Investissements dans les fintechs : vers un ralentissement salutaire ?

Après deux années particulièrement dynamiques en termes d’investissements, les fintechs reprennent peu à peu un rythme de croisière face au resserrement des conditions de crédit et à la hausse des taux. Le secteur se prépare à de nouvelles transformations et mise cette année, sur la croissance et la R&D. Analyse du secteur.

Investissements dans les fintechs 164,1 milliards de dollars injectés dans les fintechs pour 6 006 opérations réalisées au niveau mondial (1), un record. Soutenu par une abondance de liquidités quasi-gracieuses durant la pandémie, le marché a bénéficié d’un fort rebond en 2022, avec une augmentation de plus de 30 % par rapport à 2021. Si la proportion des investissements provenant des Business Angels – notamment Fabrice Grinda, serial-investisseur, Valentine Baudouin, conseillère de Motier Ventures ou encore la Family office AA & Sons – a augmenté, en revanche, la part des investisseurs internationaux, en particulier celle des Américains, s’est amoindrie face au contexte macro-économique incertain. Une baisse globale de l’ordre de 46 %, soit 75 milliards de dollars, selon le rapport « Pulse of Fintech », de KPMG.

Les jeunes pousses principalement touchées

La baisse des financements pénalise en premier lieu les jeunes pousses en early stage. Pourtant, ce sont celles qui ont potentiellement le plus besoin de capitaux durant les premières années d’activité. Ce désintérêt soudain des investisseurs pour les fintechs proviendrait principalement de la chute, à l’été 2022, des valeurs Tech sur le Nasdaq, de la guerre en Ukraine, et d’un resserrement des conditions d’accès au financement, additionné à la hausse des taux.

Malgré ce ralentissement, le secteur conserve une bonne santé économique avec un taux de croissance de l’ordre de 80 % en 2022, et un effectif total en hausse de 37 %, porté par les établissements bancaires – BNP Paribas, avec la néo-banque Nickel, la Société Générale avec PayXpert, ou le Crédit Agricole avec Linxo sa solution d’OpenBanking – les néo-assureurs, et les acteurs du paiement en ligne. Ces fintechs nouvellement créées viennent avant tout combler un déficit de compétences internes chez ces grands acteurs bancaires et conduisent pour elles de lourds projets de digitalisation.

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Coup d’accélérateur sur les systèmes de paiement et la R&D

Les fintechs ont indéniablement accéléré l’innovation dans les banques traditionnelles, qui à l’origine, considéraient leurs départements informatiques comme de simples centres de coût, au service de la sécurité du système d’information. Aujourd’hui, le changement de paradigme est en cours, et celles-ci prennent conscience d’une nécessité de transformer leurs outils et process, et miser sur de nouveaux services.

Neuf banques sur dix envisageraient ainsi d’investir au cours des prochaines années dans les technologies de paiement modernes à court et moyen terme, selon le dernier palmarès Fintech 100, et de consacrer un tiers de leur chiffre d’affaires dans la recherche et le développement, notamment sur les algorithmes et la gestion des données. Profitant également de l’essor de l’Intelligence Artificielle, elles envisageraient une multitude de nouveaux services bancaires et de solutions innovantes pour améliorer l’expérience client. A l’heure actuelle, les paiements constituent un levier de croissance important pour le secteur, mais les systèmes existants ne permettent pas encore d’atteindre l’efficacité attendue par les utilisateurs. Des fintechs telles que Paybox, Lydia, PayGreen, Slimpay tirent leur épingle du jeu, mais leur défi pour les années à venir, reste la rentabilité.

Car même si certaines ont opéré des tours de tables massifs de plusieurs millions d’euros, elles sont bien loin d’être rentables.