqués. C’est aussi un gros travail d’interface » conclut-il, insistant en outre sur le niveau de sécurité et le coût de la plateforme.