[Chronique] DSI et Business : cum numericus

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Dans sa nouvelle analyse, notre chroniqueur Thierry Adenis insiste sur ce qui fait de la Direction des systèmes d’information d’une entreprise un vrai « Compagnon numérique » pour le « Business ».

[Chronique] DSI et Business : cum numericus Lors d’une interview, un journaliste me demande quel est le mot qui définit le mieux ma vision de la DSI. Difficile question. Très rapidement, je ne vois qu’une seule expression : « Compagnon numérique ». Je vais insister sur le sens primaire de « compagnon » : l’étymologie du mot vient du latin cum panis. Celui avec qui on partage le pain. Le pain au sens élément primaire de la nourriture. Donc une notion de partage pour « mieux vivre ».

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Aujourd’hui, pas une entreprise ne peut produire sans un minimum de numérique. C’est devenu l’alimentation primaire de tout processus. Donc de tout entreprise. Mais trop souvent, le numérique est encore associé à la seule DSI ; ou à une gestion « discrète » (shadow IT) par le seul Business. On y trouve deux situations extrêmes, beaucoup plus fréquentes qu’on ne peut le penser, surtout au sein de ETI.

Un système d’information trop souvent subi ou ignoré

La plus fréquente est que le Business ne se sent pas concerné. Il voit le système d’information sous le seul angle technologique. Pour lui, l’informatique n’est qu’un amalgame de machins techniques qu’il ne comprend pas. Le seul rôle qu’il comprend de la DSI est qu’elle installe des PC avec des applications installées. C’est un système d’information subi dont il se sent exclus voire ne veut pas y être inclus.

Cette situation peut être aggravée par la volonté, consciente ou non, de la DSI de conserver la maitrise totale du système d’information, au motif que c’est elle qui détient l’expertise technologique. C’est le stade 1 du cycle de maturité du SI. Une DSI technologique qui intervient à la demande en apportant une solution « clé en main », pensée et désignée par ses soins. Combien de fois ais-je entendu un(e) directeur(trice) dire « la DSI m’a déployé tel logiciel pour gérer mon activité. Il ne correspond pas du tout à la manière dont je travaille ».

A l’opposé, l’arrivée des solutions SaaS donne des ailes au Business qui peut désormais acheter ses solutions en totale autonomie, tombant sous le charme des vendeurs de rêve qui leur explique qu’il n’y a aucun besoin de faire intervenir la DSI pour déployer la solution. Tout va bien jusqu’à ce que le Business découvre qu’il faille interfacer ce service au système d’information pour qu’il fonctionne comme prévu. Ou qu’à la survenue d’un problème on découvre que le contrat est « très léger » et présente des risques forts pour l’entreprise (RGPD, propriété des données, réversibilité, engagement de service…).

Un SI sous la double responsabilité DSI-Business

Carnet d'expériences DRH, DSI et Digital Workspace Et une multitude d’autres raisons intermédiaires dues au mauvais fonctionnement de la relation entre la DSI et le Business. Le système d’information doit être sous la double responsabilité DSI / Business. Seul le Métier connait le besoin, seule la DSI sait comment le traduire en solution numérique. C’est ce que j’appelle « déployer des usages ». Les 2 entités (processus opérationnel et solution technologique) sont indissociables et d’importance égale pour créer de va valeur.

Le sujet est n’est aucunement nouveau. Nombre d’articles et d’ouvrages décrivent celui-ci depuis 10 ans. Et pourtant, c’est loin d’être le cas dans un grand nombre d’entreprises.

Les projets majeurs réussis que j’ai pu observer avait un point commun. Le duo Business/DSI fonctionnait dans une parfaite complémentarité, et ne faisait qu’un du point de vue organisationnel.

Faire face à la spécificité française

Notre spécificité française du couple MOA/MOE a souvent abouti à l’inverse du résultat escompté. Lorsque l’on décrit 2 entités qui ont des responsabilités distinctes, même sur un objectif commun, le risque est réel d’avoir des actions et des timings différents. Sans parler des batailles d’ego.

Je pense que nous devons, au contraire, avoir une démarche beaucoup plus partenariale, c’est-à-dire partageant un seul et même objectif. Donc un seul pilote du projet, un seul responsable. Celui-ci pouvant provenir du Métier, de la DSI, ou de l’extérieur. Il n’a qu’un seul objectif : réussir le projet en faisant collaborer l’ensemble des ressources et des compétences nécessaires.

Le paramètre qui différencie ces deux approches est que chaque projet est unique. Vouloir coller à tous les projets un seul modèle organisationnel induit donc un fort risque d’avoir une gouvernance inadaptée.

Il convient donc, pour chaque projet de prendre le temps de bien en comprendre ses enjeux, sa complexité, sa spécificité, ses contraintes, … pour mettre en place une gouvernance « intelligente », c’est-à-dire parfaitement adaptée au contexte.

N’oublions pas que les modèles organisationnels ne sont qu’une bibliothèque des possibles. Plus une organisation maitrisera de méthodes, de modèles de gouvernance, de talents, plus elle sera « riche » et pourra s’adapter au cas présent. Elle augmentera donc fortement les chances d’atteindre sa cible.

Alors, mesdames et messieurs du Business, je vous propose que nous soyons « cum numericus », des compagnons numériques, et que nous partagions la stratégie, la conception, la réalisation et la gestion quotidienne du numérique, élément devenu essentiel des processus opérationnels, afin de faire grandir ensemble l’entreprise numérique.

Et nous serons tous gagnants.