[Chronique] Pour grandir dans un monde incertain, les start-up doivent adhérer au management de portefeuille de projets

L’incertitude, la complexité et l’ambiguïté sont des paramètres qui pèsent de plus en plus lourds dans les règles du jeu des entreprises. Les start-up n’y échappent pas, mais le management de portefeuille de projets est une des réponses qu’elles peuvent apporter.

les start-up doivent adhérer au management de portefeuille de projetsDans une ère que l’on qualifie de « Monde VUCA » (pour Volatility, Uncertainty, Complexity & Ambiguity) en constante évolution, l’incertitude, la complexité et l’ambiguïté sont des paramètres qui pèsent de plus en plus lourds dans les règles du jeu des entreprises. Les start-up n’y échappent pas, mais le management de portefeuille de projets est une des réponses qu’elles peuvent apporter.

Plus que d’autres entreprises, les start-up sont le reflet de structures organisationnelles, souvent autocratiques, c’est-à-dire où le pouvoir s’exerce principalement par le fondateur et ses proches. Le pouvoir est alors détenu par ceux qui ont les connaissances et aptitudes techniques nécessaires pour contribuer au succès de ladite « organisation ». Bien souvent, les start-up se concentrent sur le cœur de métier et le développement commercial, c’est-à-dire sur la technologie ou le service vers lequel l’ensemble de leurs investissements se tournent majoritairement. Tant qu’elles ont une taille embryonnaire, elles peuvent compter sur leur dynamisme, la vélocité des décisions et de leurs arbitrages pour répondre aux attentes de leurs clients.

La difficulté que rencontrent ensuite beaucoup de start-up réside dans la perspective de passer à l’échelle. « Selon l’INSEE, 25% des entreprises échouent au bout de 2 ans et 49,5% au bout de 5 ans, le taux est beaucoup plus élevé pour les start-up, 50% survivent après 2 ans et 80% échouent au bout de 5 ans. »

En effet :

  • Se développer devient non plus une finalité en soi mais un véritable enjeu,
  • Se structurer devient non plus un détail, mais un incontournable,
  • Savoir maîtriser ses ressources devient non plus inutile mais une nécessité, car les ressources ne sont pas illimitées,
  • Savoir décliner une stratégie pour mieux prioriser les investissements et ses ressources créatrices de valeur devient un atout.

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“La stratégie, c’est décider de ce que l’on fait, et aussi de ce qu’on ne fait pas.” (Miguel Rivera-Santos, Professeur de Stratégie).

Très vite, elles se retrouvent confrontées à leurs propres limites, c’est-à-dire à ce qui a fait d’elles des entreprises naissantes, stimulées par l’innovation, la mise en œuvre d’une idée devenue réalité basée sur une organisation flexible, dé-verticalisée que l’on assimile au modèle de l’entreprise « libérée » et décomplexée des carcans de leurs « sœurs » entreprises classiques. Rapidement, une alternative s’offre à elles : faire évoluer leur organisation, leurs processus internes, leur organe de décision, c’est-à-dire se structurer, gagner en hauteur de vue, définir un cadre de référence ou bien disparaître. Sans toutefois abandonner leur raison d’être et leur ADN, il existe un juste équilibre qui consiste à être en capacité de gérer correctement leurs ressources et de veiller à leurs dépenses.

Il ne s’agit pas uniquement de recruter pour parvenir à assurer la demande. Il existe cependant un lien étroit entre le taux de croissance, la survie et la gestion des ressources et de l’organisation. Il s’agit d’allier les bonnes recettes et les conditions favorables pour répondre à cette équation mais aussi de combler l’écart entre la stratégie et son exécution par les décisionnaires des start-up. Il s’agit aussi de concentrer ses ressources sur ce qui crée de la valeur pour le client et de la richesse pour l’entreprise. L’adoption d’un véritable pilotage stratégique, économique, financier et opérationnel participe au bon usage de ses ressources allouées à chaque département de la start-up. Cela contribue à l’instauration d’une meilleure communication entre les parties prenantes de l’entreprise par une transparence accrue, une confiance acceptée et une stabilité renforcée dans l’organisation qui suscite l’engagement de l’ensemble des acteurs de l’organisation. De plus, la prise de décision se trouve d’autant accélérée et plus fiable grâce à une vision étendue de l’état de santé des projets d’investissements et de financement. La start-up doit être convaincue des bénéfices apportés par ce dispositif de management de portefeuille de projets, produits et programmes lui offrant une vision panoramique sur ses activités, une meilleure priorisation et hiérarchisation de celles-ci facilitant la prise de décision.

“Il n’y a pas de vent favorable pour celui qui ne sait pas où il va.” Sénèque

  1. Une condition nécessaire et indispensable repose sur la définition des composantes de la stratégie. Inscrire le pilotage de portefeuilles de projets comme une verticale de la stratégie de l’entreprise est fondamental et participe à l’engagement des décisionnaires dans une performance durable de l’entreprise mais aussi à l’engagement de l’ensemble des acteurs de l’entreprise. Le parfait alignement du portefeuille de projets sur les axes stratégiques définis par le comité de Direction doit servir les enjeux et les objectifs de l’entreprise.
  2. Une deuxième condition nécessaire repose sur le choix d’un positionnement approprié du dispositif dédié au pilotage des portefeuilles de projets, produits et programmes. Il subsiste encore et toujours une confusion dans le positionnement fonctionnel et symbolique d’un organe d’un portefeuille de projets qui voudrait que le pilotage ne couvre uniquement que les activités opérationnelles. C’est une erreur couramment rencontrée. Il ne peut exister de véritable suivi de l’exécution de la stratégie sans cohérence globale des activités et donc sans associer l’ensemble des acteurs et des contributeurs concernés (les opérations, le business, la finance, …).
  3. La troisième condition nécessaire et suffisante repose sur la mission et même les missions que doit jouer cette structure dédiée au management de portefeuille de projets. Ici, la définition du rôle et des responsabilités doit être claire, précise et partagée avec l’ensemble des parties prenantes afin qu’aucun ne s’approprie ce dispositif comme étant à son propre service. Il est fréquent de limiter ce dispositif à des activités de contrôle de gestion rattaché à la Direction Financière. C’est aussi une erreur souvent rencontrée. Il est aussi tentant d’en faire un outil de contrôle de proximité des activités de chefferie de projet, leur retirant ou mettant sous surveillance le rôle de planificateur et anticipateur du chef de projet. Il s’agit d’adopter un dispositif de portefeuille de projets porteur de sens et de réfléchir à l’étendue des activités à couvrir. Il s’agit de favoriser les interactions dans l’organisation afin de transmettre les messages aux bons interlocuteurs, au bon moment pour décider dans la perspective des futurs investissements et réalisations.

C’est ainsi que les start-up disposeront de la meilleure base de décision possible pour piloter leur création de valeur, évitant ainsi les conflits.

Références :

  • L’histoire des start-up, Faster Capital (Mai 2023)
  • Les start-up, nouvelles formes d’organisation du travail aux nouvelles formes de contraintes (CE Gamassou, 2021)
  • Livre blanc du cercle des entreprises du PMI, Pilotage des projets par la valeur et organisation adaptée (Mars 2022)